Hasard et causalité psychique

Comment apprécier à partir de la clinique psychanalytique notre rapport avec cette figure que nous convoquons si facilement comme étant celle du destin ? Freud nous invite à ne croire qu'au hasard objectif et à n'accorder aucun crédit au hasard subjectif. Lacan nous introduit à la conception d'une causalité psychique ordonnée par la logique du signifiant.

Que nous apprend ici le névrosé, le pervers, le psychotique ? on conviendra aisément d'une clinique différentielle : chacune de ces structures entretient avec cette représentation du hasard un mode spécifique de rapport. Il reste à en déplier le jeu varié des formes et à en articuler la syntaxe qui ne manquent pas de dégager ce lieu de l'Autre en tant que recel des signifiants et énigme du désir.

Il ne serait pas sans intérêt pour notre propos d'interroger le phénomène psychosomatique, sa monstration figeant un chiffrage qui escamote la place du non-sens : ici, même le rien n'est pas laissé au hasard. Ou encore la clinique du traumatisme, ou se recouvrent si aisément le hasard objectif et le hasard subjectif.

Dans la psychopathologie de la vie quotidienne, la pratique des jeux dits de hasard ouvre un autre champ propre à notre réflexion pour faire valoir autant sur les nécessités d'un espace culturel à soutenir ses rêveries que sur la vérité fondamentale du joueur qui est de perdre.

Comment articuler la tuché et l'automaton? voilà bien une question qui nous conduit à reprendre toute une tradition philosophique pour en apprécier la pertinence dans le champ de la psychanalyse, mais aussi à interroger dans notre époque les figures qui donnent à notre moderne destin des allures essentiellement statistiques. Disons que c'est une manière de maltraiter le symbolique en le privant de son vide fondateur; c'est ramener le sujet moderne à l'addiction d'une machine à sous, qu'elle soit fruit de la misère commune ou de la fortune boursière. L'attente anxieuse du jackpot, voilà ce à quoi pourrait se réduire le sujet moderne s'il ne restait pas quelque chance que le discours psychanalytique, et quelques autres peut être, ne puissent déjouer ces mirages qui visent à sa perte.

Ce que nous dit l'expérience de la psychanalyse, c'est que le sujet de l'inconscient est celui qui n'a jamais joué les bons chiffres, mais il peut savoir, si son désir le porte jusque là, comment il est chiffré.

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