Hystéro-traumatisme
chez deux soeurs: Oedème bleu hystérique chez la cadette; coxalgie
hystérique chez l'aînée.
A côté des précédentes observations d'oedème bleu chez
des hystériques, il m'a paru intéressant de placer la relation des deux
cas suivants, que M. le P' Charcot avait présentés antérieurement dans
ses leçons cliniques (le 24 février 1890).
Le premier est un exemple d'oedème bleu hystérique associé à de la
contracture du poignet et de la main. absolument identique au cas de la
jeune fille de la leçon précédente, sauf qu'il s'est développé sous
l'influence du traumatisme. Il a trait également à une jeune fille;
mais celle-ci était née et habitait à la campagne. Un jour, portant
dans ses bras une charge de bois, elle glissa sur le sol et tomba. Dans
sa chute, un morceau de bois vint heurter son poignet et le dos de sa
main. Après une période d'incubation de plusieurs jours, pendant
lesquels elle put continuer à travailler, une contracture apparut, pour
laquelle divers traitements furent tentés vainement. Enfin la malade
vint à la Salpêtrière, où l'on reconnut la nature véritable de son
affection.
Le second est un exemple typique de coxalgie hystéro-traumatique,
survenue en conséquence d'une chute dans un escalier, et méconnue
également pendant de longs mois. Bien que ce dernier n'ait aucun
rapport avec l'oedème bleu, on ne pouvait cependant le séparer du
précédent pour cette raison qu'ils se sont produits l'un et l'autre
chez les deux soeurs.
Obs. I, - B..., Amélie, 18 ans, fille de ferme à Saint-Christophe
(Cantal), entrée à la Salpêtrière le 2 décembre 1889, service de M. le
Pr Charcot.
Antécédents héréditaires. -- Parents bien portants; vivant encore. 2
soeurs, dont l'une, atteinte de maladie nerveuse, est en traitement
dans le même service. La malade nie absolument toute tare nerveuse,
tout alcoolisme chez les ascendants et les collatéraux. Elle ne connaît
pas le reste de sa famille. D'autre part, les renseignements ci-dessus
sont à peine dignes de foi, la malade étant tout à fait obtuse et
ignorante.
Antécédents personnels. - Elle ne se souvient pas d'avoir été malade
étant petite, ni plus tard. Sa première maladie serait, dit-elle, la
maladie actuelle.
Il y a 11 mois passés elle portait une charge de bois; il y avait par
terre une couche épaisse de neige durcie. Elle glissa tout à coup,
tomba sur la paume de la main droite en extension forcée et, en
tombant, laissa échapper sa charge de bois dont un lourd morceau vint
heurter le dos de la même main. Douleur très vive dans la main et dans
le bras. Pas de perte de connaissance, elle s'est tout de suite relevée
sans aide (elle était seule), a repris sa charge de bois et a marché
ainsi pendant une heure avant d'être rentrée à la ferme. Le soir même
elle pétrit du pain. Aussitôt en finissant ce travail, la main se
ferma, c'est-à-dire que les doigts se fléchirent dans l'intérieur de la
main, le pouce restant libre.
Les jours suivants, pendant 4 ou 5 jours, elle continua de travailler,
bien que la douleur fût assez vive et que la main se fût mise à
gonfler, au niveau de la face dorsale. Une ecchymose violette apparut
et la gène des mouvements s'accentua, la main se ferma davantage, au
point que tout travail devint impossible. Il ne semble pas que l'on ait
constaté à cette époque de fracture, ni de luxation, car le traitement
ne consista pas tout d'abord dans l'immobilisation, mais dans des
frictions avec l'eau-de-vie-camphrée. Puis, le gonflement continuant,
la gêne des mouvements restant toujours la même, on commença à faire
usage de teinture d'iode sous forme de badigeonnages. Tout cela dura un
mois environ.
Au bout de ce temps, voyant que la douleur persistait et que la
déformation (poing ferme ne disparaissait pas, le médecin, croyant sans
doute à quelque lésion articulaire organique, endormit la malade avec
du chloroforme et ouvrit la main. Puis il plaça cette main dans un
appareil inamovible ordinaire (attelles de bois et bandes de toile) et
fit sur la région dorsale du poignet et le dos de la main des pointes
de feu. Ce mode de traitement fut continué, les pointes de feu répétées
onze fois et divers appareils plâtrés mis en place. Il est à remarquer
dès maintenant que l'application réitérée de teinture d'iode, dès le
début, n'avait pas été douloureuse et que la brûlure des pointes de
feu, ressentie d'une façon assez nette lors des premières séances, ne
fut plus du tout perçue dans la suite.
