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Je me suis souvent demandé ce qui m'a décidé à devenir artiste
John GOUDIE LYNCH

Quelques années avant la mort de mes parents je leur ai demandé ce qui m'avait motivé de choisir d'aller aux Beaux-Arts. « Tu faisais toujours comme ton frère " était leur réponse abrupte. J'ai dû leur expliquer que lui a commencé les Beaux-Arts à Edinburgh cinq ans après la fin de mes études aux Beaux-Arts à Glasgow. Comme d’habitude leur réaction était le silence.
J’ai entendu dire que les artistes ont souvent subi un entraînement très strict à la propreté et pour moi ça expliquait tout, parce que ma mère racontait toujours avec un grand plaisir à tout le monde qui voulait l’écouter que j’étais « propre » à l’âge de six mois.
Toutefois je me demande si ma décision n’était pas le résultat d’une frustration que j’ai subie pendant mon enfance quand le seul crayon que j’avais était un 5H, le plus dur qui existait, et qui au lieu de laisser des marques, déchirait le papier ! J’avais aussi une gomme, que j’ai toujours, qui ne faisait que des tâches ou lieu d’effacer !
A l’école primaire j’étais toujours en train de dessiner, normalement des scènes de guerre avec des tanks, des canons et bateaux de guerre en attendant que les autres gosses finissaient leur problème de math, mais un évènement décisif a été un cours de peinture, organisé par le conseil des écoles de Glasgow à la fin de ma quatrième année à l’école secondaire. On était une soixantaine d’élèves à être invités à passer deux semaines dans un château près de Glasgow. Et pour moi c’était le paradis. Peindre des paysages depuis tôt le matin jusqu’à tard dans l’après-midi, entouré d’un groupe d’élèves motivés et enthousiastes.
Comme j’ai dit au début, j’étais admis aux Beaux-Arts de Glasgow après l’école secondaire et là aussi j’ai été entouré par un groupe d’étudiants très enthousiastes avec qui je suis toujours en contact. Quatre années fantastiques suivies par une année de collège pour devenir professeur de dessin, ce qui ne me laissait pas le temps de peindre. Après avoir obtenu mon diplôme j’ai pris une année sabbatique et je suis allé aux Pays-Bas pour voir ma copine que j’avais rencontrée à un chantier de jeunesse à Dijon deux années avant. J’y suis resté et j’ai commencé à enseigner à mi-temps à l’Ecole Internationale d’Amsterdam.
Dès le début de mon séjour en Hollande les gens m’ont demandé ce que j’avais fait comme études. « Vous êtes donc artiste » était toujours leur réaction.
Petit à petit je suis revenu au monde de la peinture et j’ai commencé à exposer dans plusieurs galeries, mais ça m’a pris au moins cinq ans avant que j’ose dire que j’étais artiste.
En 1974 on est venu en France dans le petit village de Glorianes dont le maire, l’année avant, nous avait gentiment proposé une maison si jamais on voulait s’installer. Six mois après on a acheté une maison à Rodes mais qui avait besoin d’être retapée. La surface mal dessinée sur le cadastre a fait faire une confusion à notre ami notaire, la maison comprenait également un autre bâtiment en ruine et elle était donc deux fois plus grande que nous ne pensions. C’était exactement ce que je cherchais : une combinaison de reconstruction et de peinture !
Mes premiers tableaux étaient basés sur des croquis exécutés sur des photos de portraits dans des journaux. (a-b)

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Pour moi ça a été une bonne méthode pour stimuler mon imagination, (c-d) mais après quelques années j’ai commencé mes tableaux à partir de traits et formes abstraits.
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On peut comparer mes interprétations de ces formes à la façon dont on interprète les formations créées par les nuages et je trouvais que ça libérait ma « sous-conscience ». Dans l’exemple que je vais vous montrer on pourrait penser que ce processus avance sans problèmes, (e-k) mais parfois il me faut des jours et même des semaines avant d’aboutir à un sujet qui me donne envie de continuer.

