Lacan débute sa leçon en avançant que s’il a choisi ce sujet de
l’angoisse, ce n’est pas par hasard. Que l’angoisse est à considérer
comme une grande ressource pour la psychanalyse. Un « point de rdv »,
rdv qui viendrait nouer tout ce qui a pu auparavant être amené
jusque-là, au même titre que peut le faire le fantasme.
En quoi l’angoisse serait-elle pour nous une grande ressource ? Alors
même qu’elle est censée nous étouffer, nous mettre à l’épreuve dans la
relation au patient ? Comment alors, ce qui est censé nous étouffer,
peut pour nous être d’une grande ressource ?
L’analyste, nous dit Lacan, pour peu qu’il ait de bonnes dispositions à
être analyste, peut dans ses débuts ressentir de l’angoisse. Pourquoi
vaudrait-il mieux que l’analyste ressente de l’angoisse dans ses débuts
? En quoi cela constitue-t-il une bonne disposition à être analyste ?
L’angoisse est-elle un guide ? Vers quoi est-elle censée nous guider ?
Autre questionnement : Le patient nous communique-t-il son angoisse ?
Et donc cette angoisse, qui nous guide, est-ce la même que celle du
patient ? Ne nous trouvons-nous alors pas dans une relation symétrique,
intersubjective ? Et quel lien pouvons-nous alors penser entre
l’angoisse et le transfert ?
Lacan évoque le rapport de l’angoisse essentiel au désir de l’Autre.
Angoisse et désir sont donc étroitement liés. Il revient à ce moment-là
sur la fable de la mante religieuse :
Se retrouvant face à une mante religieuse, et portant un masque qui
peut induire en erreur la mante religieuse sur son identité, il ajoute
: « dans ce miroir énigmatique du globe oculaire de l’insecte je ne
voyais pas ma propre image. » Rien qui se reflète dans l’œil ou le
regard de l’autre, pas d’appui sur cette image dans « ce miroir
énigmatique » ,(qui évoque le stade du miroir)
Tableau (p.3)
La question « Que veux-tu » est posée dans ce tableau (un
aide-mémoire). C’est également la question charnière entre les 2 étages
du graphe du désir :
Graphe du désir (p.3)
Que me veut-il ? Lacan souligne dans cette formulation l’ambiguïté du «
me » : que veut-il à moi ? ou alors quelque chose qui concerne le moi,
que veut-il concernant cette place du moi ?
Donc que veut-il non pas à moi mais au moi. Ce quelque chose, serait
alors à situer entre les 2 étages du graphe, entre le trajet en rouge
qui va du d(désir) au S barré et le trajet en bas qui va du i(a) au
m(moi). Des « points de retour » selon Lacan qui désignent « l’effet
caractéristique et la distance » et qui renvoient au rapport du désir
et de l’identification narcissique. Et c’est donc dans la dialectique
de ces 2 étages que l’on peut y situer la fonction de l’angoisse.
Le premier étage est celui des énoncés et de la chaîne apparente. Le
deuxième est celui de l’énonciation avec la chaîne dissimulée. C’est
aussi la différence qu’on peut entendre entre les dits et le dire. La
fable de la mante religieuse nous enseigne que l’angoisse apparait face
au désir de l’Autre : quelle place peut-on prendre dans le désir de
l’Autre ?
Dans notre rapport à l’angoisse, Lacan questionne qui nous ménageons :
soi même ou l’autre, 2 modalités qui ne doivent pas être confondues.
Lacan se réfère ensuite au courant existentialiste, marquée selon lui
par la dégradation, la hâte. Ainsi, pour Sartre, la fonction du sérieux
qu’évoque Lacan renvoie au fait que la morale préexiste à l’homme,
qu’elle est une donnée indépendante de la subjectivité humaine. (Comme
un idéal, lien avec la loi morale chez Kant ?)
Parmi les existentialistes, il y a ensuite Heidegger et la notion de
souci. Le souci, chez Heidegger, correspond à une manière d’être
lorsqu’on est préoccupé par quelque chose. C’est à partir de cette
présence que l’on pourrait aborder l’étant. Ce souci, pour Lacan,
l’omnitude du quotidien, n’a pas grand-chose à voir avec l’angoisse.
Schéma p.6 (rond)
Entre le souci, le sérieux, et Lacan proposera également l’attente,
mais comme il l’indique dans son schéma l’angoisse ne se situe pas là.
Il va ensuite nous proposer les termes d’inhibition, symptôme et
angoisse (en référence au texte de Freud).
Schéma (p.6)
On peut remarquer que ces 3 termes ne sont pas sur la même ligne, au
même niveau, et il va les présenter dans une sorte de matrice (un autre
pense-bête ?), avec comme axes qui les distinguerait d’une part la
difficulté et le mouvement.
Il va compléter cette matrice :
Schéma (p.7)
Où on voit notamment que l’axe de la difficulté va de l’inhibition à
l’embarras. Inhibition ce qu’il désigne comme l’arrêt du mouvement.
Et sur l’axe du mouvement, on peut voir que l’empêchement est au niveau
du symptôme. Etymologiquement, le terme d’empêchement signifie être
pris au piège. Et Lacan nous renseigne sur le fait que le piège dont il
s’agit, c’est la capture narcissique imaginaire.
Au niveau du sujet, sur l’axe de la difficulté, Lacan propose le terme
d’embarras, dont l’étymologie renvoie à la barre, au sujet « revêtu de
la barre ». « Une forme légère de l’angoisse ».
Dans la dimension du mouvement et qui descend du symptôme, Lacan y
situe l’émotion. Toujours d’un point de vue étymologique, elle se
réfère à un mouvement qui se désagrège, une réaction catastrophique. La
réaction catastrophique correspondrait-elle à l’angoisse ? Lacan nous
dit que ce n’est pas sans rapport mais la question est de situer ou
elle est vraiment, l’angoisse.
Et il continue de questionner : « y a-t-il dans la dimension du
mouvement quelque chose qui plus précisément réponde, à l’étage de
l’angoisse ? »
Il nous propose le terme d’émoi qui n’a rien à faire avec l’émotion et
qu’il définit comme le fait de se troubler. L’émoi est à situer dans la
matrice dans le maximum sur l’axe du mouvement.
Schéma (P.8)
L’angoisse n’est pas une émotion mais un affect.
Lacan nous rappelle qu’un affect n’est pas refoulé, il est désarrimé,
s’en va à la dérive : « On le retrouve déplacé, fou, inversé,
métabolisé, mais il n’est pas refoulé. Ce qui est refoulé, ce sont les
signifiants qui l’amarrent.»
Une théorie générale des émotions est du côté de la psychologie. La
psychanalyse, elle, s’intéresse au désir et « l’affect par où nous
sommes sollicités, c’est l’angoisse », et ce serait sur ce tranchant de
l’angoisse que nous avons à nous tenir.
Il conclut donc en revenant sur la question du désir et amène sur la
fin le terme de tranchant concernant l’angoisse. (Ce terme de tranchant
m’a beaucoup arrêté, interpellé).
Leçon 2 Idelette Crétegny
L’angoisse Chapitre 2 pour le 27 novembre 2021
Merci de votre présence qui va me faire travailler doublement.
Il s’agit de la théorie du désir dans son rapport à l’Autre.
Si je traverse rapidement la leçon elle me semble se diviser en 2 temps
:
• Le temps où Lacan parle, questionne face à son auditoire.
• Et le temps où Lacan se retourne et écrit au tableau des formules en
expliquant.
Je repars du début de la leçon en essayant de résumer.
*
Devant un auditoire d’analystes, et de non-analystes, Lacan pose la
question : comment enseigner ce « on ne savait pas » à qui « ne peut
pas savoir ».
Ce petit bout de quelque chose que saurait l’analyste, peut-il
l’enseigner ?
Pouvons-nous parler de l’angoisse ? Comprenons-nous quelque chose au
vécu des malades ?
Toutefois Lacan conseille : « il n’est pas trop désirable d’amener
quiconque à trop en croire sur ce qu’il peut comprendre ».
C’est là, dit-il, que prennent leur importance les éléments signifiants.
« L’angoisse est un affect » et Lacan ne s’est pas refusé à cet élément
de classement. « Du point de vue de l’enseignant on pourrait définir ce
thème de l’angoisse sous 3 rubriques :
• Celle du catalogue.
• Celle de l’analogue qui aboutit à ce qu’on appelle une anthropologie
».
• Mais l’expérience nous conduit à ce que Lacan appelle « la troisième
voie, celle de la clé, la clé est ce qui ouvre et ce qui pour ouvrir
fonctionne.
C’est la forme selon laquelle doit opérer, ou ne pas opérer, la
fonction signifiante comme telle ».
Ceci dit : pas d’enseignement sans idéal de simplicité. Ce qui va nous
amener au trait.
« Qu’est-ce-qui peut nous permettre de supposer qu’un réel serait
simple : eh bien rien mais rien d’autre que cet initium subjectif sur
lequel j’ai mis l’accent ici pendant toute la première partie de mon
enseignement de l’année dernière, à savoir qu’il n’y a, d’apparition
concevable d’un sujet comme tel, qu’à partir de l’introduction première
du signifiant le plus simple, qui s’appelle Le trait unaire.
Au commencement est le trait unaire. Et tout ce qui est enseignable
doit conserver ce stigmate de cet initium ultrasimple qui est la seule
chose qui puisse à nos yeux justifier l’idéal de simplicité ».
« Le trait unaire est avant le sujet ».
« C’est cela que nous faisons entrer dans le réel que le réel le
veuille ou pas.
Dans ce réel on y est déjà entré avant nous.
Déjà l’Autre est là. L’angoisse est un certain rapport que je n’ai fait
jusqu’ici qu’imager. Je vous ai rappelé la dernière fois l’image, avec
le dessin réévoqué de ma présence, ma présence fort modeste et
embarrassée en présence de la mante religieuse géante ».
Alors, qu’en est-il de la présence de l’Autre, avec un grand A? Ceci a
rapport avec le désir de l’Autre dit Lacan.
« Le désir de l’homme est le désir de l’Autre, barré ou pas ».
Le saut de Lacan va passer par Hegel, et cela va concerner la fonction
du désir :
• Dans Hegel concernant la dépendance de mon désir par rapport au
désirant qu’est l’Autre j’ai à faire, de la façon la plus articulée, à
l’Autre comme conscience, l’Autre est celui qui me voit.
En quoi cela intéresse mon désir ? vous le savez dit Lacan, vous
l’entrevoyez déjà assez. L’Autre est celui qui me voit et c’est sur le
plan que mon désir y est intéressé.
• Pour Lacan, toujours concernant la fonction de désir (c’est à ce
moment que Lacan se nomme), l’Autre est là comme inconscience constitué
comme tel, et il intéresse mon désir dans la mesure de ce qui lui
manque, et qu’il ne sait pas. C’est au niveau de ce qui lui manque et
qu’il ne sait pas que je suis intéressé de la façon la plus prégnante,
parce qu’il n’y a pas pour moi d’autre détour, à trouver, ce qui me
manque, comme objet de mon désir.
« C’est pourquoi il n’y a pas pour moi, non seulement d’accès, mais
même de sustentation possible de mon désir qui soit pure référence à un
objet quel qu’il soit si ce n’est en le couplant, en le nouant, avec
ceci qui s’exprime par le S barré qui est cette nécessaire dépendance
par rapport à l’Autre comme tel.
L’Autre est bien à distinguer à chaque instant de l’autre, avec un
petit a, mon semblable : c’est l’Autre, comme lieu du signifiant. C’est
mon semblable entre autres bien sûr !
Mais pas seulement parce que c’est aussi le lieu comme tel où
s’instaure l’ordre de la différence singulière ».
****************
Lacan, comme il le dit, écrit des choses au tableau, c’est pour que
nous les transcrivions, après, nous en verrons le fonctionnement (page
34).
Je vais introduire maintenant les formules dit Lacan :
Le désir de désir au sens hégélien.
1) d(a) : d(A) non barré < a
Le désir de désir au sens lacanien.
2) d(a) < i(a) : d(Ⱥ)
Je passe à la seconde formule celle de l’angoisse :
d(0) < 0 : d(A)
d(A) : 0 > d(0)
Les deux formules (3-4) ne sont que deux façons d’écrire la même chose
dans un sens puis dans l’autre sens :
d(x) : d(A) < x
d(0) < 0 : d(A) non barré
c’est-à-dire
d(A) équivalent 0 > d(0) angoisse
Elles sont faites l’une et l’autre (page 36).
L’angoisse est ce qui donne la vérité de la formule hégélienne : d(x) :
d(A) < x énigme
La vérité de la formule hégélienne existe pourtant c’est Kierkegaard
qui la donne.
Dans les deux formules, celle de Hegel et celle de Lacan apparait :
l’objet petit a …
… à cause de l’existence de l’inconscient nous pouvons être cet objet
affecté du désir.
A propos du un répétitif c’est que ce un auquel se réduit en dernière
analyse la succession des éléments signifiants, le fait qu’ils soient
distincts et qu’ils se succèdent n’épuise pas la fonction de l’Autre.
- A partir de l’Autre originaire comme lieu du signifiant,
- De S, encore non existant qui a à se situer comme déterminé par le
signifiant, on peut écrire l’opération de la division.
A|S
S barré |Ⱥ
a |
Coté de l’Autre mon côté
Le fantasme, appui de mon désir, est dans sa totalité côté de l’Autre,
S̸ barré et a.
Ce qui est de mon côté maintenant est ce qui me constitue comme
inconscient, à savoir Ⱥ barré, l’Autre en tant que je ne l’atteins pas.
Vais-je vous mener plus loin interroge Lacan.
Encore deux formules de Lacan :
« je t’aime, même si tu ne le veux pas »
« il y a pourtant une autre formule qui, si elle ne démontre pas mieux
son efficace, cela n’est peut-être que pour n’être pas articulable,
mais ça ne veut pas dire qu’elle ne soit pas articulée ». C’est :
« je te désire, même si je ne le sais pas ».
Leçon 3 Elisabeth de Franceschi
Préambule :
- 1° les articulations de cette leçon paraissent très claires.
- 2° En ce qui concerne la thématique, le contenu : leçon centrée sur
l’intrication entre imaginaire et symbolique.
- 3° L’établissement de liens avec d’autres moments de l’enseignement
de Lacan me paraît important dans cette leçon III : a) poursuite des
rappels concernant le séminaire précédent (sur L’Identification), et b)
établissement de liens avec d’autres séminaires (par exemple, au cours
de cette leçon : développement sur Hamlet, en lien avec le séminaire VI
(1958-1959) sur Le désir et son interprétation, voir les leçons de
mars-avril 1959 et la leçon du 27 mai 1959)
p. 41 c) enfin rappels concernant les deux leçons précédentes de ce
séminaire X : à propos d’André Green, Lacan pointe la différence entre
la conception hégélienne et la conception lacanienne du désir (cf.
aussi le rapport de Rome datant de 1953, et le texte “Fonction et champ
de la parole et du langage en psychanalyse”, dans la revue La
Psychanalyse, vol. I, PUF, 1956, puis dans les Écrits). Il y a une
“articulation” possible entre le stade du miroir (celui de l’image
spéculaire) et le signifiant, au-delà de l’hiatus (la coupure ou la
scission) entre les deux c’est-à-dire entre image spéculaire et
signifiant, entre imaginaire et symbolique. Ce sera le sujet de la
présente leçon, p. 42 sujet étroitement lié à la thématique relative à
l’angoisse.
Rappel : dans “Propos sur la causalité psychique” (1946), un texte paru
initialement dans L’évolution psychiatrique, l’“entrejeu des deux
registres” (imaginaire et symbolique) était déjà “intimement tressé”
par Lacan ; or ces propos, tenus à Bonneval en 1946, avaient reçu un
accueil pour le moins ambivalent :
p. 43 le “pharisaïsme communiste” par exemple, visait à conforter
l’ordre établi ; d’où le silence ultérieur de Lacan sur ce sujet.
Trois “prolégomènes” vont introduire à la problématique de cette leçon
p. 44 1° D’abord la présentation du schéma du bouquet renversé de
Bouasse (fig. III-1, p. 44), qui reprend le séminaire I, Les écrits
techniques de Freud, et non la “Remarque sur le rapport de Daniel
Lagache” (Royaumont, 1960), contrairement à ce que Lacan semble dire
ici : dans la présente leçon, est soulignée la distinction entre
moi-idéal (qui renvoie au registre imaginaire) et idéal du moi (qui
réfère au registre symbolique) ; le rapport spéculaire donc
imaginaire dépend du fait que “le sujet se constitue au lieu de
l’Autre, se constitue de sa marque dans le rapport au signifiant”
manière de “tresser” ensemble registre imaginaire et registre
symbolique.
p. 45 Ce qui fait lien entre imaginaire et symbolique, c’est l’instant
“jubilatoire où l’enfant s’assume comme totalité fonctionnant comme
telle dans son image spéculaire”, et se retourne vers l’adulte “qui le
porte” et qui représente le grand Autre, pour lui demander d’entériner
“la valeur de cette image” mouvement de torsion de l’infans ; mais que
“répond” l’adulte ? soit “oui, c’est toi”, ce qui va peut-être
favoriser chez l’enfant la confusion entre image et identité, soit
“oui, c’est ton image”, ce qui peut introduire une distance avec
l’illusion portée par l’image. L’image spéculaire est notée i(a).