Elle resta ainsi dix mois dans des appareils inamovibles variés et ce
n'est que la veille de son entrée à la Salpêtrière qu'elle quitta le
dernier. Pendant ce temps, les médecins qui la soignaient auraient
agité la question d'une amputation de l'avant-bras, pour une tumeur
blanche des articulations de la main.
Pendant cette période de temps, pas d'attaques de nerfs, pas de perte
de connaissance, pas de douleurs de ventre.
Etat actuel. - 8 décembre 1889. - Ce qui attire tout d'abord
l'attention, c'est l'attitude de la malade. Elle porte sen bras droit
habituellement en écharpe, la main et le poignet entortillés dans de
l'ouate et de la flanelle, évitant les chocs et garant de son mieux
cette partie malade. Lorsqu'on lui enlève l'écharpe et le pansement
elle donne instinctivement la même position à la main, qu'elle tient le
coude fléchi, à une certaine distance du corps, exactement comme si
l'écharpe était encore en place.
La main est assez déformée. La face dorsale est le siège d'un
gonflement notable, du à une sorte d'oedème dur, dans lequel le doigt
ne marque pas d'empreinte permanente. Cicatrices nombreuses de pointes
de feu. Peau violacée. Main un peu plus froide que du côté opposé. Les
doigts sont appliqués les uns contre les autres, les deux derniers sont
un peu fléchis, l'index et le médius complètement étendus. Le pouce est
à peu près libre dans ses mouvements. La face palmaire est comme
creusée d'une sorte de gouttière oblique due d'une part au
rapprochement des deux éminences thénar et hypothénar et, d'autre part,
à une sorte d'enroulement de la main auteur d'un axe vertical passant
en son milieu. C'est en somme, à peu de chose près, la position de la
main dans un appareil plâtré ou silicaté. En dehors de cela, pas de
déformation appréciable, pas d'amyotrophie visible (Voir Fig. 20).
Au point de vue des mouvements, le poignet est absolument libre dans
Ies mouvements actifs et passifs, quoiqu'ils n'aient peut-être pas
toute l'étendue qu'ils ont normalement, donc pas de paralysie dans les
mouvements de cette articulation. quant aux doigts, ils sont collés les
uns contre les autres, de façon qu'on ne peut les séparer sans éprouver
une notable résistance, et si, après en avoir ouvert un, on le laisse
échapper, il revient à sa place comme sous l'influence d'un ressort. on
éprouve une sensation d'élasticité dans la traction et dans la façon
dont ce doigt revient à sa place. On ne sent pas de cordes tendineuses bien nettes ni de
brides fibreuses en aucun point des articulations de la main ou du
poignet.
L'examen électrique pratiqué par M. le Dr Vigoureux donne les résultats
suivants : réactions électriques normales dans les muscles de la main
et de l'avant-bras. La diminution d'excitabilité n'est qu'apparente et
due à l'augmentation considérable de la résistance dans la région
anesthésique.
Anesthésie complète pour le tact, la douteur, la chaleur dans tonte la
longueur du membre supérieur, jusqu'au-dessus de de l'épaule, en forme
de manche de veste. Le froid est perçu comme du chaud, dans la même
étendue. Le 6 décembre il n'y avait absolument que cette partie du
corps insensible. Le reste de la moitié droite du corps était plutôt
légèrement hypoesthésique. Aujourd'hui il existe dans tout le côté
droit une anesthésie complète pour tous les modes de la sensibilité,
tact, chaud, froid, douleur.
Goût : Aboli à droite. - Vue : Rétrécissement du champ visuel double à
60°. Dyschromatopsie. Polyopie monoculaire. -Ouïe:: Diminuée
notablement à droite.-Odorat: très obnubilé à gauche, à peu près nul à
droite.
Réflexe pharyngien aboli surtout à droite.