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Frustration, mélancolie, angoisse, absurdité, dérision, tristesse sont des mots souvent utilisés par les journalistes pour décrire mes œuvres. Je dois avouer que je m’intéresse à l’absurde et à l’autodérision ce qui est très caractéristique des gens de Glasgow, mais je ne peux pas dire que je souffre d’autres symptômes.
La première fois que j’ai exposé dans la région, j’ai été attaqué violemment par l’adjoint au maire pendant le vernissage qui m’accusait de me moquer de lui. Ne sachant pas de quoi il parlait je me suis barré.
Je suis souvent surpris par l’interprétation des gens concernant mes tableaux et par le niveau de violence et d’agression qu’ils croient y déceler. Dans notre gîte j’ai un tableau qui a souvent provoqué des interprétations bizarres, de la part des femmes surtout. Il s’agit d’un père bordant son enfant. (l)
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« Cet enfant ne survivra pas à la nuit » est la réaction que j’entends le plus souvent. Mon beau-frère qui est également psychanalyste se sert souvent d’un de mes tableaux pour provoquer des discussions avec ses clients. (m)
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Et leurs réactions m’ont toujours surpris.
J’essaie toujours de laisser mes tableaux ouverts à plusieurs interprétations et souvent ils déclenchent des histoires fabuleuses et personnelles. Un exemple inoubliable pour moi était basé sur le tableau intitulé « Bandits … ». (n)

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La première fois que je l’avais exposé un vieux monsieur s’est approché de moi tout excité et m’a dit que c’était son frère. Apparemment pendant la guerre son frère aîné était pilote de Spitfires et il était son héros. En revenant à la maison un jour, après la guerre sa mère lui dit que son frère était de retour. Il courut en haut s’attendant de revoir son frère dans son uniforme de pilote et qu’est-ce qu’il voit ? Son frère en train de se laver dans la baignoire !
C’est la raison pour laquelle je n’aime pas imposer une interprétation qui serait la seule valable. C’est perçu parfois comme « arrogant » mais j’ai toujours préféré la discussion et entendre le point de vue de l’autre.
Il y a quelques années j’étais dans une galerie à Paris devant un grand tableau. Et j’étais complètement immergé dans ce tableau, dans un monde sous-marin de bleus et de verts lorsque tout d’un coup l’artiste s’est approchée de moi et a commencé à m’expliquer sa toile. Elle me parlait de son monde habité par les esprits, ce qui me laissa complétement froid. Ma vision de rêves s’est éclatée en mille morceaux !
Parfois je ne suis pas conscient moi-même de la motivation derrière certains tableaux, parce qu’ils sont souvent créés dans un état second dû à une concentration prolongée ou à la fatigue. Une chose dont je suis absolument certain est de l’effet positif pour moi et pour les autres de l’expression de mes sentiments à travers la peinture.
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Je vais quand-même vous montrer d’autres photos de mes tableaux et parler de la motivation derrière.
(o) L’épouvantail était peint l’année après que j’avais commencé à toucher ma retraite.












(p-x) Les photos qui suivent sont basées sur l’inquiétude que j’ai ressentie pendant des années à cause de l’addiction de mon frère, qui pariait sans cesse sur les courses de chevaux, parfois avec mon argent de poche.
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(y) L’indépendance Ecossaise.
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(z) Down-sizing. Un mot qui était à la mode il y a une dizaine d’années et qui veut dire la réduction du nombre des salariées d‘une entreprise.
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(za) Soirée Intime. Inspiré par une soirée passée dans un restaurant en Hollande avec ma femme, ma belle-sœur et mon beau-frère. Assis à la table à côté de nous, un couple qui ne disait pas un mot durant tout le repas.
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(zb) Acrobat. Le vertige que j’ai eu qu’une fois en montagne au sommet de La Pech de Bugerach en regardant les champs en bas, ce qui s’est combiné pour moi avec les jeux olympiques de Barcelone où les plongeurs en piscine sautaient d’abord en l’air faisant des pirouettes avec en arrière-plan la Sagrada Familia.
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(zc) Mère et enfant
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(zd) Père et enfant

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