Il y a donc une liaison inaugurale entre imaginaire et symbolique
2° Ensuite la notion de “raison”. Cf. l’opposition entre raison
analytique et raison dialectique dans le dernier chapitre (chapitre IX)
de l’ouvrage de Claude Lévi-Strauss, La pensée sauvage, ouvrage en
“rapport étroit” avec la thématique développée dans le présent
séminaire X : Lacan fait intervenir la notion de “raison
psychanalytique”, pour en quelque sorte “répondre” à la “béance”
constituée par l’opposition (déeloppée par Lévi-Strauss) entre raison
analytique et raison dialectique.
qui dit “raison” dit aussi “intelligibilité” ;
- la raison analytique (en philosophie par exemple) se rapporte à
l’intelligibilité externe des phénomènes, considérés en fonction de
leurs différents éléments ;
- la notion de raison dialectique (ou synthétique), elle, porte sur
l’intelligibilité interne des phénomènes, considérés comme des
totalités, des systèmes ;
- quant à la “raison psychanalytique”, il s’agit d’une “logique” de
l’inconscient, à l’œuvre dans le discours psychanalytique, l’expérience
psychanalytique, la connaissance psychanalytique. Question : la
psychanalyse peut-elle être considérée comme une science ? En tout cas,
l’idée de rationalité, d’intelligibilité, est présente dans
l’expression “raison psychanalytique”.
En résumé, il n’y a pas grand-chose de commun entre la “raison
analytique” de la philosophie, centrée sur la pensée d’un sujet
conscient, et la “raison psychanalytique” de Freud ou de Lacan, centrée
sur l’inconscient.
p. 46 3° Enfin la notion d’“autre scène” (cf. Freud) :
Freud introduit l’inconscient dans La science des rêves comme ein
anderer Schauplatz, le lieu d’une “autre scène” (traduction PUF, p. 455
sq.), c’est-à-dire comme un mode constituant de notre “raison”
(psychanalytique), à savoir “de ce chemin que nous cherchons pour en
discerner les structures” les structures de l’inconscient sont aussi
les structures de notre “raison psychanalytique”.
Avec la notion d’autre scène, nous entrons de façon décisive dans la
thématique de cette leçon
Lacan détaille ensuite trois temps
Premier temps : “il y a le monde”, placé sous l’égide de la raison
analytique, laquelle “concerne ce monde tel qu’il est”, doté (par
Lévi-Strauss) d’une homogénéité “singulière” (selon Lacan, la démarche
de Lévi-Strauss comporte un “retour à une sorte de matérialisme
primaire” : dans ce discours, le jeu de la structure, de la
combinatoire, pourrait rejoindre la structure même du cerveau, ou de la
matière ; la structure du cerveau serait en fin de compte la même que
celle du monde.
Au total, voilà une conception du psychisme très centrée sur l’image ;
cf. aussi aujourd’hui les caméras des dispositifs de sécurité, ou
encore par exemple ce qu’apportent les images en 3 D des échographies
montrées aux futurs parents ; mais quel est l’apport proprement médical
de ces images ? qu’apportent-elles comme informations nouvelles aux
médecins, par rapport aux images en 2 D ? et quel est l’effet produit
par les images en 3 D sur l’angoisse des futures mères ? De telles
images portent-elles un coup d’arrêt à l’imaginaire ? on relève le côté
très “violent” que peuvent parfois revêtir de telles images).
En revanche, la dimension de la scène, sa division d’avec le lieu où le
spectateur se tient, cela peut imager la dimsion “radicale” de ce lieu
où les choses viennent à se dire, à se mettre en scène selon les lois
du signifiant, hétérogènes aux lois du monde.
Il y a donc opposition, ou distinction, entre la “raison
psychanalytique” et la “raison” (scientifique ou philosophique) qui
cherche à appréhender le monde.
p. 47 L’existence du discours est bien antérieure à l’avènement de la
science.
Lacan relève l’effort “désespéré” de Lévi-Strauss pour homogénéiser le
discours de la magie discours prélogique, donc infiltré d’imaginaire
avec le discours de la science considéré comme “logique”, donc
relevant plutôt du symbolique ; or ces deux sortes de discours
impliquent chacune un “temps”, une “coupure” et donc, une “différence”.
Deuxième temps : celui de “la scène sur laquelle nous faisons monter ce
monde”, c’est-à-dire la dimension de l’Histoire ma tentation :
affubler ce terme d’une initiale majuscule, pour mieux distinguer la
“grande” Histoire (collective) et la “petite” histoire (individuelle)
(selon Lacan, l’Histoire présente un “caractère de mise en scène” :)
une mise en forme, un cadrage sont proposés par l’historien. Voir le
chapitre IX de La pensée sauvage, dans lequel Lévi-Strauss répond à
Jean-Paul Sartre sur l’Histoire (voir J. P. Sartre, Critique de la
raison dialectique) : la portée du jeu historique est limitée (rappel :
le temps de l’Histoire diffère du temps cosmique, et les dates y
prennent une valeur autre : 2 décembre, 18 brumaire sont les exemples
retenus par Lacan). Mais une fois que la scène a pris le dessus, il est
possible de se demander “ce que le monde doit à ce qu’il lui est
redescendu de cette scène” : en effet, à partir du moment où nous
faisons référence à la scène, il est légitime de mettre en question le
monde (le cosmisme dans le réel) p. 48 et ses résidus hétérogènes.
En résumé, on soulignera l’interaction entre Histoire et “raison”
humaine
Troisième temps : celui de “la scène sur la scène” ; cf. Hamlet et
l’article de Rank (1916) sur la fonction de “la scène sur la scène” .
Lacan rappelle que Hamlet, personnage de la scène (création de
Shakespeare), fait venir sur la scène la Mouse-trap (“La Souricière”,
titre de la pièce représentée sur la scène de Hamlet) avec laquelle il
va “attraper” la conscience du roi cf. le séminaire VI (1958-1959) sur
Le désir et son interprétation, voir les leçons de mars-avril 1959
ainsi que la leçon du 27 mai 1959. Cela évoque aussi la scène du rêve
et la scène de l’analyse, son dispositif, qui convoquent l’inconscient
; pour sa part, Lacan mentionne les rituels qui accompagnent et
concourent à former le dispositif du théâtre.
p. 49 Cependant, premier point, selon Lacan, dans Hamlet, lorsque la
scène est mimée (prologue, avant que les acteurs ne disent leur rôle),
cela ne paraît guère émouvoir le roi.
En revanche, toujours selon Lacan, Hamlet développe une “crise
d’agitation” au momt où l’acteur Lucianus (Luciano) “accomplit son
crime” sur celui des deux personnages qui représente le Roi “de
Comédie” N. B. : je n’ai pas trouvé trace de cela dans la pièce de
Shakespeare, et Lacan observe que “l’accoutrement” = le costume
d’acteur du meurtrier du “Roi de Comédie” c’est-à-dire du roi
usurpateur, meurtrier de son frère est identique à celui d’Hamlet
lui-même ; en outre le personnage (de théâtre) qui accomplit le crime
est dit neveu du “roi de Comédie”; ce que Hamlet fait représenter sur
la scène, c’est donc “lui-même, accomplissant le crime dont il s’agit”.
N. B.: ambiguïté des phrases de Lacan à ce moment : qui le terme de
“personnage” désigne-t-il ?
Selon Lacan, par le biais de “la scène sur la scène”, Hamlet, qui ne
peut accomplir la volonté du Ghost (fantôme de son père), “tente de
donner corps à quelque chose” qui passe en fait par son image
spéculaire : “son image, non pas” “ds le mode d’accomplir sa vengeance,
mais d’assumer d’abord le crime qu’il s’agira de venger” par le fait
d’assister au spectacle, Hamlet peut s’identifier au meurtrier du “Roi
de Comédie” ; cf. aussi la catharsis dans la tragédie antique. Mais
nous constatons que ce procédé est “insuffisant” pour conduire Hamlet à
passer à l’acte : p. 50 en effet, le “prétexte” (le roi était en train
de prier) invoqué ensuite par Hamlet pour expliquer qu’il a renoncé à
commettre le meurtre à l’instant où c’était possible, ce prétexte
constitue une “dérobade”.
Deuxième point souligné par Lacan ensuite : l’identification de Hamlet
à Ophélie (suicidée, victime “offerte en sacrifice aux mânes paternels”
selon Lacan, du fait que son suicide est accompli après le meurtre
accidentel pas si accidentel que ça à mon avis ! par Hamlet de
Polonius, père d’Ophélie et de Laërte) ce meurtre du “beau-père”
fonctionne me semble-t-il comme un doublon du meurtre fantasmé, par
Hamlet, de son père : identification de Hamlet à l’objet perdu, que
Freud nous désigne comme “le ressort majeur de la fonction du deuil”
sous son aspect négatif (la mélancolie).
p. 51 Inversement, il existe un aspect “positif” du deuil : voir la
signification des banquets de deuil chez les paysans, qui ont pour
fonction de célébrer “l’avènement de celui qui a été à la gloire simple
qu’il mérite comme ayant été, parmi nous, simplement un vivant”.
Chez Hamlet, l’identification à l’objet perdu (le deuil) présente aussi
“sa phase positive”, dit Lacan : c’est l’entrée d’Hamlet dans “la
fureur de l’âme féminine”, qui lui donne la force de devenir “ce
somnambule qui accepte tout”, y compris d’être dans le combat celui qui
tient l’enjeu pour son ennemi le Roi, contre Laërte (c’est-à-dire
contre l’image spéculaire de Hamlet lui-même) ; à partir de là, tout
s’enchaîne jusqu’à ce que, blessé à mort par Laërte, Hamlet tue le roi.
Selon Lacan, il y a donc deux sortes d’identifications imaginaires :
- l’identification au i(a), image spéculaire donnée lors de “la scène
sur la scène” ;
- l’identification (plus “mystérieuse” que la précédente, dit Lacan) à
l’objet du désir, en tant qu’il vient de disparaître : ce qui reporte à
la dimension rétroactive de l’objet du désir voir, en frçais,
l’imparfait dans un emploi ambigu : “il ne savait pas” = “au dern. momt
n’a-t-il pas su, un peu plus, il allait savoir” : desiderium, ce
terme latin comporte une reconnaissance rétroactive (“cet objet qui
était là”) de l’objet du désir ; et cette reconnaissance rétroactive de
l’objet du désir, en lien avec la “pointe de la destinée” de Hamlet,
est aussi en concomittance avec le troisième temps que constitue le
temps de “la scène sur la scène”.
p. 52 Logiquement donc, l’interrogation de Lacan porte ensuite sur le
statut (non encore établi) de l’objet du désir.
Or l’objet du désir en psychanalyse diffère de l’objet scientifique
défini par l’épistémologie. La science “laisse ouverte” la question du
cosmisme de l’objet : en effet, l’existence d’un cosmos n’est pas
certaine ; pour avancer, la science doit renoncer à “toute
présupposition cosmique et cosmicisante” (même si Lévi-Strauss, dans La
pensée sauvage, tente de “restituer” une sorte “d’éternité du cosmisme
de la réalité”, ce qui peut être infiniment rassurant) ; mais qu’en
est-il du totémisme vidé de son contenu “passionnel” ?
p. 53 Selon Lacan, l’angoisse se situe entre le “retour” au cosmisme et
le “maintien” d’un “pathétisme historique”.
Rappel : il y a nouage de la relation spéculaire avec la relation à
l’Autre (voir le séminaire VI, Le désir et son interprétation, leçon du
20 mai 1959, et le séminaire VIII, Le transfert, leçons des 7, 14, 21,
28 juin 1961), cf. fig. III-3 ; l’investissement spéculaire se situe
dans la dialectique du narcissisme (Freud) ; l’investissement de
l’image spéculaire est pourtant un temps fondamental de la relation
imaginaire, cependant tout l’investissement libidinal ne passe pas par
l’image spéculaire : il y a un reste.
p. 54 Ce reste est le pivot dans toute cette dialectique. La prochaine
leçon détaillera la fonction privilégiée de ce reste, sous le mode du
phallus comme manque, .
Fig. III-4 : - dans la mesure où i(a) est une “image réelle”,
- et où i’(a) est l’“image du corps fonctionnant comme proprement
imaginaire, c’est-à-dire libidinalisée”, le phallus apparaît en moins,
comme un blanc. Le phallus constitue une “réserve opératoire” qui n’est
pas représentée au niveau de l’imaginaire, et qui est à la fois “cernée
par l’image spéculaire et … coupée de l’image spéculaire”. Les
développements sur le cross-cap, dans le séminaire IX sur
L’identification, ajoutent à cette dialectique une “cheville” qui se
situe “sur le plan de ce domaine ambigu qu’est la topologie”, affirme
Lacan. Pourquoi la topologie est-elle conçue par Lacan comme un
“domaine ambigu” ? Parce que la topologie “amincit à l’extrême” les
éléments de l’imaginaire, comme si elle était faite “de la pure
articulation signifiante”, tout en conservant “quelques éléments
intuitifs”, qui sont supportés par le cross-cap, lequel est considéré
par Lacan comme une image à la fois “biscornue” et “expressive”, dans
la mesure où, sur la surface du cross-cap, la coupure “peut instituer”
deux p. 55 morceaux différents, dont l’un la bande de Mœbius peut
avoir une image spéculaire et l’autre la rondelle de l’objet a, non ;
cf. la fig. III-5, p. 55.
Il y a rapport du (comme “réserve libidinale, insaisissable
imaginairement” bien qu’elle soit liée au phallus comme organe et comme
“instrument” de la satisfaction du désir) avec la constitution du a qui
est “ce reste, ce résidu”.
Or cet objet a est “l’objet dont il s’agit partout où Freud parle de
l’objet, quand il s’agit d’angoisse”, précise Lacan.
Au total, donc, l’objet a :
- “échappe au statut de l’objet dérivé de l’image spéculaire”
- “échappe aux lois de l’esthétique transcendantale”
- a un statut très difficile à articuler ; l’objet a est donc source de
“toutes les confusions” dans la théorie analytique.
En résumé, il faut souligner l’“ambigüité” de l’objet a : en effet,
nous ne pouvons faire autrement que de l’imaginer “dans le registre
spéculaire”.
En conséquence, la visée de Lacan est d’“instituer un autre mode
d’imaginarisation” où cet objet a puisse se définir.
- On partira de S, un sujet comme possible, qui parle donc $ ?.
- p. 56 : Avec la parole, entre en jeu le trait unaire, donc
l’identification primaire (“un, et un, et un, et un” : on part toujours
d’un un) ; dès lors, s’institue la possibilité de la reconnaissance de
i(a) comme unité donnée dans l’expérience spéculaire.
Cette expérience spéculaire est authentifiée (validée) par l’Autre au
niv. d’i’(a), image virtuelle d’une image réelle (il n’y a pas de
bouquet sur ce vase, voir la fig. III-6, p. 57 : on a , qui “n’est
pas entré dans l’imaginaire”). Ce temps “principiel” est lié au fait
que “le désir tient dans la relation que je vous ai donnée pour être
celle du fantasme” (relation imaginaire) : $ a ; c’est-à-dire que “ce
serait dans la mesure où le sujet pourrait être réellement (et non pas
par l’intermédiaire de l’Autre) à la place de I c’est-à-dire en haut
et à droite, dans la fig. III-6, qu’il aurait relation avec ce qu’il
s’agit de prendre dans le col de l’image spéculaire originelle, à
savoir l’objet de son désir”.
p. 57 Donc “ce que l’illusion du miroir sphérique produit” à l’état
“réel”, “sous une forme d’image réelle” (i(a)), il = l’homme en a
“l’image virtuelle” (i’(a)) “avec rien dans son col” : “le a, support
du désir ds le fantasme, n’est pas visible dans ce qui constitue pour
l’homme l’image de son désir”. Il y a donc présence du a (c’est là
l’initium du désir), mais “ailleurs, en deçà”, et, pour ainsi dire,
“trop près de lui pour être vue” ; “et c’est de là que l’image i’(a)
prend son prestige”. Mais cette image leurre : de fait, plus le sujet
s’approche de ce qu’il croit être l’objet de son désir, plus il en est
détourné, car tout ce qu’il fait “dans cette voie” (voie de la
“perfection de la relation d’objet”) pour s’en approcher “donne
toujours plus corps à ce qui, dans l’objet de ce désir, représente
l’image spéculaire” (en réalité, l’homme tend à protéger “le côté
intact de ce vase primordial qu’est l’image spéculaire”).
“Ce qui constitue l’angoisse”, c’est quand apparaît “quelque chose” à
la place occupée par a. Or ce qui devrait occuper cette place, c’est le
(“qui nous rappelle que tout part de la castration imaginaire”
introduite par la métaphore paternelle, et qu’il n’y a pas d’image du
mque). N. B. : le vide ne peut-il fonctionner comme “image” du manque
? Voir les distinctions entre vide, blanc, rien, néant, manque.
En l’absence du manque (par exemple quand toute norme, donc toute
anomalie, vient à faire défaut), se manifeste l’Unheimliche.
p. 58 Lire l’article de Freud sur “L’inquiétante étrangeté” (Das
Unheimliche, 1919), et son dernier “grand article” sur l’angoisse dans
Inhibition, symptôme, angoisse (1916) dans Addenda, éd. PUF, p. 100 et
avant : p. 94 sqq., “B, Complément relatif à l’angoisse”, et p. 98
sqq., “C, Angoisse, douleur et deuil” : cela permet d’appréhender le
sens de l’expression “perte de l’objet” quand celle-ci est employée par
Freud.
Questions :
1° Dans les trois premières leçons de ce séminaire, Lacan parle de la
séparation et de l’intrication entre deux registres : symbolique et
imaginaire il ne parle que fort peu du réel ; or il n’y a pas deux,
mais trois registres, qui toujours sont tous les trois présents et
intriqués ; dès lors, ne pourrait-on concevoir que le réel loge dans le
“blanc” du ? Ce serait alors un réel cerné, limité, encadré, donc
en quelque sorte “apprivoisé”, “civilisé”, et donc finalement assez
proche de ce que nous appelons la “réalité”.
2° Le cône de visibilité permet au sujet convenablement placé de
visualiser l’illusion (or c’est l’illusion que nous relions
étroitement à l’imaginaire qui rend la vie vivable, semble-t-il) ;
mais que se passe-t-il quand on reste en dehors des limites de ce cône
? Lorsque l’illusion vient à manquer, est-ce toujours la psychose ?