État d'énervement bizarre quand on l'examine, aboutissant à une espèce
de petite attaque avec larmes, dyspnée, air hébété.
Pas d'ovarie, pas de points hystérogènes, pas d'attaques.
Le dimanche 10 au matin, on pratique l'examen sous le chloroforme.
Aussitôt la résolution obtenue, la contracture cesse subitement, la
mensuration de la circonférence de la main au niveau des articulations
métacarpo.phalangiennes donne des deux côtés 18 centim. Avant le
réveil, la résolution ayant cessé, la contracture reprend subitement.
La malade, même sous le chloroforme, quand la résolution n'est pas
complète, tient par habitude sa main contre sa poitrine, comme si elle
avait le bras en écharpe.. Si on écarte la main, elle reprend
automatiquement la même situation.
1er février 1890. - L'analgésie a disparu au membre supérieur droit
dans son entier, mais les impressions douloureuses sont moins vivement
perçues que du côté opposé. Il en est de même de la chaleur et du froid.
Légère perte du sens musculaire.
La contracture des doigts de la main est exactement ce qu'elle était.
Goût : Normal à droite et à gauche.
Vue : A droite, rétrécissement du champ visuel à 55°.
- : A gauche, vue normale. Ouïe : droite, normale.
-- :gauche, faible. Odorat : Normal.
Pendant l'épidémie de grippe, au mois de janvier 1890, elle a présenté
les symptômes d'une pseudo-tuberculose hystérique avec crachements de
sang, toux fréquente, expectoration, douleurs intercostales.
Dans la suite la malade quitta l'hôpital sur sa demande, non encore
guérie.
Voici maintenant l'observation de la soeur de cette malade, atteinte de
coxalgie hystéro-traumatique.
Cas. II. - B..., Anna, 21 ans. Autrefois couturière à Saint-Christophe,
puis domestique à Paris.
(Pour les antécédents héréditaires, voir l'observation de sa soeur
Amélie, atteinte d'arthralgie hystérique de la main; celleci n'en dit
pas plus long).
Antécédents personnels.- La malade ne se rappelle rien de son enfance.
Il y a cinq ans elle eut une fièvre typhoïde, deux ans avant elle avait
en une fluxion de poitrine à la suite d'un refroidissement. Il y a deux
ans, pleurésie gauche suivie d'une névralgie générale ". -Elle avait
mal partout. Enfin elle eut une gastrite qui fut qualifiée par son
médecin, tantôt d'aiguë, tantôt de chronique. Les douleurs d'estomac se
répercutaient dans le dos et en un point vertébral. Les vomissements
étaient incoercibles à cette époque.
Jusqu'au mois de novembre 1888, elle était couturière dans son pays.
Depuis lors elle entra comme bonne à tout faire dans une maison
bourgeoise à Paris.
Le 27 avril 1889 elle tomba dans un petit escalier, s'étant pris les
pieds dans une ficelle qu'un enfant de la maison avait tendue en
travers d'une porte. Elle tomba sur le côté droit, non sur le genou. On
la releva immédiatement, saignant du nez et ayant l'oeil droit
violemment contusionné. Elle était un peu étourdie, mais n'avait
nullement perdu connaissance.
Elle se coucha tout de suite, avec une violente douleur dans le côté et
également dans le ventre et dans l'estomac. Elle vomissait tout ce
qu'elle prenait. Il existait aussi une certaine douleur dans le genou,
mais qui attirait moins l'attention que les autres. Les douleurs de
ventre et de côté ont duré environ 5 mois.
Le 3 mai 1889, dix jours après, la malade entra dans un petit hospice
privé. Quelque temps après son entrée, les vomissements la reprirent et
elle rendit plusieurs fois du sang rouge vif en assez grande quantité,
On ne s'occupa du genou que deux mois après l'accident, Tout d'abord il
se fléchit sur la cuisse, le talon presque centre la fesse et il était
impossible de l'allonger. Des douleurs vives se faisaient sentir dans
le genou et la hanche. Le chirurgien, appelé un beau jour, conseilla
l'emploi d'un appareil à extension continue, après avoir allongé le
membre pendant le sommeil chloroformique; ce qui fut fait. La malade
resta avec un poids au bout du pied pendant 53 jours, sans le moindre
résultat autre que celui-ci: quand on enleva l'appareil, le membre
inférieur droit semblait plus long que le gauche.