Leçon 4 Marie Christine Salomon Clisson
La
leçon 4 se trouve entre la leçon 5 et la leçon 3. Je n’ai cessé de
passer de l’une à l’autre pour vous en parler aujourd’hui. Et j’ai fait
le chemin le plus souvent à l’envers, en me retournant. En effet, pour
pouvoir appréhender la notion d’angoisse, nous avons à franchir une
étape supplémentaire en revenant au graphe où la pulsion va être à
cette place de leurre dans la structure fantasmatique (S barré poinçon
de la demande).
Introduction (essayons de suivre le fil inconscient de celui qui parle
en tant qu’analysant)
Lacan
cherche à approfondir la fonction de l’objet dans l’expérience
analytique. A ce jour, l’objet dont il est question, c’est l’angoisse.
Il nous propose de nous intéresser à son phénomène (à sa manifestation,
dans le temps et dans l’espace, par l’intermédiaire des sens) ainsi
qu’à la place qu’elle va occuper.
Il retourne à son article de
1960 « Subversion et dialectique du désir dans l’inconscient freudien »
car c’est ici que nous trouvons les différents temps de construction du
graphe et son utilisation mettant en évidence ce qui va encadrer la
fonction de l’objet.
L’ère de la technique a entraîné des
modifications dans l’appréhension de l’objet. Lacan évoque ce module
d’objet qu’est la pièce détachée dont il relève la fragilité de
subsistance, son emploi étant lié à un modèle qui peut devenir
obsolète. Cela lui permet de revenir sur un rapport énigmatique à
l’objet dans l’expérience analytique, où celui-ci résulte d’une
authentification par l’Autre à partir d’une image réfléchie,
fallacieuse de nous même et caractérisée par un manque. La fonction de
cette image est orientée par un désir voilé, mis en rapport avec une
absence et une possibilité d’apparition d’une présence qui est ailleurs
et insaisissable. C’est ici que Lacan place l’objet a, dont la fonction
dans le fantasme est d’être à cette place où quelque chose peut
apparaître. Dans la leçon précédente il utilise le signe (- phi ) pour
indiquer le lien de l’objet avec la réserve libidinale qui ne
s’investit pas au niveau de l’image spéculaire puisqu’elle est investie
au niveau du corps propre mais qui intervient comme instrument dans le
rapport à l’Autre qui s’est constitué à partir de l’image du semblable.
Cet Autre dessinera le contour de l’image du corps dans sa fonction
séductrice sur le partenaire sexuel. Cette place, désignée par le «
–phi », c’est l’angoisse de castration dans ce rapport à l’Autre. Lacan
souhaite partir de la dialectique du désir pour articuler quelque chose
de nouveau concernant le névrosé.
Pour Freud, l’impasse du
névrosé sera la butée sur l’angoisse de castration. Lacan propose une
ouverture : l’impasse du névrosé n’est pas l’angoisse de castration en
elle-même, car la castration dans sa structure imaginaire est déjà
formalisée dans l’image libidinalisée du semblable en « a » et en « –
phi ». La butée se fait au niveau de la cassure produite par une
dramatisation imaginaire (accidents de la scène traumatique). Il peut y
avoir toutes sortes d’anomalies et ce matériel pourra être utilisé pour
une autre fonction qui donnera son sens plein au terme de castration
(la brisure dans l’article de Ch. Fierens).
Le névrosé ne recule
pas devant la castration, mais d’avoir à faire de sa castration ce qui
manque à l’Autre (que l’Autre soit barré), c’est-à-dire de faire ce
quelque chose de vivant qui est la garantie de cette fonction de
l’Autre, cet Autre qui se dérobe dans le renvoi des significations. Et
qu’est-ce qui pourrait assurer un rapport du sujet à ces significations
sinon que quelque part il y ait jouissance ? Il ne peut l’assurer qu’au
moyen d’un signifiant, qui manque forcément (ce signifiant au statut
particulier nommé dans l’identification signifiant du manque). A cette
place manquante le sujet est appelé à faire cet appoint par un signe,
que Lacan appelle signe de sa propre castration. Vouer sa castration à
cette garantie de l’Autre, c’est devant quoi le névrosé s’arrête. C’est
l’analyse qui l’amène à ce rendez-vous. Il découvre que la castration
n’est rien d’autre que le moment d’interprétation de la castration.
Pensant qu’il a été un peu vite, Lacan souhaite revenir à cette place
où la castration imaginaire fonctionne pour constituer le complexe de
castration pour pouvoir explorer le passage possible dans l’angoisse.
Comment et pourquoi ce passage est-il possible ? Nous le découvrirons
en passant par la phénoménologie de l’angoisse.
L’angoisse comme
signal, c’est sa définition a minima. Elle apparaît à cette place, dans
ce phénomène qu’est l’Unheimlichkeit (la bizarrerie), terme auquel
Freud donne une grande importance en le dépliant dans une analyse
linguistique qui orientera le travail de Lacan sur la prévalence du
signifiant (article « l’inquiétante étrangeté »). Ce phénomène
introduit l’inquiétant, l’unheimlich, par le fait que ce ressenti
d’affect étrange est constitué de ce qui est heim à partir de ce qui ne
l’est pas, qui est donc Unheim. * Ce mot heim qui désigne une place, a
un sens dans l’expérience humaine : c’est la maison de l’homme (son
chez soi). Il trouve sa maison en un point situé dans l’Autre, au-delà
de l’image dont il est fait. Cette place représente l’absence où il est
(le S barré inconscient). Si cette place se révèle réellement pour ce
qu’elle est, c’est-à-dire la présence ailleurs qui fait de cette place
une absence, elle va s’emparer de l’image qui la supporte et l’image
spéculaire va devenir ainsi l’image du double avec cette étrangeté
radicale qui le fait apparaître comme objet, lui révélant la non
autonomie du sujet. Freud nous donne des exemples de cette expérience à
partir de la fiction, où ce mécanisme provoque une réaction
d’inquiétante étrangeté comme dans le conte de l’homme au sable ou
celui des élixirs du diable.
Le Heim ne se manifeste pas si
facilement. Le désir se révèle ici comme désir dans l’Autre. Il entre
où il est attendu, sous la forme de l’objet que je suis, en tant
qu’autre et il m’exile alors de ma subjectivité en résolvant par
lui-même tous les signifiants à quoi cette subjectivité est attachée.
Peut-être que cela n’arrive que dans les contes d’Hoffmann où le sujet
n’accède à son désir qu’à se substituer toujours à l’un de ses propres
doubles. Freud insiste sur cette dimension de l’expérience
d’inquiétante étrangeté essentiellement apportée par la fiction. Quant
à Lacan, c’est à partir de ce point, sorte de point idéal, qu’il va
interroger la fonction du fantasme et son effet qui reste à l’état de
fantasme. Le fantasme c’est un vœu (ein Wunsh). Ce « S barré poinçon de
petit a » peut se traduire dans cette perspective : que l’Autre
s’évanouisse, se pâme devant cet objet que je suis, mais que je ne vois
pas. Le rapport du S barré avec l’objet a s’écrit différemment selon la
fonction réflexive de A et il y a deux façons de répartir ces termes
selon que la fantasme est celui d’un névrosé ou d’un pervers.
L’objet
se situe là où le sujet ne peut le voir et c’est le S barré qui vient à
sa place. Le sujet pervers, tout en restant inconscient, va s’offrir à
la jouissance de l’Autre. Le névrosé, quant à lui, n’a pas le même
fonctionnement. Il se sert de ce fantasme à des fins différentes et va
le situer tout entier au lieu de l’A, en prenant appui sur quelque
chose qui va se présenter comme une perversion. (Schéma du pervers et
du névrosé dans l’expérience du miroir).
Les névrosés ont des
fantasmes pervers, mais cela ne fonctionne pas comme pour les pervers.
Le névrosé l’organise au moment où il en use en faisant apparaître à la
place du heim quelque chose de l’objet a, au-dessus de l’image où
apparaît l’angoisse. Le fantasme, vient faire barrage à l’angoisse en
la recouvrant. Cet objet a qu’il se fait être dans son fantasme, il
n’en fait pas grand chose, car cet objet est un postiche (un
remplacement artificiel). Lacan illustre ce fonctionnement en reprenant
le rêve de la belle bouchère (elle aime le caviar mais n’en veut pas
parce que cela pourrait faire plaisir à son mari. Ce qui l’intéresse
c’est qu’il puisse avoir envie de ce petit rien qu’elle tient en
réserve). Lacan fait cette remarque que cette formule ne s’applique pas
qu’à l’hystérique mais à tous les névrosés. Cet objet a, dans leur
fantasme, fonctionne comme défense contre l’angoisse mais aussi comme
appât avec lequel ils tiennent l’autre. Et il ajoute que nous devons la
psychanalyse à cet apport de Freud qui a su se servir de sa propre
angoisse devant son désir et a pu s’apercevoir ainsi qu’Anna O. le
visait. C’est par le fantasme que nous sommes entrés dans le mécanisme
de l’analyse, avec un usage rationnel du transfert (ce chemin de la
traversée du fantasme fondamental dans la cure).
Lacan fait un
pas de plus. Ce qui fonctionne chez le névrosé c’est de déplacer a de
l’objet, en transportant sa fonction dans l’A. La réalité dans le
fantasme, derrière cet objet postiche, c’est la demande. Le vrai objet
cherché, c’est une demande, sous cette forme : il veut qu’on lui
demande et ne veut pas payer le prix. Nous apercevons ici le fantasme
de l’oblativité, ce don de soi sans réciprocité. Le névrosé ne veut
rien donner mais cela a à voir avec sa difficulté à recevoir. S’il
voulait bien donner quelque chose peut-être que ça marcherait. Ce qu’il
lui faudrait apprendre à donner (ou à perdre), c’est son angoisse. Nous
revenons à notre point de départ, la butée sur l’angoisse de castration.
Le
névrosé en donne son équivalent qui est son symptôme. C’est pour cela
qu’une analyse commence par une mise en forme des symptômes. Le
psychanalyste entre dans le jeu de la demande en ne demandant rien, le
névrosé peut alors entrer en analyse. Il commence à moduler ses
demandes qui viennent à la place du heim (chez soi). C’est dans la
mesure où vous laissez la demande sans réponse qu’entre en jeu la
dimension de l’agressivité qui permet de remettre en question la
relation à l’image spéculaire. Le sujet épuisant ses rages contre cette
image, va produire une succession de demandes qui arriveront à une
demande plus originelle, où se module la régression (la régression
n’est pas ce qu’on croit). Il ne s’agit pas de remonter la voie en sens
contraire, ni d’une reconstruction génétique. C’est dans la mesure où
sont épuisées toutes les formes de la demande, jusqu’à la demande zéro,
que nous voyons apparaître la relation à la castration. La castration
s’inscrit comme rapport à la limite du cycle régressif de la demande et
apparaît quand ce registre est épuisé. Lacan ajoute que c’est cela que
nous avons à comprendre topologiquement. (Je vous invite aux prochains
ateliers proposés par l’EPCO.
Revenant à « Inhibition, symptôme,
angoisse », Lacan relève que Freud à l’air de nous dire que l’angoisse
est la réaction/signal à la perte d’un objet en en énumérant les
différentes formes. Lacan attire notre attention sur ce qu’il vient
d’avancer, à savoir, que l’angoisse n’est pas le signal d’un manque
mais de quelque chose à concevoir comme le redoublement d’un défaut de
cet appui du manque. Ce n’est pas la nostalgie du sein maternel qui
engendre l’angoisse, mais c’est son imminence.
Cadence et Conclusion
Lacan
interroge la forme privilégiée et énigmatique de l’interprétation en
tant que manifestation du désir de l’analyste. Il nous rappelle que
dans « l’identification », il s’agit d’identifier l’objet du désir
parce que sa présence et sa fonction sont décisives quant à ce qui
concerne l’angoisse.
Quel est le rapport de l’angoisse à
l’objet du désir ? Ce n’est pas la perte de l’objet du désir dont il
s’agit, mais d’un rapport de tentation, à savoir que l’angoisse
présentifie ceci, que les objets ne manquent pas. Ce rapport va évoluer
jusqu’au passage au surmoi qui se présente sous la forme de l’échec,
nous indiquant bien que ce que nous craignions, c’est la réussite, qui
a le caractère de ce qui ne manque pas.
Que se passe-t-il dans
l’angoisse de castration pour le petit Hans ? et de cette prétendue
perte du pénis ? Son angoisse au début de sa phobie ne serait pas due à
l’interdiction de la mère de se masturber mais au fait que cette
interdiction soit perçue comme la présence du désir de la mère à son
endroit induisant une sorte de retournement : elle ne voudrait pas que
ce soit la jouissance de l’enfant mais la sienne.
Je reviens à
une autre conclusion, celle de l’intervention de Christian Fierens lors
des journées sur l’identification, ayant pour titre : « le sujet barré
coupure de l’objet a ». L’objet a prend sa valeur de dégonfler
l’Imaginaire en barrant le sujet et en barrant le gd Autre dans le
processus signifiant. L’objet peut alors se présenter sous sa quatrième
face : l’objet vocal, le rien radical d’où jaillit l’invention de
l’inconscient : nous avons à nous débarrasser de l’Imaginaire et de l’A
pour inventer. Ce que fait l’analyse : elle laisse faire l’inconscient
qui invente juste selon le principe de Jouissance.
Avec le jeu
de présence/absence, jeu du « Fort Da », que l’enfant renouvelle par la
répétition, il découvre la possibilité d’absence en ressentant la
sécurité d’une présence. Lacan l’indique de cette façon : l’enfant
s’institue du manque en devenant désirant. Je rappelle que dans ce jeu,
l’enfant utilise l’objet vocal. Si ce rapport est perturbé, il n’y a
plus de possibilité de manque et le manque vient à manquer quand la
mère est toujours sur son dos. C’est ce qui provoque l’angoisse.
Pour
conclure, Lacan, après nous avoir parlé de l’accès préliminaire à
l’angoisse, se propose de l’approfondir dans la leçon suivante, avec
les 3 thèmes qui ont circulé dans son discours : la jouissance de
l’Autre, la demande de l’Autre, et le désir manifesté dans
l’interprétation, le désir de l’analyste.
• notes sur « l’inquiétante étrangeté » de Freud
Ce qui est Heimlisch devient Unheimlisch (ce qui serait dans l’ombre,
dans l’inconscient). Cela marche ensemble.
Le motif du double : une apparence semblable à une autre, tenue pour
identique.
Avec
le dépassement du narcissisme primaire, le signe dont est affecté le
double se modifie : l’assurance de survie devient l’inquiétant.
C’est la répétition non intentionnelle qui imprime le sceau de
l’étrangement inquiétant.
Dans
l’inconscient, nous discernons la domination d’une compulsion de
répétition où la nature des pulsions est un au-delà du principe de
plaisir (Réf. à son article).
Le Unheimlisch n’est rien de
nouveau, d’étranger, mais quelque chose qui est pour la vie psychique
familier de tout temps et qui n’est devenu étranger que par le
processus du refoulement. L’inquiétant est aussi le « chez soi »,
l’antiquement familier d’autrefois. Le préfixe « Un » qui commence le
mot est la marque du refoulement.
Quelle est la condition
requise pour qu’il y ait ce retour de l’inquiétant ? Freud différencie
l’épreuve de réalité matérielle de l’épreuve de réalité psychique. La
première permet d’éliminer nos convictions, nos croyances animistes et
ne donne pas prise à l’inquiétante étrangeté, alors que dans la
deuxième, il s’agit d’un refoulement effectif d’un contenu de
représentation et du retour du refoulé et non pas de la croyance à la
réalité de ce contenu.
Questionnement MC
Prise en compte de l’objet R et de l’objet virtuel pour la réalité
psychique.
Objet a dans la relation Imaginaire avec i (a) et i’ (a).
L’objet
de l’angoisse peut-il se formaliser comme l’objet du désir dans le
séminaire l’identification ou reste-t-il à l’état de phénomène ? Dans
cette leçon, il s’intéresse à la porte d’entrée de l’angoisse par son
phénomène.
La formalisation de l’objet du désir se fait à partir du
graphe et à la figure topologique du cross-cap. Dans cette leçon, il
revient sur le graphe, ce qui reviendrait à dire qu’il nous faudrait
reprendre le même chemin pour élaborer l’objet a en tant qu’objet de
l’angoisse.
Leçon 5 Rima traboulsi
I - Avant-propos concernant l’approche Lacanienne
Lacan démarre la leçon en évoquant la multitude des approches
psychanalytiques qui sont plus ou moins concrètes, expérimentales,
scientifiques, la sienne
étant fréquemment
placée du côté de la philosophie. Ceci s’expliquerait par le fait que,
sur le plan théorique,
elle met en cause le désir de connaître et que son discours se place
dans cet en-deçà, dans ce qui précède, le moment de la connaissance.
Toutefois, il
rappelle que Freud est parti d’une expérience directe, celle des
névrosés.
« Si le désir occupe une place importante dans notre position
thérapeutique, la guérison, elle, vient en quelque sorte par surcroit
». Cette remarque de Lacan a
pu indigner ceux qui se placent exclusivement du côté des bons
sentiments car elle a été
entendue comme dédaigneuse envers celui qui souffre. Or en disant cela,
Lacan se
plaçait d’un point de vue méthodologique. « Bien sûr, il faut améliorer
la position du sujet mais
il faut se méfier du concept de guérison qui reste vacillant ».
(Importance de la question de la souffrance actuellement. Mais qui et
qu’est-ce qui définit la guérison ?)
Si dans notre expérience, toutes les questions et les explorations
sérieuses peuvent se poser, le fil à tenir est celui de la vérité.
II - La dimension de l’Autre
Retour au propos du séminaire et reprise du schéma (du –φ) de la leçon
précédente (Fig. V-1) : la place du –φ constitue un vide, lieu où
apparaît l’angoisse. «
Tout ce qui pourrait apparaître à cette place nous déroute quant à la
fonction structurante
de ce vide ».
Le phénomène de l’angoisse est resté jusque-là limité et insuffisant,
bien qu’interrogé de manières diverses et notamment par son abord
objectif et expérimental.