Pendant le séjour dans l'appareil à extension on fit sur le genou des
applications de teinture d'iode, après lesquelles il se mit à enfler,
puis vinrent des pointes de feu (3 fois) et quatre vésicatoires. Cela
dura 4 mois 1/2 à 5 mois. Puis, à cause des douleurs violentes, on fit
usage de laudanum, enfin d'un bandage compressif. Enfin, le médecin et
le chirurgien de l'hôpital, peu de jours avant la sortie de la malade,
lui proposèrent la désarticulation de la cuisse. Elle n'accepta pas, et
deux jours avant la date choisie pour l'opération elle demanda à entrer
à la Salpêtrière, sur le conseil d'un interne de l'établissement, qui
l'adressa à cet hospice, ayant sans doute reconnu la véritable nature
de sa maladie (1).
Les douleurs de hanche, qui se confondaient d'abord, au dire de la
malade, avec les douleurs de côté du début, n'ont pas cessé pendant
tout le temps d'être ce qu'elles sont aujourd'hui.
Etat actuel (8 décembre 1889). - La malade étant
couchée, car elle ne quitte pas cette position, ce qui frappe tout
d'abord, c'est un allongement apparent du membre inférieur du côté
droit. Le genou, la malléole interne, le talon sont plus inférieurs à
droite, mais aussi, si on découvre la malade, l'épine iliaque de ce
côté. En réalité, cet allongement n'est donc qu'apparent, car en
rectifiant la position des deux épines iliaques, en les plaçant sur la
même ligne transversale, on voit qu'il disparaît. D'ailleurs, la
distance entre l'épine et le sommet de la molléole interne, à droite et
à gauche, est exactement la même.
Ce redressement de la position de la jambe, pour l'amener à être au
même niveau que l'autre, est accompagné d'un très léger degré de
torsion de la colonne vertébrale et d'ensellure.
Mais cela est très peu prononcé.
La malade étant debout (c'est-à-dire soutenue complètement sous les
aisselles par un aide) c'est exactement le contraire que l'on remarque.
Parce que cala lui fait trop mal, elle ne pose pas son pied droit sur
le sol; elle le maintient sur la pointe seulement, faisant porter le
poids du corps exclusivement sur le membre inférieur gauche. D'où
l'apparence d'un raccourcisessement du membre avec un peu d'effacement
du pli fessier droit et d'abaissement apparent du pli gauche, en même
temps que torsion de la colonne vertébrale.
Du côté du genou, légère modification de forme due peut être aux
altérations du tissu sous-cutané consécutives à tousles mauvais
traitements que cette région a subis depuis 7 mois.
Il y a au-dessous de la rotule comme une sorte de coup de hache. Le
tibia semble légèrement subluxé en arrière et l'on sent, plus loin en
arrière que de coutume, les condyles fémoraux. La peau de la région est
fortement pigmentée, épaissie, couvertes de cicatrices de vésicatoires
et de pointes de feu.
De plus, on constate très nettement à la vue une atrophie notable du
triceps fémoral (droit antérieur principalement) droit. A un travers de
main au-dessous du bord supérieur de la rotule il y a, entre le côté
droit et le côté gauche, une différence de 2 centimètres (21 cent, à
droite, 23 cent. à gauche). Au tiers supérieur de la cuisse, cette
différence n'est plus que de 1 centimètre à peine.
La douleur est vive à la partie interne du genou, au niveau de
l'attache supérieure du ligament latéral. Elle est spontanée et très
fortement réveillée par les mouvements de flexion qui sont cependant
possibles. La peau ne parait pas douloureuse, mais seulement la
pression profonde. Il est remarquable que, quand on plit le genou,
cette douleur n est pas limitée à 1 articulation, mais s'étend tout le
long de la cuisse jusque dans le ventre et bien qu'elle ne donne à la
malade aucune sensation de constriction gastrique ou pharyngée, Il est
certain qu'elle là met dans une sorte d'angoisse très particulière.
Les mouvements de la hanche sont relativement moins douloureux que ceux
du genou. Mais ils ne sont pas libres et en particulier l'abduction est
limitée par une contracture visible et sensible au toucher des muscles
adducteurs. La presslon aux points d'élection sur l'articulation
coxo-fémorale est doulou-
reuse. Pas de signe de Brodie ici, pas plus qu'au genou.
La percussion sur le talon, le membre étendu, est douloureuse au niveau
du genou (partie interne) et de la hanche. -La percussion sur le genou,
la jambe fléchie, est également douloueuse dans la hanche.
Les réflexes rotuliens des deux côtés sont considérablement exagérés.
On sent quelques secousses de trépidation épileptoïde, mais pas
nettement caractérisées.
Pas de secousses fibrillaires dans le triceps droit atrophié.
Rien du côté du tronc ou des membres supérieurs.
La malade est maigre, faible, son intelligence est plutôt audessous de
la moyenne. On la dirait littéralement abrutie par les souffrances
qu'elle a endurées depuis 7 mois et elle le dit elle-même.
Réglée à 18 ans, régulièrement depuis cette époque. Flueurs blanches
dans l'intervalle.
Pas de douleurs de ventre spontanées. Pas d'ovarie. Pas de zones
hyperesthésiques ni hystérogènes nulle part. On a vu qu'il n'existait
pas de signe de Brodie au niveau des articulations malades.
Sensibilité diminuée pour la douleur, le chaud et le froid dans toute
l'étendue du membre inférieur droit jusque sur le ventre au-dessous de
l'ombilic en avant et en arrière jusque et y compris la fesse. Le tact
est conservé dans cette étendue. Rien d'autre aux membres ni au tronc,
sinon un certain degré d'hypoesthésie pour le chaud dans toute
l'étendue du membre supérieur droit.
Vue : rétrécissement double du champ visuel à 60°. Rien d'autre. - Ouïe
: Très obnubilée à droite. Normale à gauche. -- Odorat : Nul des deux
côtés. -- Goût : A peu près nul des deux côtés.
Pas d'attaques de nerfs. Il y a deux ans elle aurait eu, par suite de
sa grande faiblesse, des évanouissements fréquents.
18 février 1890.-La malade est sortie hier en ville et, se trouvant
dans une chambre cirée, elle a glissé et est tombée sur le côté malade.
Elle se plaint d'une violente douleur à la hanche. On n'observe pas de
contusion, pas d'ecchymose. La malade ne peut localiser exactement la
douleur.
Les mouvements sont douloureux comme précédemment. Douleur vive à la
pression dans la région de la cuisse.
19 Février.- L'hypoesthésie a disparu au membre supérieur on grande
partie; il reste encore des plaques anesthésiques, en particulier à la
partie postérieure du bras.
L'anesthésie a disparu à la jambe; à la cuisse elle s'est transformée,
ainsi que dans la région du genou, en hyperesthésie cutanée très vive.
22 février. - On la chloroformise; au moment où la résolution a été
obtenue, la raideur de la hanche et du genou a disparu. Les mouvements
sont conservés intégralement.
Tout est semblable des deux côtés, et on ne constate rien d'anormal
dans les jointures. Cette dernière expérience est décisive en ce qui
concerne la nature hystérique de cette coxalgie.
La malade sortit de l'hospice quelque temps plus tard, sur sa demande,
non encore guérie.
Ces deux observations nous montrent l'hystérie
traumatique chez la femme, où on la trouve peut être moins souvent que
chez l'homme. De plus elles prouvent l'identité absolue de l'hystérie
chez les gens de la ville et chez ceux de la campagne. Voilà deux
filles de ferme, arriérées, obtuses, absolument sans instruction, qui
réalisent deux types d'accidents d'hystérie locale les mieux
caractérisés qui se puissent voir. Fait non moins intéressant, il
s'agit ici des deux sueurs, chez qui la névrose s'est développée sous
l'influence du même agent provocateur, le traumatisme. Bien que l'on
n'ait pu retrouver dans leurs antécédents héréditaires, tant par
ignorance que par mauvaise volonté de leur part, aucune trace de tare
nerveuse dans les ascendants et les collatéraux, il est bien certain
cependant que la maladie n'a pu se développer ainsi de toutes pièces
chez deux soeurs. La prédisposition héréditaire existait là, c'est bien
certain ; l'agent provocateur n'a fait que la mettre en jeu.