« Les réponses apportées peuvent nous perdre » c’est pourquoi Lacan
rappelle les 3
points de repères
(qu’il a déjà énoncé dans la leçon précédente) qui prennent en compte
la dimension de
l’Autre et qui sont :
- la demande de l’Autre
- la jouissance de l’Autre
- le désir de l’Autre.
Remarque : le désir de l’analyste, dans la cure, s’interroge et
intervient comme terme, l’angoisse étant souvent provoquée par nous
(analystes) . Cette
dimension de l’Autre nous avons à y trouver une place efficace afin que
notre désir ne la
rétrécisse pas.2
A la différence de la pensée analytique, dans les névroses réalisées
expérimentalement chez les animaux dont le but est d’objectiver les
réactions de stress,
(ex du chien chez Pavlov) quelque chose est toujours éludé, à savoir
cette dimension de
l’Autre dans la présence même de l’expérimentateur en tant que
personnage humain
intervenant dans l’expérience. (posant le problème des réactions
différentes selon que
ce soit ou pas le maître du chien qui intervient ).
III – Constitution du sujet et du premier objet, repérage du lieu et
des conditions de l’angoisse
La notion d’un Sujet Supposé Savoir constitutif d’un sujet connaissant
est une illusion. « Le sujet supposé transparent, dans son propre acte
de connaissance,
ne commence qu’à partir de l’entrée en jeu d’un objet cerné dans le
stade du
miroir, à savoir l’image du corps propre. Le sujet jubile car a le
sentiment d’être
devant un objet qui le rend, lui, sujet transparent à lui-même. » (p
63)
(L’image réelle i(a) se comporte comme un objet que le sujet saisit
dans le miroir en i’(a). Le sujet a l’impression de se saisir dans sa
totalité.)
Lacan précise que le surgissement de quelque chose, comme inconnu
éprouvé dans le champ de l’objet pose le problème d’une structuration
irréductible. Ce
n’est pas là une question analytique car il faut bien expliquer
pourquoi certains
enfants ont peur du noir et d’autres pas. C’est ici que la psychologie
se déploie et s’engage
dans la construction et l ’invention de théories s’inscrivant dans
l’héritage d’une pensée
philosophique logique et rationnelle.
Pour Lacan notre abord est tout aussi raisonnable et contrôlable, si
nous arrivons à en rendre compte de manière moins hypothétique. (C’est
ce qu’il se propose
de faire.)
Dans la constitution d’un objet, le point de départ, le premier mode
dabord est la reconnaissance de notre forme. Or cette connaissance est
en elle-même
limitée car elle laisse échapper quelque chose de l’investissement
primitif du fait
même d’exister comme corps. Et c’est ce reste, non imaginé du corps
(pas d’image
spéculaire de ce reste) qui vient se manifester à cette place du
manque. Comme il n’est
pas spécularisable
l’angoisse se manifeste par défaut de certains repères. (p 64)
Lacan va évoquer Kurt Goldstein (neurologue allemand 1878–1965), un des
pionniers de la Gestalt-théorie et qui a étudié la réaction d’angoisse
chez des malades
souffrant d’atteintes neurologiques qu’on soumet à une demande à
laquelle ils arrivent ou pas
à répondre.) Il souligne ce qui, dans les conclusions de K.G. sur
l’angoisse, est
proche de ce que lui-même avance. A savoir, d’abord le fait que pour
K.G. l’organisme, dans tous ses
effets relationnels, fonctionne comme une totalité.
Puis, la nécessité de deux conditions pour que la réaction d’angoisse
se produise:
1°) que le manque soit limité (par effet déficitaire) et que le sujet
le cerne donc comme manque sous une forme (+). (Si le manque n’est pas
limité détresse
totale du malade mais pas d’angoisse.)
2°) que le manque se produise sous l’effet d’une demande
Lacan associe avec la question du cauchemar qui intéresse peu les
psychanalystes. Néanmoins, il se réfère à un ouvrage de Jones pour
rappeler que la
dimension principale du cauchemar est que son angoisse est éprouvée
comme celle de la
jouissance de l’Autre dont le corrélatif serait l’incube et le succube
(incube :démon qui
prend l’apparence d’un mâle et abuse une femme et succube : démon
femelle abusant un homme). Il fait remarquer qu’à côté de la jouissance
de l’Autre ce qui pèse
dans le cauchemar c’est sa présence comme « questionneur » soulignant
ainsi l’importance de la
dimension de l’énigme dont le sphinx est une figure. (Manifestation du
Que Vuo qui
introduit la
demande de l’Autre?) La question est à rapprocher de la dimension de la
demande (p 66). Ceci
nous ramène à l’expérience pré subjective (d’avant le sujet) du terme «
question »
dont la forme la plus formée est celle d’un signifiant opaque, en
d’autres termes d’une
énigme. (un X)
IV – Signifiant et traces
A ce stade, Lacan fait un certain nombre de rappels :
- Le signifiant est une trace effacée
- Le signe représente quelque chose pour quelqu’un
- Le signifiant est ce qui représente un sujet pour un autre signifiant
Il pointe que, si ce dont il s’agit de mettre à l’épreuve c’est notre
rapport à l’objet perdu, cet objet n’est quand même pas perdu pour tout
le monde. Alors, où est-ce qu’on le retrouve ? De fait, ce n’est pas
parce qu’on
a oublié quelque chose qu’il ne continue pas à être là, il est dans un
lieu où ne savons
plus le reconnaître. Pour le retrouver il faut revenir sur le sujet de
la trace.
Pour illustrer cela, Lacan va s’appuyer sur la clinique de l’hystérique
et de l’obsessionnel.
1°) dans les phénomènes hystériques, il y a souvent des symptômes de
scotome, de paralysie mais peu d’angoisse car les manques sont
méconnues.
2°) dans le comportement obsessionnel, il y a un traitement très
particulier du signifiant. Il est mis en doute, critiqué, effacé,
trituré car l’obsessionnel
cherche à retrouver le signe sous le signifiant. Lui sait que le
signifiant n’est pas sûr, que
l’histoire n’est qu’un truc, car ce n’est que du signifiant. Lui, veut
aller à l’origine.
Cette question de la trace est présente et complexe chez l’animal aussi
: traces pour marquer un territoire, des limites ; traces effacées pour
cacher ses
déjections ou réserves et même fausses traces pour leurrer. Mais est-ce
du signifiant ? Non,
car « seul le signifiant fait des traces faussement fausses » !(p 67).
En d’autres
termes quand une trace est faite pour qu’on la prenne pour une fausse
trace, elle signe
un vrai
passage. Là, dit Lacan, il y a un sujet parlant, « il y a un sujet
comme cause
qui s’adresse à la forme la plus radicale de la rationalité de
l’Autre…afin de prendre
rang dans une chaîne de signifiants au lieu de l’Autre ». Ces
signifiants ont ou n’ont pas
la même origine mais sont la seule référence possible à la trace
devenue signifiante. Il précise que dès l’origine, ce qui nourrit
l’émergence du signifiant
c’est une visée de
tromper l’Autre. Il ne doit pas savoir. (On peut noter, ici, une
dimension d’adresse.)
On peut dire que le signifiant révèle le sujet mais en effaçant sa
trace.
V – Articulation objet, sujet et l’Autre
A ce point de son propos, Lacan va prendre exemple sur la chasse pour
affirmer qu’il y a d’abord un objet de la chasse et un Autre et que,
dans l’ intervalle
des 2, le sujet S apparaît avec la naissance du signifiant mais comme S
barré, comme
non-su. « Tout le repérage ultérieur du sujet repose sur la nécessité
d’une reconquête
sur ce non-su originel. »
(Remarque : Nature de cet objet recherché, chassé ? est-ce un objet qui
nous manque ? objet
de demande ? ou de désir ? Chasseur car a faim ? Chasseur mu par une
pulsion ? Hypothèse :
probablement ici objet de la pulsion car en deçà. Autre = lieu, trésor
des signifiants .
S barré comme sujet de l’Icst représenté par un signifiant ?).
Illustration par la Fig. V-2 (figure peu parlante. Parenthèses avec
analogie aux 2 miroirs ?)
(Peut-on dire autrement : qu’il faut qu’il y ait eu un objet isolable,
détachable, dans la structure pour qu’il y ait d’une part émergence du
signifiant et
d’autre part Conscience ?)
Lacan rappelle que si la philosophie a confondu la Conscience avec le
savoir absolu, Freud lui, a laissé la question ouverte quant à la
provenance du champ de la
Consciene. C’est avec le stade du miroir qu’un début de solution nous
est donné et
le séminaire de
cette année devrait permettre la saisie de l’origine réelle de ce
système de Csce ainsi que la saisie de ce que serait l’objet originel.
Il revient sur la position de la névrose dans cette dialectique, pour
préciser que la part foncière du faux dans la demande du névrosé a été
souvent méconnue par
les psychanalystes. (Ex : patient avec demande de changement alors que
ce
qu’il vise c’est de ne rien changer à sa jouissance)
En effet toute demande est leurrante car elle préserve la place du
désir ( et donc du manque). Par conséquence, si on donne une réponse
comblante à cette
fausse demande, l’angoisse se manifeste.
Illustration par la demande de l’enfant à sa mère qui n’est pas à
prendre au pied de la lettre car, comme la demande est structurée par
le signifiant, ce que
l’enfant demande à sa mère, dans sa demande, c’est quelque chose qui
est destiné à
structurer cette
relation de présence-absence. Le jeu original du fort-da structure
cette relation et est un 1er exercice de maîtrise. 5
Un certain vide est donc à préserver, son comblement total fait surgir
une perturbation où se manifeste l’angoisse. Le contenu (+) ou (-) de
la demande n’a
rien à faire avec tout ça. La demande vient à la place de l’ « objet a
» escamoté.
Lacan va poursuivre son développement en rappelant la nécessité de
distinguer pulsion et instinct ainsi que l’utilité du recours à
l’algèbre celle-ci permettant
un certain maniement mécanique des opérations compliquées sans
obligation de comprendre.
Il revient sur sa propre écriture algébrique de la pulsion en tant que
« S barré ◊ D » qui se lit « S barré coupure de D », coupure de la
demande. Il rajoute que
dans la névrose c’est l’élan du chasseur qu’il s’agit de couper et que
chez le névrosé,
le fantasme « S barré ◊ a » se présente comme « S barré ◊ D ».
VI- pulsion, coupure et objet
A partir de là, il va articuler la pulsion, la zone érogène et la
coupure de l’objet.Il commencera par faire quelques remarques
concernant la pulsion orale :
- La zone de coupure ne correspond qu’à la bouche et plus
spécifiquement aux lèvres chez le petit enfant et à l’enclos des dents,
plus tard. Elle ne
correspond pas à toute la sécrétion gastrique.
- La psychanalyse a introduit dès le départ une cassure essentielle
dans son utilisation singulière du terme « instinct » à savoir, une
dialectique
se référant à l’Autre en miroir. Cette idée est présente chez Hegel
dans Phénoménologie de l’Esprit où y
est dit « le langage est travail » et y est évoqué quelque chose de
l’ordre de
l’Inside-out ; c’est-à-dire le passage, par le sujet de son intérieur à
l’extérieur, rappelant la
métaphore du gant
retourné fréquemment utilisée par Lacan.
L’apport de Lacan se situe dans l’introduction d’une perte à chaque
étape d’inversion, il existe donc un résidu, un reste non inversable ni
signifiable
correspondant à la forme partielle de l’objet corrélatif à la pulsion,
ici, orale.Le sein non entier mais coupé, c’est-à-dire mamelon
fonctionnant comme
tamis, peut être remplacé par autre chose à condition qu’il ait la même
fonction
(biberon, tétine). (Il est
en même temps coupé et coupure.)
« Si on se réfère aux données biologiques et au besoin, on s’aperçoit
que la toute primitive différence structurale y introduit de fait, des
ruptures, des coupures,
y introduit tout de suite la dialectique signifiante. » (p 71)
Même dans la nature, la dimension de signifiant peut se retrouver, «
dans le fait qu’un animal poursuivant son objet se trouve pris sur un
autre champ de
traces et cette poursuite, elle-même, n’a plus dès lors qu’une valeur
introductive ».
Le fantasme « S barré ◊ a » signe l’entrée du sujet dans la chaîne
indéfinie des significations qui s’appelle son destin. Ce qu’il
s’agirait de
retrouver c’est justement le départ, à savoir comment le sujet est
entré dans cette affaire de
signifiants.6
D’où l’intérêt de reconnaître comment les premiers objets repérés dans
la structure de la pulsion ont opéré :
- le sein coupé est objet de la demande adressée à l’Autre (la mère)
- le scybale (ou fécès) est objet de la demande de l’Autre (ici
inversion de la demande)
A noter, dans la pulsion anale, l’objet est aussi en lien avec une zone
érogène séparée elle-même du reste des intestins par une limite, le
sphincter anal. Ce
sphincter lui aussi coupe un objet le fécès qui peut représenter
d’autres objets ayant la
même fonction de relation d’objet. Ceci non dans un sens erroné de
modèle, dans un
processus de maturation mais dans sa fonction de « déchet », d’ « objet
a » perdu,
désignant ce qui est essentiel à savoir la place d’un vide où viendrait
se placer d’autres
objets. (Objets qui se prêtent à la coupure signifiante ??)
Pour préserver la place de ce vide et soutenir notre désir (d’auditeurs
et de lecteurs) Lacan se propose d’évoquer ultérieurement Pascal qui
s’est intéressé au vide
et au désir.
Pour finir, il rappelle que nous analystes savons que dans ce vide peut
se produire des nœuds et des pleins mais il nous invite à ne pas céder
à la tentation
de le combler.
Leçon 6 Isabelle Pagnon
Leçon 7 Isabelle Richard
Leçon 8 Jean-Jacques Lepitre
Il va poursuivre à propos des caractéristiques de l’objet a, à propos
duquel il a dit que l’angoisse n’était pas sans objet. Car celle-ci,
l’angoisse, est sa seule traduction subjective. Même s’il l’a amené par
la voie du fantasme dont la formule S <> a le comprend, fantasme
en tant que support du désir. (autre abord du désir et du manque déjà).
Comme premier point il expose que l’objet du désir semble ressortir de
l’intentionnalité, comme dit Husserl, non la perspective générale, mais
aussi la nôtre, qui est subjectiviste. Ce qui veut dire que cet objet
est dans la visée du sujet, comme telle il se tient là devant lui, en
avant de lui. Dans la temporalité, il est dans le futur de son
atteinte. Il digresse pour introduire la suite à propos de la notion de
causalité qui pose des difficultés épistémologiques mais dont on ne
peut cependant pas se passer. Ceci pour avancer que l’objet a n’est pas
dans l’intentionnalité d’une visée du désir, mais est cause du désir,
il n’est pas en avant, mais en arrière, dans la temporalité il précède,
il cause le désir. Il affirme que la non prise en compte de la
dimension de l’objet a produit l’insuffisance de la théorie de la
connaissance. Il faudrait de nombreuses pages pour affirmer où réfuter
pareille affirmation. Ensuite il trouve des preuves de son assertion
l’objet cause du désir, dans ce que dit Freud de la pulsion : la
distinction entre le but et l’objet, qui ne sont ni les mêmes ni à la
même place. On peut entendre ici déjà l’inversion et l’analogie entre
but et l’objet du désir. L’objet pouvant s’interchanger. Et leur place
l’objet à l’extérieur, le but, la satisfaction est à l’intérieur alors
comment arrivent-ils à coïncider. Il fait l’hypothèse qu’il y a un
extérieur avant toute intériorisation, extérieur situé en a sur son
schéma, avant que le sujet au lieu de l’Autre, miroir, se saisisse en x
dans la forme spéculaire. C’est à cet extérieur, qu’appartient la
notion de cause. Il y a un curieux niveau de aller-retour conceptuel
entre Freud et lui, entre objet extérieur mais du côté de l’interne,
i(a), et but interne, la satisfaction, qui paraît être en position de
cause, qui deviendra d’abord externe, ça rappelle l’inversion du Cross
cap à la leçon précédente. A trop démontrer on s’embrouille ? Bon la
cause est bien de l’ordre temporel d’une précession.
• Il va illustrer cette dimension de causalité à l’aide de 3 exemples,
le fétichisme tout d’abord. Ce n’est pas le soulier ou le sein qui est
désiré. Mais ils sont la cause, le soutien du désir. Il y aurait donc
lieu de distinguer entre l’objet du désir par exemple dans ce cas la
femme de l’objet cause du désir, le soulier. Et l’angoisse, le signal
d’angoisse, surviendraient lorsque ce soutien de la libido viendrait à
s’interrompre, à manquer. Nota bene : le soulier n’est pas l’objet a,
il vient le représenter mais c’est pour lui une présentation
didactique, il va poursuivre avec le sadisme et le masochisme. Il
rappelle que a est dans une précession essentielle. Mais aussi que
concernant le sujet qu’on situe à la source de la tendance,
c’est-à-dire là où se situe notre « je », celui de notre discours,
c’est là au niveau de l’inconscient que se situe a. À ce niveau, on est
a. Il va l’illustrer à propos du sadisme et du masochisme en s’opposant
à la conception qui fait de l’un la réversion de l’autre, en soulignant
les différences de leur structure subjective. Concernant le sadisme,
pour lequel il produit un schéma L, à 90°, avec le côté sujet, autre
que le sujet traditionnel, et le côté de l’Autre. Le désir sadique vise
à introduire chez l’autre cette division, cette béance qu’il y a de son
existence de sujet à ce qu’il subit dans son corps. Ce n’est pas tant
la souffrance qui est cherchée que son angoisse, son existence
essentielle comme sujet par rapport à cette angoisse. Qu’il note ici,
S0, ce qu’on peut entendre métaphoriquement comme division du sujet
ramenant celui-ci à rien. Il rappelle qu’il a écrit à ce propos Kant
avec Sade qui va paraître. Ce que ne sait pas le sadique de son acte
c’est ce qu’il cherche, à savoir, à se faire apparaître, non pas à lui
car ça lui reste obscur, bouché, mais à l’autre comme pur objet,
fétiche noir. C’est pourquoi sans doute ce qui reste de la figure de
Sade est une forme pétrifiée, Man Ray, comme le fétiche. Le masochiste
lui vise son incarnation comme objet commun, objet d’échange. C’est la
voie qu’il choisit pour tenter de se saisir en ce qu’il est comme nous
tous un objet a. Mais il ne parvient pas à son identification d’objet.
Comme pour le sadique cette identification n’est que sur une scène. Le
sadique, même sur la scène ne se voit pas, il ne voit que le reste. Le
masochiste ne voit pas non plus quelque chose, mais d’abord il faut
remarquer que se reconnaître comme objet de son désir c’est toujours
masochiste. Il développe alors l’obscur de sa formule : c’est pour
souligner la difficulté qu’il y a autour du masochisme, car il est
évident que l’explication consistant à dire que s’il y a du masochisme,
c’est que le surmoi est bien méchant, c’est un peu court, comme est un
peu courte la distinction hétéroclite entre masochisme moral, féminin
et érogène, car qu’est ce qui fait l’unité du masochisme ?
L’explication par le surmoi ne fait que renvoyer à la cause. Or ces
objets causes, il en a commencé la liste, on peut y ajouter l’œil, mais
ça épaissit le mystère, car si pour le mamelon, la scybale, ça peut
paraître simple, pour le phallus, ça l’est déjà beaucoup moins. Nota
bene : si on distingue l’objet du désir de l’objet cause, on perçoit
peut-être un peu en quoi ça consiste. C’est masochiste de situer son
objet cause comme objet du désir ? Il fait un détour : il rappelle
qu’il a dit que le désir et la loi c’est la même chose, ont leur objet
commun. Nota bene : ce qui n’est pas tout à fait la même chose, ils ne
sont pas égaux. Ce n’est pas qu’ils sont l’endroit et l’envers de la
même pièce. Nota bene : si, puisque c’est ce qu’il montre ensuite avec
l’Œdipe. C’est qu’à l’origine le désir du père, à souligner du père,
pas du sujet, et la loi sont la même chose ; et il poursuit le rapport
du désir et de la loi est si étroit que seule la fonction de la loi
trace le chemin du désir, que le désir pour la mère est identique à la
fonction de la loi, c’est en tant que la loi l’interdit qu’elle impose
de la désirer. C’est à partir de ce désir pour la mère que se pose que
la femme qu’on doit préférer soit autre que celle-ci. On y entend qu’un
commandement s’impose dans la structure même du désir. (Nb : tout ça
est loin d’être clair, s’y mélange les effets de l’interdit de
l’inceste, comme s’il était presque premier, c’est parce qu’il y a
interdit qu’il y a désir, et la relation œdipienne, le désir œdipien
pour la mère à partir du désir originaire, premier objet, das Ding, Et
que la loi précède le désir, toute la clinique semble dire le
contraire, aussi bien enfants des couples monoparentaux que les femmes
dans l’engluement, dans le ravage, avec leur mère, etc. ?! Qu’il y ait
rapport du désir et de la loi, sûrement, mais tel que ce n’est pas
clair, la preuve en est du glissement du désir du père au désir du
sujet.) Il conclut que c’est le désir du père qui fait la loi. Voilà.
Et ça c’est le patriarcat. La valeur du masochisme est de faire
apparaître clairement, sur sa petite scène, que le désir et la loi se
retrouvent ensemble, quelque chose où le désir de l’Autre fait la loi ;
(toujours cette difficulté entre désir du sujet et désir de L’Autre,
désir de l’Autre c’est patent dans « La Vénus à la fourrure », mais
comment passe-t-on du « se reconnaître comme l’objet de son désir,
c’est toujours masochiste » au « désir de l’Autre qui fait la loi » ?).
Un des effets du masochisme c’est que de mettre l’objet a au rang des
objets communs qui le met au rang du déchet, de l’ordure. C’est un des
modes d’abord de a dans la perversion, il en est d’autres. La fonction
de a est aussi en corrélation avec l’identité qui conjugue le désir du
père, il le répète, à la loi, ceci pour introduire le complexe de
castration, où la loi, dit-il, naît dans une mutation mystérieuse du
désir du père après qu’il ait été tué. (Nb : c’est en effet mystérieux,
il ne s’en explique pas, ça reste ici opaque). Liant cela à la
castration, cela donne la raison de ce qu’il écrit -Φ à la place où a
manque.
• Rappel : après l’objet comme cause du désir, après « se reconnaître
comme l’objet de son désir, c’est toujours masochiste » (nb : avec
toujours le mystère, de quoi s’agit-il puisque l’exemple de Masoch
qu’il a donné c’est être l’objet du désir de l’Autre, au moins que d’y
entendre ce tour supplémentaire que Masoch visant sa jouissance, se
prend pour objet de cette visée, et de son montage ? Il ne jouit pas
de, mais vise à se faire jouir par l’Autre ?), donc après tout cela
voilà l’objet dans ses manifestations comme manque. Cet objet a, de ce
qui subsiste comme corps, dimension corporelle, c’est le roc dont parle
Freud. Il l’égalise encore ici avec la réserve dernière de la libido,
(cf « Pour introduire le narcissisme »). Ce a peut-il être reconnu ?
Car le masochiste ne le fait que sur sa scène. (Là encore interrogation
: se faire l’objet, mamelon, sein, etc, pour soi-même, n’est-ce pas
cela même que Freud décrit comme retournement de la libido dans la
psychose ?). Il y a un manque nécessaire là où le sujet se constitue au
lieu de de l’Autre. Au-delà même de ce qui apparaît dans le retour du
refoulé, et c’est là, dit-il, que dans le séminaire sur le « transfert
», il a produit l’agalma. C’est cette place vide qui est visée dans le
transfert. Le lieu de l’angoisse, c’est le bord, la béance, il égalise
les deux, où la constitution de l’image spéculaire montre sa limite. Ce
phénomène de bord, s’ouvrant comme une fenêtre, marquant la limite
illusoire de ce monde de la reconnaissance, ce qu’il appelle la scène.
Ce bord, c’est aussi celui du miroir, et c’est aussi le poinçon, c’est
le lieu de l’angoisse, et ce qu’il y a à chercher est au milieu. Le
transfert n’est pas que la répétition de traumatismes, d’histoires
anciennes, mais aussi un amour présent dans le réel. C’est aussi en
fonction de cet amour que s’institue la question centrale du transfert,
celle que se pose le sujet concernant l’agalma, à savoir ce qui lui
manque. Car c’est avec ce manque qu’il aime, et il rappelle sa formule
: « aimer, c’est donner ce qu’on n’a pas ». Et ça rejoint la
castration, pour avoir le phallus, pouvoir s’en servir, il ne faut pas
l’être. L’être, c’est dangereux. (Nb : ici encore des glissements.
L’agalma, ce que le sujet n’a pas, mais qu’il désire, or n’est-ce pas
de l’attribuer à l’analyste, qu’il aime l’analyste ? Donc il ne donne
pas ce qu’il n’a pas, il désire ce qu’il n’a pas, il aime à partir de
son manque, et s’il donne à l’analyste ce qu’il n’a pas, l’agalma,
c’est qu’il lui en attribue la propriété à partir de son manque. C’est
s’illusionner ? ). Ce n’est pas donner au sens de donner un objet,
c’est attribuer.
• Il fait référence à l’analyse de Freud de la jeune homosexuelle. Elle
s’est orientée vers l’homosexualité à partir de la naissance d’un petit
frère. Freud note qu’elle a une attitude digne d’un chevalier servant
de l’amour courtois vis-à-vis de sa dame, en fait une demi-mondaine,
par son dévouement, son abnégation charnelle, sa surestimation de
celle-ci, son désir de la sauver. C’est une relation menée au grand
jour, sans vergogne. Or, un jour, étant en compagnie de cette femme,
elle croise son père qui lui lance un regard irrité. La femme,
demi-mondaine craignant sans doute pour sa réputation auprès de sa
clientèle, malgré sans doute le plaisir obscur qu’elle y trouvait, met
fin à leur relation. La jeune fille alors aussitôt se laisse tomber
d’un petit pont enjambant la ligne d’un petit train, du type de
l’ancienne ligne de ceinture parisienne. Elle y survit et vient en
consultation chez Freud. Ce « laisser tomber » n’est pas à rapprocher
de l’accouchement, même si ça traine partout, mais bien plutôt de
l’effet de la mise en rapport subite du sujet avec ce qu’il est comme
a. C’est pourquoi le sujet mélancolique se balance par la fenêtre en
tant que celle-ci rappelle cette limite entre la scène et le monde, et
où, par son acte, il rappelle cette exclusion où il se sent au moment
où se conjuguent le désir et la loi. D’accord pour la limite entre
scène et monde, mais l’exclusion ? Explication de cette exclusion :
quand le couple rencontre le père, le regard de celui-ci ne suffirait
pas à expliquer le passage à l’acte. La fille attachée au père a été
déçue de la naissance du frère, c’est le point tournant l’ayant engagée
dans l’homosexualité. En faisant de sa castration de femme l’équivalent
du sacrifice, par le chevalier servant, de ses prérogatives viriles
vis-à-vis de sa dame, c’est-à-dire en faisant de sa castration de femme
le support, dans un rapport d’inversion, à ce qui est lié à ce
sacrifice, cette castration, la mise en place du manque au champ de
l’Autre, à savoir sa garantie suprême, la loi est bien le désir du
père, qu’il y a une loi du père, un phallus absolu. Ouh lala, c’est
bien embrouillé. Castration féminine = sacrifice du chevalier fonction
(manque de l’Autre, son désir, = garantie, phallus absolu, ɸ). Nb : Que
la fille s’articule dans son désir au désir du père, y compris comme
absolu, c’est assez ordinaire, cf les petites filles en cure, mais
est-ce que ça explique la première partie de l’équation ? castration
féminine = sacrifice du chevalier ? Car c’est cette inversion qui est
première dans son explication ? D’ailleurs, il tente de préciser par la
suite faisant parler la jeune fille : « De ne pas être ta femme et ton
objet, je suis celui qui créée le rapport idéalisé à ce qui de moi-même
est insuffisance, une femme ».
• Tout ceci vient dans la simple rencontre avec le regard du père ; (nb
: on peut penser alors que tout ceci visait à provoquer le père ? De
quelle homosexualité s’agissait-il ? On pourrait aussi penser au défi
de l’hystérique, vis-à-vis du maître. « Tu ne m’as pas donné ce que je
désirais ». Ce x des petites filles en cure.) Ce regard produit
l’embarras qu’il a inscrit sur son tableau. S’y conjugue l’émotion,
toujours sur son tableau, de ne pouvoir faire face à la rupture de son
amie. Les deux conditions du passage à l’acte sont alors réunies :
embarras et émotion. A ce moment, dit Lacan, elle est réduite à une
identification absolue à a. (objet cause du désir ? mais donc cause du
désir de personne ? Objet, phallus, etc, inutiles ?). La confrontation
à ce désir du père, sur lequel elle s’est construite, à cet objet cause
du désir du père, (le x des petits filles), et cette loi du père, effet
de son regard où elle est délogée, rejetée hors de la scène, c’est le «
laisser tomber » qui le réalise. Il termine par l’impasse de Freud dans
ce cas dans la mesure où, selon lui, Freud néglige la place de a dans
le miroir de l’Autre. Il le pressent pourtant lorsque constatant que
malgré les avancées de l’analyse, cela semble glisser sur la jeune
fille comme l’eau sur les plumes d’un canard, il suppose qu’il bute sur
quelque chose d’équivalent à ce qui se passe dans l’hypnose. Ce qui se
passe dans l’hypnose, dit Lacan, c’est que le sujet est capable de lire
dans le miroir de l’Autre tout ce qui a trait au spéculaire, ce qui
reste omis, c’est la cause de l’hypnose, le regard de l’hypnotiseur, le
bouchon de carafe. C’est à dire ce qui est en X, à la place du X sur
son schéma. (Nb : voir aussi les raisons de l’abandon de l’hypnose par
Freud. Le transfert sur l’hypnotiseur en place de l’idéal du moi,
inanalysable dans les conditions de l’hypnose). Ce serait la même chose
avec le doute de l’obsessionnel, capable des plus belles et des plus
savantes analyses, y compris de lui-même, mais avec quelque chose qui
ne colle pas, comme un manque d’authenticité dit-il. Ce qui fait que
cela peut durer fort longtemps. (C’est une façon particulière de dire
les choses, peut-on parler d’inauthenticité et de doute à la fois ? Car
si l’obsessionnel peut faire preuve de doute, il n’est pas
volontairement inauthentique, dans sa parole, il est même pointilleux à
cet égard assez souvent. D’où le doute certaines fois. Là où il n’est
pas authentique, et ce qui rend ses analyses inopérantes, c’est qu’il
garde à distance ce qui ferait sa parole pleine, habitée. Alors si
c’est ça que vise Lacan peut-on l’appeler doute ? Car aussi bien c’est
une défense, isolation disait Freud.) En tout cas, cela vient en cette
même place X précise-t-il. Pour conclure, dans le cas de la jeune
homosexuelle, c’est de la promotion du phallus, Φ, pas -Φ, à la place
de a qu’il s’agit. Et alors que Freud distingue bien les éléments
constituants, historiques de la détermination homosexuelle et du choix
d’objet, tout tourne bien autour du rapport du sujet à a, le paradoxe
est que Freud la laisse tomber : « je n’arriverai à rien » dit-il. Il
nous lègue la question de comment opérer avec le complexe de
castration, alors qu’en même temps la question de l’objet a est dans ce
cas si prévalente. (nb : cela a sans doute une relation, mais laquelle,
avec le rêve que Freud déclare menteur, et non pas transférentiel, et à
la limite le mensonge dans une cure n’est-il pas transférentiel, qu’il
soit conscient ou inconscient ? devant quoi Freud a ici reculé ?).
Lacan en son absence a demandé à Granoff, Piera Aulagnier, Perrier de
présenter des textes qu’il leur a indiqué. Tous portant sur le
contre-transfert. Granoff est maître de cérémonie et présente
l’ensemble des textes comme balayant un horizon à 180°. Depuis Barara
Low qu’il présente comme partisane d’une conception quasi-artistique de
la position de l’analyste qui ne doit pas être trop timoré dans ses
interventions, et qui évoque la scène dans la scène d’Hamlet où
celui-ci indique aux comédiens comment ils doivent jouer. Jusqu’à
Szasz, que présente Perrier, qui s’efforce de décrire la pratique
analytique selon un désir de rigueur scientifique où le cadre
analytique définirait un champ comme celui de l’expérience scientifique
et où le cadre détermine le résultat d’en produire les conditions.
Perrier relève ce que cela a d’obsessionnel.
Granoff et Perrier se sont attachés au développement des articles. Or
chacun de ceux-ci commence par des interrogations qui en justifient le
développement. Des interrogations importantes et qu’on perçoit sincères
de la part de ces auteurs de les y sentir vraiment impliqués. Il est
peut-être dommage que Granoff et Perrier passent un peu rapidement sur
ces préambules où les auteurs s’interrogent sur la position et le vécu
de l’analyste. Leurs articles étant leur tentative d’illustration et de
réponse à ces questions qu’ils se et nous posent. On peut résumer et
critiquer comme le font Granoff et Perrier, dans une mesure moindre
Piera Aulagnier, le contenu des articles, cela n’enlève rien à la
pertinence et à la franchise des questions posées dans leurs
introductions. Et je ne suis pas sûr qu’à ce niveau le balayage à 180°
décrit par Granoff soit pertinent.
Barbara Low :
La première, s’interroge : quelles sont les compensations
psychologiques de l’analyste au regard des privations inévitables que
sa pratique lui impose ? Même si tout analyste se doit d’avoir fait une
analyse aussi complète que possible, quasiment tous les articles le
soulignent, il est impossible, objecte-t-elle, qu’une personne soit
totalement analysée : le ça reste pour une part inanalysable et
l’inconscient ne peut, quant à lui, supporter qu’un certain degré de
privation. Alors comment se débrouille l’analyste des privations
imposées par sa pratique ? Ces privations, elle en distingue trois
types : celles résultant de l’inhibition du plaisir narcissique
(rivalité, supériorité, haine, position paranoïaque, demande de
reconnaissance, etc..), celles résultant de l’inhibition du dogmatisme
intellectuel (assurance dans sa théorie) et celles résultant de
l’inhibition des assurances surmoïques (conception du monde,
supériorité morale). En résumé, l’analyste est obligé d’entendre et
d’interpréter le matériel du patient sans y réagir émotionnellement,
mais, paradoxe, c’est pourtant par l’intermédiaire de son activité
émotionnelle qu’il est à même de traduire et d’interpréter ce même
matériel ? Et celle-ci n’est donc pas à l’abris de ces privations.
Alors comment s’en sortir, comment aller au-delà, et trouver de bonnes
compensations ? Voilà le questionnement de Barbara Low. La solution
qu’elle y propose, que Granoff qualifie d’artistique, et elle-même va
dans ce sens, se formule ainsi : « Ce serait comme accueillir
l’inconscient du patient à partir du sien (nb : moi : ce qui est la
situation commune), mais non sur un mode défensif, en réaction aux
privations par exemple, mais sur un mode d’assimilation et de création,
de recréation » Elle donne en exemple Freud et ses patients qui les
entendait et les associait à l’élaboration de sa théorie, la
construisant dans la réflexion qu’il leur consacrait. (nb : la prise de
notes et l’élaboration des séances en sont des tenants lieu, et il y a
là un début d’explication des raisons pour lesquelles les analystes
écrivent tellement).
Margaret Little :
Dans son premier article elle s’interroge sur les différentes
acceptions du terme « contre-transfert » dans l’ensemble de la
communauté analytique. Il signifie aussi bien :
- L’attitude inconsciente de l’analyste vis-à-vis de son patient.
- Les éléments refoulés et non analysés de l’analyste qu’il transfère
sur son patient (en réciproque et équivalent parfait du transfert du
patient) : affects de l’enfance, images parentales, et autres..
- Une attitude ou un mécanisme psychique, au sens de la répétition,
avec lesquels l’analyste répond au transfert de son patient.
- La totalité des attitudes de l’analyste.
De ces différentes significations du terme « contre-transfert » peuvent
s’en déduire des effets et conséquences :
- Tout d’abord que le contre-transfert comme inconscient ne peut
s’observer directement, par définition, mais qu’il est observable par
ses effets. Comme certaines forces physiques par exemple.
- Ensuite, une partie de la difficulté liée au contre-transfert est que
c’est l’ensemble de la psyché de l’analyste qui y est impliquée, à
savoir ça, moi, surmoi, et qu’il est difficile de départager les effets
de chaque instance.
- Par ailleurs, comme toute analyse suppose un analysant et un
analyste, même l’auto-analyse, il en va de même pour le transfert et le
contre-transfert. L’un ne pouvant être pensé sans l’autre.
- Enfin il y a l’attitude de l’analyste lui-même vis-à-vis de son
contre-transfert. C’est-à-dire son attitude vis-à-vis de ses sentiments
et de ses idées en quoi consistent son contre-transfert. Attitude qui
peut être paranoïaque, phobique ou dépressive, selon les défenses en
jeu probablement.
Lucia Tower :
Elle, elle s’interroge sur la doxa habituelle, l’opinion courante dans
la communauté analytique concernant le contre-transfert, et en fait
l’énumération :
- Notre contre-transfert doit être sain.
- Il convient de faire les réponses appropriées.
- Il faut que l’analyste fasse régulièrement un toilettage analytique.
- Le contre-transfert est indésirable.
- Il faut reconnaître la faute contre-transférentielle afin que le
patient puisse exprimer sa colère et l’analyste ses regrets.
- Il ne faut pas se laisser se faufiler les moindres manifestations
contre-transférentielles.
Cependant, si malgré tout, ce contre-transfert existe, ses principales
manifestations, telles qu’elles sont généralement décrites, sont de la
part de l’analyste :
- De l’angoisse au cours du processus thérapeutique.
- Des sentiments gênants vis-à-vis du patient, érotiques ou agressifs
par exemple.
- Des comportements et des sentiments stéréotypés vis-à-vis du patient.
- De l’affection ou de l’hostilité envers celui-ci.
- Les répercussions sur l’analyste après que la séance soit terminée.
- Des rêves ou des acting-out de l’analyste.
Or dit-elle dans toute cure ou suivi psychanalytique il existe des
phénomènes contre-transférentiels, alors plutôt que de se défendre
contre ceux-ci il s’agirait de savoir qu’en faire.
Thomas Szasz :
Sa question préalable, la raison de son article est le constat suivant
: pour tout domaine scientifique, les spécialistes de ce domaine
partagent leurs expériences, ce qui est indispensable à l’avancée de
leur discipline, communiquant entre eux, en utilisant les termes, les
concepts qui leur sont communs et propres à leur domaine.
Communications indispensables pour partager leurs expériences et en
approfondir les caractéristiques. Il devrait pouvoir en être de même
concernant la psychanalyse. Mais il a fait le constat que si celle-ci
comporte bien des concepts communs, employés par tous, ou la plupart
des analystes, il s’avère que la plupart du temps ces concepts sont
employés dans une signification particulière, voire personnelle propre
à chaque analyste. Chacun donnant son sens particulier au concept. [On
ne peut pas dire que nous, lacaniens, et Lacan lui-même, soyons à
l’abris de ce reproche.] Avec ce que cela a de dommageable pour notre
discipline. [Comment en effet partager une expérience et en tirer des
enseignements si un même concept ne désigne pas la même chose pour
chacun, ex de « l’écriture »]. C’est pourquoi il se propose de repenser
la pratique analytique, qui est le champ opératoire à partir duquel
s’élabore la théorie psychanalytique. Et cela selon l’abord qui
délimite un champ scientifique. Celui-ci, selon lui, se définit d’un
certain nombre de règles : concernant les limites, le contenu, le
fonctionnement et le but. Il prend l’exemple métaphorique du jeu
d’échecs, qui se joue aussi à deux. Des limites et un contenu :
l’échiquier, les pièces, des règles permettant une infinité de
mouvements, un but : échec et mat. On peut abaisser le niveau des
règles, c’est le jeu de dames. Parallèlement pour la psychanalyse,
c’est la psychothérapie. Mais si les limites du champ sont floues, si
les règles, les concepts ne sont pas spécifiques, alors surgissent des
difficultés. Ainsi en psychanalyse la proximité et l’emploi de termes
du champ médical peuvent prêter à confusion et rendre la communication
difficile. Il en est ainsi du terme de patient ou de traitement. Le
premier renvoyant à une position passive, de subir une maladie, un
traitement, une thérapeutique quelconque sans qu’il y ait un engagement
subjectif, il emploie quant à lui le terme « d’analysant ». Le second,
traitement, ou thérapeutique, renvoie à la dimension médicale d’un
retour à un état antérieur, supposé sain. Or le but de l’analyse est
dans un « advenir » qui n’a pas encore été.
Leçon 12 Jean-Jacques Lepitre
Lacan est de retour. Mais la première partie de la leçon est consacrée
à l’exposé de Piera Aulagnier, dans la suite des exposés sur le
contre-transfert, au texte de Margaret Little : « La réponse totale de
l’analyste aux besoins du patient ». Il s’agit en fait, selon Little, «
d’une personne ayant quelque chose à donner rencontrant une personne
ayant des besoins ». Même si on reste dans le cadre de l’analyse, on
entend les glissements possibles que va relever Piera Aulagnier. (nb :
cela évoque aussi tout à fait la compassion, voire la charité, la pièce
au SDF).
Reprise par Lacan. Il trouve ces exposés utiles car ils visent le désir
de l’analyste (nb : c’est le nom qu’il a trouvé pour ne pas dire
contre-transfert). Il repart de « le désir, c’est la loi ». Ambiguïté :
ce n’est pas que le désir fasse loi ou que la loi fasse le désir, c’est
que le désir soit limité et lié par l’Œdipe à la loi. Mais comme chez
tous, il échoue, ce désir, car il ne sait pas au service de quel
jouissance il est(?). Le névrosé ne peut désirer que selon la loi,
(mais pas sans une certaine opposition certaines fois, cf
l’obsessionnel) et ce ne peut qu’être qu’un désir insatisfait,
impossible. Cela, c’est l’hystérique ou l’obsessionnel, mais,
s’objecte-t-il, qu’en serait-il concernant la névrose d’angoisse ?
Contrairement au mythe de la loi morale comme visant l’autonomie du
sujet (ah bon ? au travers la responsabilité ?) il pose que celle-ci
est hétéronome au sujet, qu’elle surgit du réel comme ce qui élide le
sujet en produisant le refoulement, c’est-à-dire ce qui efface les
traces, ou plutôt, celles-ci ne s’effaçant pas selon lui, ce qui efface
le retour du signifiant à l’état de traces et du coup abolissant le
sujet ( nb : sans doute une part) qui est déterminé par le signifiant.
Le masochiste indique t-il au passage croit qu’il cherche la jouissance
de l’Autre mais en fait c’est son angoisse à cet Autre. L’angoisse,
selon Freud, comme signal dans le moi. C’est dans la dimension interne
que ne va pas l’élaboration de Freud, car ce signal dans le moi est un
signal pour le sujet face au désir de l’Autre (sous-entendu l’apologue
de la mante). Il y a un désir, pas du sujet, de l’Autre, qui vise
l’être même du sujet et sa perte. Il met en cause, ce désir de
l’Autre(?), la racine même de mon désir. Et là il avance : le désir de
l’analyste suscite en moi cette dimension de l’attente, (donc similaire
à la description de l’angoisse, l’angoisse en analyse). Si cela était
comme chez Hegel, que l’Autre ne me reconnaisse que comme objet, alors
il y aurait lutte, possibilité de lutte : qui est l’objet ? mais c’est
plus complexe car il s’agit d’amour. Dans l’article de Lucia Tower, le
cas rapporté, là où ça marche, c’est sur le plan de l’amour. Pour finir
il s’interroge sur le fait que ce sont surtout des femmes qui ont parlé
du contre-transfert. Il s’interroge sur la fonction du désir dans
l’amour. Et s’il y est un enjeu essentiel, le désir ne concerne pas
l’objet aimé, et ce n’est pas une question d’Œdipe mal foutu : il
renvoie au séminaire sur le « Transfert ».
Leçon 13 Rima Traboulsi
Lacan poursuit son cheminement sur ce qu'est l'angoisse faisant remarquer que pour la plupart des auteurs, comme pour lui-même, elle n'est pas sans objet. Pour Freud, l'angoisse est angoisse devant quelque chose (objet devant) Pour Lacan l'angoisse est en rapport avec l'objet cause du désir (qui est en arrière du désir) mais il y a là une contradiction car l'angoisse est devant quelque chose et angoisse liée à la cause. Dans la littérature, au départ, il y avait une accentuation de l'opposition entre peur et angoisse par la différenciation de leur position / à l'objet. L'erreur commise était l'accentuation du fait que dans la peur il y aurait un danger objectif, une entrée du sujet dans une situation de danger. Mais qu'est-ce qu'un danger ? On peut dire que la peur dans sa nature correspond à l'objet d'où part le danger. Dans l'article de Goldstein concernant l'angoisse, Lacan note un glissement entre angoisse et peur avec l'idée d'une peur orientée par le repérage de l'objet dans l'environnement du sujet. Lacan va évoquer les 3 cas de « frayeurs » de Tchekhov qui, selon lui, ne sont pas de l'angoisse : 1 0) repérage d'une flamme dont toute cause connue est exclue. 2 0) apparition d'un wagon fantôme dont rien ne peut expliquer le mouvement. 3 0) chien de race associé à une forme du diable Ces trois frayeurs sont du registre de la peur de l'inconnu qui se différencie de l'angoisse par le fait qu'il n'y a ni menace ni intéressement de ce qu'il y a de plus intime pour le sujet. L'idée que la peur est une réaction de fuite est mise en défaut par le constat que la peur peut être paralysante, désorganisatrice, entrainant un désarroi et des réponses inadaptées. Il faut nous dit Lacan chercher ailleurs la fonction de l'angoisse et repérer ce trait de signal qui ne trompe pas. « Seule la notion de Réel, dans la fonction opaque qui est celle dont vous savez que je pars pour lui opposer celle du Signifiant, nous permet de nous orienter » (p 190). En d'autres termes l'angoisse est signal d'un Réel qui se présente et de sa place. Lacan va l'inscrire par étapes, dans l'opération de la division. D'abord Lacan écrit le sujet du côté du S (le signifiant), sujet mythique qui a à se situer dans l'écart au grand A (trésor des signifiants déjà là).
Le sujet du côté des signifiants pose la question : dans l'Autre combien de fois S (le signifiant), ici on est dans le comptage incluant la notion de répétition des signifiants S. La réponse est « A » barré, c'est-à-dire entamé par le signifiant (qui est différent du grand A donné au départ). Mais la division du grand Autre par le S (du signifiant) ne donne pas un nombre entier. Il y a un reste « a » qui est l'irréductible du sujet dans cette opération de l'avènement du sujet (comme signifiant) au lieu de l'Autre.
Le rapport de « a » à S qui s'écrit a sur S (a divisé par S) boucle l'opération de la division. L'objet a c'est la part la plus réelle de ce à quoi « tient le sujet » (dans les deux sens du terme : celui de sa valeur pour le sujet et celui d'y être appendu). Ce reste en tant qu'il est la chute de l'opération subjective c'est l'objet perdu, c'est à lui qu'on a affaire dans l'angoisse et dans le désir. ssc. Puis Lacan ajoute au 1 er étage de la division un X qui à ce stade est quelque chose de non désignable dans le rapport à l'Autre (demande ?jouissance ? désir ?) car le sujet est encore mythique et place l'angoisse au 2 ème étage. Ici le sujet repère le comptage des signifiants dans l'Autre mais toujours avec un reste qui est constitutif de l'apparition de la fonction a. C'est la 1 ère opération de division. La 2 ème division donne le sujet barré comme reste et c'est là que Lacan place le désir. (Le sujet barré est le sujet du désir.) A noter, Lacan dit que l'irréductible de « a » est de l'ordre de l'image. (A rapprocher avec i(a) l'image réelle ?) Lacan poursuit son propos en se référant à Ulysse qui a joui de sa mère, possédé l'objet du désir et de la loi et qui fait un pas en plus car il voit ce qu'il a fait et qui est de l'ordre de l'indicible. Il a l'image par terre de ses yeux arrachés, il a perdu la vue mais n'est pas sans les voir comme objet-cause de son désir dei savoir. Mais une question se pose : est-ce que l'angoisse est cette possibilité de l'homme à se mutiler ? La réponse est non et Lacan va l'illustrer par les tableaux de Zurbaran (Saintes Lucie et Agathe avec yeux énucléés et seins arrachés) ces tableaux nous présentent ce qui pourraient être objets de notre désir mais en aucun cas ils ne provoquent de l'angoisse car nous n'y sommes pas personnellement concernés. Le vrai masochiste et le vrai sadique, eux, sont intéressés par ces images. Lacan va, à partir de là, reprendre pour les différencier, ces deux structures dans leur rapport à la jouissance et à l'angoisse. A noter : dans la jouissance perverse, il y a toujours un 3 ème terme présent (un autre ou Autre). Pour le masochiste : le fantasme masque sa position d'être objet d'une jouissance de l'Autre qui, en fait, est sa propre jouissance. Sa position d'objet masque le fait d'être séparé, la visée de la jouissance de l'Autre est une visée fantasmatique car ce qui est cherché, qui est en arrière, c'est l'angoisse chez l'Autre, à savoir la réponse à la chute essentielle du sujet. Au final l'angoisse de Dieu, est la visée aveugle du masochiste mais elle est masquée par le fantasme. Lacan associe avec la passion du Christ qui serait l'illustration de l'angoisse absolue puisque Jésus, de manière masochiste, s'est fait l'âme de Dieu ; en d'autres termes résidu de l'objet a chu. Lacan nous avertit du piège à considérer le sadisme comme l'envers, le contraire ou le retournement du masochisme. Pour le sadique : Il fait remarquer que l'angoisse est moins cachée que chez le masochiste. Elle vient en avant du fantasme, celui-ci exigeant l'angoisse de la victime. Ce que le sadique cherche dans l'Autre c'est le trait de sa propre angoisse, passage à l'extérieur de ce qui lui est intérieur. Dans sa démarche, il se réfère toujours à l'être suprême en méchanceté ; il s'épuise, jusqu'à manquer son but, à réaliser la jouissance de Dieu. In fine, pour les deux (masochiste et sadique) il y a là un jeu d'occultation et de 1 er plan de l'angoisse et de l'objet : chez le masochiste : lui comme objet est au 1 er plan pour occulter l'angoisse de l'Autre qui est sa vrai visée. chez le sadique : l'angoisse de l'Autre est au 1 er plan pour masquer sa propre angoisse, sa visée est la jouissance de Dieu. Dans les 2 structures se désigne le lien radical de l'angoisse à la chute de l'objet, la fonction décisive du a étant d'être le reste du sujet, à savoir le sujet comme réel. Lacan insiste sur le statut réel des objets. (Ce qui différencie son « objet a » des objets définisjusque là par d'autres psychanalystes.) Il rappelle que l'angoisse apparaît lors de la séparation (du détachement) des objets. Si les objets sont séparables, ils ne le sont pas par hasard, ils ont déjà, anatomiquement, le caractère d'être plaqués, accrochés. Lacan illustre son propos en prenant pour exemple le sein et le placenta, il précise que tous les objets détachables ne se détachent pas de la même manière. Il ouvre une parenthèse pour évoquer la classe des « mammifères », elle est nommée ainsi par référence au trait « mamme » mais elle révèle par le choix de ce signifiant, la prégnance des fonctions psychologiques au détriment de toute objectivation car d'autres traits auraient pu être retenus. Il fait remarquer que toutes les classifications induisent des confusions, preuve en est la division entre animaux vivipares et ovipares alors qu'en définitif tous les animaux sont et vivipares et ovipares. Concernant le sein, qui a souvent été confondu avec la mère et qui n'est pas simplement un objet partiel, la question à poser est : qui pompe le lait de la mère, le sein ou l'enfant ? Le sein est du côté de ce qui suce ou de ce qui est sucé ? (En d'autres termes où situer la coupure ?) La réponse est : le sein, tout comme le placenta, est un organe ambocepteur (reçoit par les 2 bouts, appartient à la mère et à l'enfant) ce qui pour Lacan oblige à considérer le rapport du sujet maternel au sein comme aussi important que le rapport de l'enfant au sein. On voit bien là que la coupure ne se fait pas au même endroit pour les deux et les restes (ou déchets) sont différents. Ceci se manifeste de manière encore plus claire en ce qui concerne le placenta : l'enfant lui, par la coupure du cordon se sépare de ses enveloppes (déchets) qui sont homogènes à son ectoderme et endoderme pour la mère, la coupure se fait au niveau de la chute du placenta, c'est ce qui en fait un objet a La fonction de l'objet a réside donc essentiellement dans sa caducité (le fait qu'il chute). Evoquant le phallus, lui aussi objet caduque, Lacan fait remarquer que pour l'humain, la jouissance (sexuelle) coïncide avec la détumescence, la « mise hors jeu » de l'instrument de la jouissance. Il revient sur ce que Freud a déjà repéré dans le coïtus interruptus, à savoir que l'angoisse apparaît du fait que « l'instrument est mis à jour dans sa fonction soudain déchue de l'accompagnement de l'orgasme », l'orgasme supposant signifier une satisfaction commune. L'angoisse apparaît quand il y a disjonction entre la jouissance (éjaculation) et la mise en exercice de l'organe. Le sujet peut éjaculer mais « en dehors » et c'est ce qui provoque l'angoisse, la subjectivité du sujet se focalisant sur la chute du phallus. A noter, la chute du phallus existe aussi dans l'orgasme lors d'un coït abouti. (Mais là pas de disjonction ?) Lacan souligne que le phallus est plus significatif, dans le vécu humain, par sa possibilité d'être objet chu que par sa présence. Là se désignerait la place de la castration dans l'histoire du désir. Pour finir Lacan revient sur le lien entre la fonction de castration et les traits de caducité de l'objet, il souligne l'importance de distinguer désir et jouissance notamment par rapport au désir et à la jouissance de l'Autre puis invite à articuler l'angoisse à l'Eros en repérant les versants de cette angoisse du côté de la jouissance et du désir.
Leçon 14 Elisabeth de Franceschi
- Conclusion de la leçon précédente : rapport entre angoisse et éros (érotisation de l’angoisse) : l’angoisse, vue du côté de la jouissance et vue du côté du désir. Ici : rapport entre angoisse et vie sexuelle (annonce leçon XVIII par exemple ; idée que la cure psychanalytique est une érotologie) - leçon riche en rappels (voir leçon XIII), jusqu’à la fin de la p. 282, soit toute la première partie de cette leçon ; mais il ne s’agit pas d’une simple répétition?
p. 271 Préambule ?jusqu’à la fin de la p. 274? A) Retour à la nouvelle de Tchékhov dont Lacan a parlé la fois précédente. Titre de cette nouvelle : “Frayeurs”. p. 272 Dans sa nouvelle, Tchekhov n’entend pas parler de l’angoisse. La peur : un renversement est tenté par Lacan : on pourrait dire que “la peur n’a pas d’objet”, et que l’angoisse, elle, n’est pas sans objet ?or “la peur” me paraît distincte de “les peurs”, “la frayeur”, différente de “les frayeurs”? Autre point : en russe, existe aussi la négation explétive, où apparaît le sujet de l’énonciation, distinct du sujet de l’énoncé ; cf. à ce sujet le séminaire IX sur L’identification.
B) Le désir de l’analyste et celui de l’enseignant ?depuis le milieu de la p. 273 jusqu’à la fin de la p. 274? Lien entre désir de l’analyste et désir de l’enseignant ; ?analyste et enseignant sont tous deux des gêneurs, des “éveilleurs” : cf. les images du Bouddha, “l’éveillé”, dans les leçons XVII et XVIII?. p. 274 Le contexte : allusion de Lacan. N’y aurait-il pas eu de séminaire s’il n’y avait eu la scission ? ?c’est-à-dire la scission de 1953, lorsque Lacan (suivant Juliette Favez-Boutonnier, Daniel Lagache, Françoise Dolto, Blanche Reverchon-Jouve) quitta la SPP (Société Psychanalytique de Paris) et fonda la SFP (Société Française de Psychanalyse) ; N.B. : Lacan fondera l’EFP en 1964, et publiera les Écrits en 1966?. La question du désir de l’enseignant ne se pose pas là où il y a le professeur (à situer au niveau du préconscient) ; en effet, à ce niveau-là, le professeur “enseigne sur les enseignements” : il “découpe” ? analogie entre le découpage et le collage (cf. par exemple le collage dans l’œuvre d’art), lequel vise à évoquer “ce manque qui fait toute la valeur de l’œuvre figurative elle-même”. Par cette voie, il est possible de “rejoindre l’effet propre de ce qu’est justement un enseignement”. Le public qui assiste au séminaire sur L’angoisse : reconnaissance de Lacan. Lacan annonce ensuite que pour un instant, il va se faire “le professeur de ?son? propre enseignement”, en commençant par le rappel des éléments qu’il a apportés au cours de la leçon précédente.
p. 275 I Rappel (reprise) d’éléments apportés par la leçon XIII ?depuis la p. 275 jusqu’à la fin de la p. 282?
A) Partant de la distinction entre angoisse et peur, Lacan a tenté d’opérer un renversement de la dernière élaboration de leur opposition (opposition très généralement admise actuellement, dit-il) ?p. 275 – milieu de la p. 278?. Ce renversement est amorcé par Freud ?dans Inhibition, symptôme, angoisse?, pour qui l’angoisse est Angst vor etwas, angoisse devant quelque chose, avec la distinction entre ce qui provoque la peur et ce qui provoque l’angoisse. Pour Lacan, il existe un rapport étroit de l’angoisse 1° avec le plus intime du sujet, et 2° avec l’appareil des défenses. 3° C’est donc du côté du réel que nous devons chercher ce qui ne trompe pas dans l’angoisse. Cependant le réel n’épuise pas la notion de ce que vise l’angoisse. Cf. tableau de la division signifiante ?voir leçon XIII?, “où l’x d’un sujet primitif va vers son avènement comme sujet”. Il y a division entre un sujet S ?soit un “présujet”? et le A de l’Autre (?soit un “pré-gd Autre”? ; c’est par l’Autre que le sujet a à se réaliser). p. 276 A S jouissance
a A angoisse
$ désir
?comparer avec le tableau de la leçon II, p. 38 :? S va vers $, A va vers A. - Le sujet ?S? a été laissé par Lacan “indéterminé quant à sa dénomination”, au cours de la leçon XIII : “c’est le sujet… en tant que ce terme ait un sens” (en réalité il est impossible de l’isoler comme sujet) ; mythiquement, Lacan l’appelle “aujourd’hui sujet de la jouissance”. Les trois temps de l’opération par laquelle advient le sujet proprement dit, sont la jouissce, l’angoisse et le désir. Fonction médiane (non médiatrice) de l’angoisse, entre jouissance et désir. A la fin de l’opération, advient le sujet barré $, impliqué dans le fantasme (lequel est un des termes qui constituent le support du désir). - la jouissce ne connaîtra l’Autre que par le reste a. - le fantasme, c’est $ dans un certain rapport d’opposition à a : $ ? a, le losange étant aussi bien la disjonction ? que la conjonction ?, et le “plus grand” ? que le “plus petit” ?, le tout simultanément. - $ est le terme de cette opération à forme de division (a étant irréductible) ; p. 277 $ représente “le rappel que, si la division se faisait, ce serait, plus loin, le rapport de a à S qui serait, dans le $, intéressé”. Peut-on dire, par conséquent, que a prend “une sorte de fonction de métaphore du sujet de la jouissance” ? Ce ne serait juste que si a était “assimilable à un signifiant”, ce qui n’est pas le cas : en effet, a est “ce qui résiste à cette assimilation à la fonction du signifiant” (et donc, a “symbolise ce qui, dans la sphère du signifiant”, “se présente toujours comme perdu, comme ce qui se perd à la significantisation” : un déchet, une chute, or c’est ce qui constitue “le fondement comme tel du sujet désirant” : non plus le sujet de la jouissance, mais “le sujet en tant que sur la voie de sa recherche, en tant qu’il jouit, qui n’est pas recherche de sa jouissance mais ce vouloir de faire entrer cette jouissance au lieu de l’Autre comme lieu du signifiant”. “C’est sur cette voie que le sujet se précipite, s’anticipe comme désirant”, juge Lacan. La précipitation, l’anticipation, est à comprendre comme le fait que cette démarche “aborde, en deçà de sa réalisation, cette béance du désir à la jouissance” : là se situe l’angoisse. Le temps de l’angoisse est présent dans la constitution du désir, il est “essentiel”, et ce, même s’il est “élidé, non repérable dans le concret”, de même que, dans Ein Kind wird geschlagen (1919), le second temps ?du fantasme en question? est “tellement élidé que l’analyse ne peut que le reconstruire”. Le temps de l’angoisse, intermédiaire entre jouissance et désir (le désir se constitue, est fondé sur le temps de l’angoisse, une fois qu’il a été franchi), est parfois repérable : p. 278 en effet, “au cœur de l’expérience du désir, il y a ce qui reste” quand le désir est satisfait, donc à la fin du désir (laquelle est toujours une fausse fin, le résultat d’une méprise), cf. la détumescence, et ce que représente de cette fonction du “reste” le phallus “à l’état flapi” : ce qui nous rappelle que l’objet choit du sujet, esstiellement, dans sa relation au plaisir” ?ou au désir, cf. la dactylographie, avec la différence de transcription entre Roussan et Miller ici?.
B) ? La chute de l’objet a ?du milieu de la p. 278 au milieu de la p. 279? a est l’objet du fantasme support du désir. Cf., dans la leçon XIII, les seins et les yeux de Lucie et d’Agathe, dans les tableaux de Zurbarán, et les yeux d’Œdipe à terre : ils apparaissent là “avec un signe différent” de ce qui se passe pour le phallus lorsque ce dernier est spécifié par le fait que la jouissance coïncide avec la détumescence : p. 279 en ce cas, le phallus est, dans la copulation, à la fois instrument du désir et instrument organique fonctionnant d’une certaine façon ; par conséquent, lorsqu’il est en fonction de a, il se présente avec le signe moins. Ceci permet donc de différencier - l’angoisse de castration ?laquelle doit être franchie pour accéder à la réalisation du désir? - ce qui fonctionne chez le sujet à la fin d’une analyse quand ce que Freud désigne comme menace de castration s’y maintient. En conséquence, selon Lacan, cette distinction montre que menace de castration et Penisneid sont dépassables. Commt franchir ce point-limite ? Selon Lacan, il faut plutôt arriver à savoir pourquoi l’analyse “menée dans une certaine direction” aboutit à l’impasse “par quoi le négatif qui marque le phallus dans le fonctionnement physiologique de la copulation chez l’être humain se trouve promu au niveau du sujet sous la forme d’un manque irréductible”.
C) Deux points importants concernant le sadisme et le masochisme ?de la p. 279 à la fin de la p. 281? p. 280 Dans le masochisme, la fonction de la douleur n’est pas l’esstiel. Le masochiste vise la jouissance de l’Autre, ce qui masque le fait que ce qui est visé en réalité, c’est l’angoisse de l’Autre. p. 281 Le sadisme vise, comme le masochisme, l’angoisse de l’Autre. Mais ce qui est masqué par là, c’est la jouissance de l’Autre (c’est-à-dire de Dieu, voir l’article “Kant avec Sade”). Il n’y a pas de réversibilité entre sadisme et masochisme : la structure est plus complexe que celle d’un couple de réversibilité : ce sont des fonctions à quatre termes ?voir l’article “Kant avec Sade”, (1963)?, ou “fonctions carrées”, et le passage d’un terme à l’autre s’effectue par une rotation au quart de tour, non par symétrie ou inversion. Au cours de la leçon précédente, Lacan a montré que derrière cette recherche de l’angoisse de l’Autre se cache, dans le sadisme, la recherche de l’objet a (cf. le “terme expressif” pris par Lacan dans les fantasmes sadiens : “la peau du con”). Nous nous trouvons donc, “entre sadisme et masochisme”, au niveau second de la visée de la tendance sadique et de la tendance masochiste, niveau caché qui se présente comme l’alternance (l’occultation “réciproque”) de l’angoisse dans le masochisme, de l’objet a dans le sadisme.
D) Rappel concernant l’objet a : objet a et anatomie ?de la fin de la p. 281 à la fin de la p. 282? Accentuation par Lacan du caractère “manifeste” p. 282 dont est marqué le mode sous lequel entre l’anatomie, dont Freud “a tort de dire” qu’elle est le destin ?N. B. : au cours de la leçon XVIII, Lacan reconnaîtra que Freud est dans le vrai, du moins si l’on donne au terme “anatomie” son sens étymologique, qui renvoie à la coupure?. Chez les mammifères, les caduques (dans la leçon précédente, elles jouent le rôle d’objet a) jouent un rôle de destin, d’?????? ?anankè? « par quoi la jouissance a à se confronter avec le signifiant » : chez l’homme, il y a rencontre avec l’objet dans une fonction qui le « précipite » au niveau de l’existence des caduques et de tout ce qui peut servir, à l’instar des caduques, de “frontière”, de « moments de coupure » « où l’angoisse peut être attendue », ce qui peut ainsi « confirmer que c’est bien là qu’elle émarge ». Rappel de la conjonction étroite entre orgasme et angoisse : cf. l’attente de l’Autre, et la remise de la copie (blanche ou pas) d’examen, qui montrent ce que peut être pour un instant, pour le candidat, l’objet. a.
II Les nouveautés de cette leçon ?de la fin de la p. 282 à la fin de la p. 287, c’est-à-dire toute la fin de la leçon? : aphorismes concernant la jouissance, le désir, l’angoisse ?deux remarques ici : 1° les aphorismes sont de brèves sentences non justifiées, ce qui signifie peut-être qu’ils engagent un rapport d’autorité ou de prestige. Cependant certains de ces aphorismes trouveront leur justification par la suite, ou ont été déjà justifiés 2° le point de vue adopté spontanément par Lacan est masculin? p. 283 Les femmes sont plus à l’aise que les hommes pour parler du contre-transfert. Elles sont donc mieux à même d’« attaquer » ?métaphore guerrière, masculine ?? le ressort du désir à la jouissance. C’est ainsi que la femme comprendrait « très, très bien ce qu’est le désir de l’analyste ». Pourquoi ? ?c’est sans doute un fantasme, dans la mesure où ces affirmations supposent une « nature féminine », probablement basée sur l’anatomie, or Lacan vient de récuser la conviction de Freud, selon qui « l’anatomie, c’est le destin »? Cf. tableau de la « division subjective » ?le même que celui de la leçon précédente, appelé alors « division signifiante »? ; rappel : l’angoisse ?deuxième temps? « fait le médium du désir à la jouissance ».
A S jouissance a A angoisse $ désir
Dans les rapports entre l’homme et la femme, selon Lacan, il y a « permanence d’un malentendu obligé », « structural », ce qui ne signifie pas échec nécessaire ?ceci annonce une autre formule, ultérieure, de Lacan : « il n’y a pas de rapport sexuel »?. Formules : « seul l’amour ?comme sublimation? permet à la jouissance ?sexuelle? de condescendre au désir ?sexuel? » ; p. 284 a est l’accès, non pas à la jouissance, mais à l’Autre (le sujet veut « faire son entrée dans l’Autre »). Par conséquent, « désirer l’Autre, ça n’est jamais désirer que a » ; « l’amour est la sublimation du désir » ?cf. le séminaire L’éthique de la psychanalyse, 1959-1960? ; l’amour est un fait culturel, cf. p. 285 La Rochefoucauld, Maximes (1678) : « combien de gens n’auraient jamais aimé s’ils n’en avaient entendu parler » ; il faut donc considérer la « conjonction » de l’homme et de la femme d’un point de vue différent. « me proposer comme désirant, ???? ?érôn?, c’est me proposer comme manque de a ». Et « c’est par cette voie que j’ouvre la porte à la jouissance de mon être » ?qui jouit ? et qu’est-ce que la jouissance de mon être ??. Lacan lui-même relève le caractère « aporique » ?c’est-à-dire contradictoire? de cette proposition : si je suis au niveau de l’???? ?érôn = du désirant?, et que j’ouvre la porte à la jouissance de mon être, le « déclin » le plus proche est le fait que je sois apprécié comme ???µe??? ?érôménos?, comme aimable. Toute exigence de a sur la voie de cette entreprise de rencontrer la femme, ne peut que déclencher l’angoisse de l’autre, réduit à la qualité d’objet a par mon désir. Par conséquent, seul l’amour, sublimation, permet à la jouissance de condescendre au désir. p. 286 Lacan est bien conscient du côté moralisateur de tels propos ; « ce que l’autre ?c’est-à-dire la femme ?? veut nécessairement » (même s’il ignore ce qu’il veut), « sur cette voie qui condescend à mon désir, c’est pourtant nécessairement mon angoisse », assure-t-il ?cet aphorisme ne montre-t-il pas la part de perversion potentielle que comporte tout amour ?? (La femme « surmonte » la sienne ?= son angoisse? par amour, dit Lacan). La femme suscite mon angoisse « en tant qu’elle veut ma jouissance », c’est-à-dire qu’elle veut « jouir de moi » : en effet, « il n’y a de désir réalisable » « qu’impliquant la castration ». « C’est dans la mesure où il s’agit de jouissance, c’est-à-dire où c’est à mon être qu’elle en veut, que la femme ne peut l’atteindre qu’à me châtrer » : voir les « effets » de cette « vérité première » dans la « vie conjugale », p. 287 ce qui n’est pas une « fatalité », concède Lacan. Supposons que l’objet du désir (c’est-à-dire la femme) « ne manque de rien » (il n’y a donc pas de Penisneid). Cela ne règle pas pour elle la question du désir, « dans la mesure où la fonction du a, pour elle comme pour nous, joue tout son rôle », mais cela la rend moins compliquée pour elle que pour les hommes : de fait, selon Lacan, « s’intéresser à l’objet ?l’objet-homme, ou le phallus ?? comme objet de notre désir, ça leur fait beaucoup moins de complications ». ?voir la leçon XVIII ?? Titre possible pour la prochaine leçon : « Des rapports de la femme comme psychanalyste avec la position de Don Juan ».
Questions posées lors du séminaire préparatoire aux prochaines journées d’été de l’ALI : 1° En ce qui concerne le résidu de la division, tout ne peut pas être dit ; ce qui reste est quelque chose de l’ordre de l’image, dit Lacan (c’est du Réel sous forme d’image, et qui ne fait pas sens, donc qui n’est pas de l’ordre de l’imaginaire). 2° L’idée de l’amour comme sublimation, suppose qu’il y a deux formes d’amour distinctes. Mais pouvons-nous réduire l’amour à une jouissance narcissique ? (Dimension de l’autre comme « appui pour l’existence »). L’amour est là pour parer à l’angoisse. Il s’appuie sur une idéalisation de l’objet. Il est cependant pris dans le courant du désir. Il pare à l’angoisse, et est aussi une forme d’élection de l’objet. Il y a non-équivalence entre Joyce et Nora, altérité en tant que réelle, il y a donc rapport sexuel, dans ce couple-là au moins. 3° Distinction entre angoisse de castration et menace de castration (laquelle reste souvent imaginaire). L’angoisse de castration a à voir avec la sexualisation, elle est à franchir pour accéder au désir.
Leçon 15
Il se propose de revenir au champ qu’il définit comme central, celui de
la jouissance. Celle-ci est séparée du désir, par l’angoisse. Bien sûr
que l’Autre réel est intéressé, visé par la jouissance et aussi par le
désir, mais dans son reste : a. a substitut de A. La femme s’avère
supérieure dans le domaine de la jouissance. Car son lien au nœud du
désir est plus lâche. Car le manque, le signe moins, la négativation du
phallus, -Φ, pas le complexe de castration, (il y aurait une différence
?), au centre du désir de l’homme, n’est pas pour la femme un nœud
nécessaire. Ce n’est pas qu’elle est sans rapport avec le désir de
l’Autre, au contraire elle y est directement confrontée. C’est une
simplification pour elle que cet objet phallique qu’en second par
rapport à cette confrontation et que parce qu’il joue un rôle dans le
désir de l’Autre (nb : ils mettent systématiquement Autre, alors qu’il
s’agit du partenaire, ce pourrait être aussi bien autre, minuscule. Et
puis aussi sous sa phraséologie compliquée se cache une phénoménologie,
assez simple, voire simpliste, et ce n’est pas la seule fois : une
femme est moins attachée naturellement à la dimension phallique mais
elle en retrouve la dimension d’en être l’objet, voire de la subir dans
le désir de son homme). De ce rapport simplifié, (plus direct), au
désir de l’Autre, viendrait que les analystes femmes soient plus libres
par rapport au contre-transfert. Même si elle peut représenter des
particularités (lesquelles ?) répondant au -Φ dans son rapport à
l’Autre, la femme n’y tient pas aussi essentiellement que l’homme pour
ce qui est de sa jouissance. (c’est abstrait !? ça veut dire ? que par
rapport à la castration, elle serait moins coincée ? fixée ?). Il
ramène le mythe de Tirésias, que la femme jouirait plus que l’homme ?
Est-ce en rapport avec la castration ? C’est ce qu’il semble dire :
qu’elle n’aurait pas cette limitation qui impose à l’homme sa relation
au désir : le -Φ. (Est-ce à dire que les femmes ne connaissent pas la
castration ?) A l’opposé de Hegel et de sa négativité qui fait trou
dans le réel, il affirme que pour l’homme le trou commence au bas de
son ventre, qui est à la source du statut du désir chez lui. Il
s’ensuit une digression critique de Sartre à propos d’un mouvement
régressif évoqué par les trous faits dans le sable de la plage auxquels
il oppose le crabe de la castration. Il rappelle ensuite qu’il na pas
dit que « le réel est toujours plein » mais que « le réel ne manque de
rien ». Ensuite il rappelle que dans le pot l’essentiel c’est le vide
autour duquel il est constitué, et que par ailleurs, à la campagne, il
a une belle collection de pots de l’Alaska, et qu’aussi l’existence de
céramiques est le premier signe de l’existence d’une civilisation(?).
Il poursuit, avec l’évocation de son tableau, par une critique
hypocrite de Piera Aulagnier, il n’arrête pas de la flatter, de la
féliciter de son observation d’un cas d’acting-out, pour finalement lui
dire qu’elle trahissait son enseignement, la preuve selon lui étant le
terme « d’embarras », qu’elle n’a pu trouver qu’à son séminaire, (comme
s’il ne s’agissait pas d’un mot courant !? mais uniquement un concept
lacanien ?! Szasz avait raison !) et que lui a placé dans la colonne du
passage à l’acte !! Alors est-ce en réponse à la présentation
d’Aulagnier, il va présenter lui aussi un cas de sa clinique, une fois
n’est pas coutume. Il s’agit d’une femme, une de ses analysantes, pour
laquelle il veut nous faire sentir ce qu’il entend quant à son rapport,
de femme, à la jouissance et au désir. Est-ce très transparent ce qui
va suivre ? C’est une femme que son mari délaisse sexuellement.
Classiquement, selon ce qu’il en a déjà dit, cela lui importe peu du
moment qu’il n’en désire pas une autre. Et puis elle exprime un
symptôme étrange, pouvant être gênant : un émoi vaginal, un gonflement,
qui survient de façon inopinée à la vue d’objets communs, y compris
sans rapport avec la sexualité. Et elle passe à une association
suivante, sur le mode de la dénégation, « mais ça n’a rien à voir » au
fait que pour toute perception, quel qu’en soit l’objet, elle évoque
son regard à lui, Lacan, sur ces objets qu’elle perçoit n’étant pas
sûre de sa propre perception. De cela, il est précisé deux choses, de
sa part à lui : 1, qu’un temps, amoureuse d’un jeune homme éloigné,
elle lui écrivait se décrivant elle-même, et décrivant un environnement
de façon totalement imaginaire. Et 2, à propos de son regard à lui,
Lacan, elle se dit « téléguidée ». Il précise qu’il pense que ce n’est
pas psychotique. En effet, lui, si féru d’étymologie, devrait le
relever : c’est être guidée à distance. Quant à l’évocation du faux
attentat de Mitterand, quel intérêt ici ? Où nous mène son observation
? Quant au rapport de la femme avec le désir et la jouissance, ce qui
était annoncé ? Mystère, car le lien qu’il fait, c’est le vase. Le vase
féminin auquel il ne manque rien. (mais toujours ses formulations
ambiguës, ce n’est pas le vase féminin pour l’homme, c’est le vase pour
la femme, le sien, celui qu’elle vise). La présence de l’objet y est de
surcroit parce que cette présence n’est pas liée au manque de l’objet
cause du désir, au -Φ, auquel il est relié chez l’homme. ( 1 : et les
autres objets alors :sein, fèces, voix, .. pourquoi n’en aurait-elle
pas le manque ? 2 : le vase, dans ce cas, symétriquement est donc chez
l’homme, non ?). le mythe d’Adam, la côte, c’est l’objet perdu qu’il
s’agit de retrouver. Mais, elle, la femme, Eve, avec les possibilités
indéterminées du désir autour d’elle, elle se tente en tentant l’autre.
C’est Eve tentant Adam avec n’importe quoi, une pomme, l’important
étant de crocheter le désir d’Adam. C’est le désir de l’autre qui
l’intéresse, elle. C’est le prix culturel du désir,(c’est flou) qui
donne le mode et le niveau de l’amour(c’est flou aussi, et ça exclut sa
racine maternelle et narcissique, au profit de figures comme l’amour
courtois ou romantique, etc). L’amour c’est l’idéalisation du désir. A
propos de sa patiente, précise-t-il, qu’elle tienne au désir de son
mari, c’est ça l’amour, qu’il le manifeste, ce n’est pas obligé.
D’ailleurs les femmes agréent volontiers l’impuissance de leur
partenaire, que ce soit un fiasco ou à long terme. Tout au plus,
précise-t-il, peuvent elles s’adjoindre une aide, plus efficace, pour
qu’il ne soit pas dit que ça leur est refusé. Alors qu’en est-il,
est-ce à propos de cette tolérance à la privation que se fait
l’association, qu’en est-il du masochisme et plus particulièrement du
masochisme féminin ? Ce serait un fantasme masculin. Pourquoi ? Parce
que chez l’homme ce qui vient recouvrir la jouissance c’est l’angoisse
éveillée par le désir, -Φ. (désir : le sien propre, ou celui de
l’autre, de la femme ? cf Hamlet, l’horreur face à ce désir cru, il y a
là encore une ambiguïté, car si c’est l’angoisse de l’homme face au
désir de la femme, c’est une banalité, mais encore une fois on ne sait
pas quoi est à qui). La jouissance féminine vient occulter cette
angoisse de l’homme. (Ce serait ça le fantasme masculin du masochisme
féminin, ah(?), car ce qu’il dit là est banal, et sans attribuer de
masochisme à la femme, la jouissance féminine est positivée par
l’homme, mais en plus il dit les choses de façon tellement
embrouillée). C’est avec cette structure imaginée chez la femme que
l’homme soutient sa jouissance de sa propre angoisse (« elle aime ça la
garce ! »). Et le désir n’y fait que couvrir l’angoisse. (au départ
l’inverse : c’était l’angoisse éveillée par le désir, mais le désir
change à qui est-il ?). Pour la femme, le désir de l’autre est le moyen
pour que sa jouissance est un objet convenable. (Pas la bite, cf
Hamlet, mais le désir de l’homme). Son angoisse est dans le désir de
l’autre dont elle ne sait pas bien ce qu’il recouvre. Il y a toujours
chez l’homme quelle qu’imposture à laisser voir ce qu’il n’y a pas, (
une virilité absolue), alors que chez la femme c’est la mascarade. A
savoir qu’elle est plus réelle, plus vraie, (paradoxe avec mascarade).
Elle le serait de savoir ce à quoi elle a affaire dans le désir, du
mépris de sa méprise, de laisser voir ce qu’elle sait qu’il n’y a pas.
(Tout c’est uniquement construit sur une idée de -Φ, l’avoir ou pas.)
Si cela n’apparaît pas facile quant à l’accès de l’homme à la
jouissance, il n’empêche, déclare-t-il, que c’est fort maniable si on
n’attend que du bonheur (!!? c’est-à-dire ?)
Il repart sur Lucie Tower. Mais en préambule parle de Don Juan, comme
d’un rêve féminin, un homme à qui il ne manquerait rien. Toujours
constant, telle l’image d’un père non châtré. Il est dans son
imposture, radical, absolu, il l’accepte. Mais là, où c’est plus
obscur, c’est que ce ne serait pas une question de désir ? (peut-être
que le désir de Don Juan ne colle pas avec sa définition ?) . Mais que
ce serait presque comme une fonction, (fonction sexuelle ? mais alors
on retombe sur l’instinct ?) réagissant à « l’odor di femina » (alors
comme un chien ? c’est bien de l’instinct ?). Il en veut pour preuve
qu’il est prêt à sauter Elvira, son ex, alors qu’il ne peut plus la
souffrir. (Mais n’est-ce pas bien plutôt le désir pour les femmes alors
que lui se mélange peut-être avec l’amour ?). Alors Lucie Tower ? Elle
a 2 hommes analysants, tous deux sont inhibée quant à leur masculinité.
En quelque sorte, ils ne font pas assez semblant. Elle-même se sent un
peu trop protectrice. La relation avec les analysants se passe bien,
mais ça ne bouge pas beaucoup. Sa dimension protectrice est aussi
centrée sur l’épouse du premier analysant qui lui semble en danger,
risque psychotique, sans doute selon les dires de l’analysant. (nb :
paradoxe ? sa compassion pour ses analysants et leur inhibition
masculine laissaient plutôt penser que ces épouses étaient dominantes,
alors pourquoi cette crainte pour celle-ci ?). Elle fait un rêve à
propos de cette épouse. Elle y est en bonne santé mais en plus
favorable à l’analyse de son mari. Elle en change son fusil d’épaule,
et perçoit que son analysant n’est pas inhibé et joue son rôle
masculin. Elle lui fait part de ses déductions. Et la cure change, son
analysant la scrute, la maltraite d’un sadisme phallique dans ses
dires, veut l’y plier. C’est l’objet, son objet à elle qu’il cherche.
Lacan fait remarquer que ce n’est pas masochiste de se mettre sur la
ligne où passe l’objet sadique. Lucie Tower ne s’accuse pas de
masochisme. Elle essuie l’orage, en est parasitée en dehors des
séances. Mais partant en vacances, elle s’aperçoit qu’elle n’y pense
plus du tout, car elle ne s’y sent pas impliquée de son propre désir.
Ce n’est qu’un rapport à un désir comme tel, avec lequel elle peut
garder ses distances conclut Lacan.
Leçon 16
Leçon 17 Jean-Jacques Lepitre
Il revient sur la circoncision comme symbolisation d’une séparation, en
relation au corps propre, d’une partie de soi. Avec l’exemple du
Bouddhisme, il interroge le lieu central de la fonction du désir, qui
est l’essentiel du message freudien, et c’est là que la dialectique de
l’angoisse nous amène. Ce lieu, c’est celui où petit a se forme. Petit
a, l’objet, celui de l’objectalité s’opposant à l’objectivité. Celle-ci
se résume et s’articule à un formalisme logique. L’objectalité, elle,
est le corrélat d’une coupure. [Il va développer à partir de là des
éléments extrêmement importants concernant la philosophie, la
problématique de la connaissance]. Le formalisme logique, quant à lui,
même chez Kant, se construit, se constitue de la fonction de la cause
(ex : 4(effet) 2+2 (cause)). Or ce qu’il avance c’est que cette
fonction causale est superposable, voire identique à cette part de
nous-même, cette part de notre chair qui reste prise dans la machine
formelle, sans quoi ce formalisme logique ne représenterait rien pour
nous. Or ce formalisme ne nous donne pas que le cadre de notre pensée,
notre esthétique transcendantale, mais il nous saisit en plus quelque
part. Et ce quelque part est ce morceau charnel à nous-mêmes arraché.
C’est ce morceau qui circule dans le formalisme logique, cette part
irrécupérable prise dans la machine. Cet objet, au niveau de
l’expérience corporelle où se produit sa coupure, c’est lui le support
de toute la fonction de la cause. [nb : donc, et ce n’est pas rien, il
fait de la castration l’origine de notre sensibilité à la notion de
causalité et de ses conséquences]. Cette part en jeu, est
essentiellement corporelle. Si nous sommes bien objectaux, (pas
seulement objectifs), donc objets de désir, c’est comme corps. Et
nous-mêmes désirants, ce que nous désirons c’est le corps de l’autre.
Et ce que nous entendons comme métaphore amoureuse, par exemple : « je
veux ton cœur », et à prendre au moins pour une part au pied de la
lettre, c’est de la tripe qu’il s’agit. C’est le corps l’origine de la
métaphore. Ce serait selon lui la raison de la longévité de ces
métaphores. Voir aussi du côté religieux le culte du « Sacré-Cœur », on
pourrait rajouter la « présence réelle ». Cet usage métaphorique en jeu
dans le désir provient de ce que la cause est déjà logée dans la tripe,
figurée par le manque. Il essaie de l’illustrer de son bras. Quand on
pense à son bras, il est en quelque sorte détaché du corps, on peut
penser pouvoir l’oublier, à l’inverse l’angoisse si on ne le sent plus…
ce n’est pas limpide, et il en évoque les symptômes hystériques, où il
y a cette disjonction d’un membre. (on sent qu’il y a en effet quelque
chose autour de cette disjonction tripale, mais ça reste confus). La
cause est en corrélation avec ce qui est omis dans la fonction de la
connaissance, à savoir le désir. On n’a pas attendu Freud, dit-il, pour
s’interroger sur la cause dernière, de la connaissance. Ainsi Platon et
le « Souverain Bien » ou Aristote et le « Premier Moteur ». Mais ces
interrogations aboutissent bien souvent à des mythes psychologisants,
ceux de la connaissance pour la satisfaction des besoins ou des
instincts. Or, dit-il, il faut aller plus loin, articuler les choses
dans la structure, à savoir que le rapport du sujet au signifiant
nécessite la structuration du désir dans le fantasme. Le fonctionnement
de celui-ci implique une syncope, temporellement définissable, de
l’objet a. Cette aphanisis de a, cette disparition de a, serait ce dont
on a le reflet dans la fonction de la cause, et de la cause dernière, y
compris dans sa version essentialiste (preuve par la perfection, par
exemple de l’existence de Dieu). La certitude qui est ici attachée est
l’ombre d’une autre certitude, celle de l’angoisse, définie comme ce
qui ne trompe pas. Angoisse à l’approche de l’objet, et en tant que
tout objet lui échappe(?). La certitude liée à la cause première est
l’ombre de cette certitude, celle de l’angoisse. Cela implique une
remise en cause de la connaissance. Car il y a déjà connaissance dans
le fantasme. Cette connaissance, c’est que l’homme dès qu’il parle est
impliqué dans son corps. La racine de la connaissance, c’est cet
engagement de son corps. Il distingue cet engagement du corps de celui
promu par la phénoménologie, ex Merleau-Ponty, où le corps en son
entier es engagé par exemple dans le phénomène perceptif. Je perçois un
objet de ce qu’imaginairement je le perçois de tous les côtés et avec
tous mes sens. L’engagement de l’homme qui parle, avec cette fonction
du désir, c’est qu’il y a toujours dans le corps, et du fait même de
cet engagement, quelque chose de sacrifié. Et dès lors inerte. C’est «
la livre de chair », illustrant le poids de la dette. (Cf « Le marchand
de Venise »). Il associe sur le fait que Shylock soit un juif, que
selon lui nul livre plus que la Bible hébraïque n’évoque comme elle le
fait cette zone sacrée, (celle du paiement de la dette, je suppose),
mais aussi ce côté implacable de la relation à Dieu, cette méchanceté
divine, par quoi nous devons toujours payer de notre chair cette dette.
Il s’interroge sur l’antisémitisme, à savoir si c’est du fait que cette
zone y soit particulièrement nette, celle de l’implacabilité de Dieu,
et que ce peuple s’y présente comme a, comme reste. (reste de la
méchanceté de Dieu ?). Ce reste survivrait à la division du champ de
l’Autre par le sujet (cf sa figure de division). La solution chrétienne
masochiste, c’est l’identification à celui qui s’est fait cet objet, ce
déchet laissé par la vengeance divine. Il digresse, et façon
d’introduire ce qui va suivre évoque la rencontre d’un occidental de
retour du Japon se plaignant de l’hypocrise des japonais, remarquant
que celui-ci étant chrétien son hypocrise n’est en effet pas la même,
et se pensant supérieur de cœur, de s’appuyer sur le fond chrétien
masochiste. Le masochisme étant de désirer provoquer l’angoisse de
l’Autre, en l’occurrence de Dieu.
Il évoque des statues de Bouddha dans un temple japonais qu’il a
beaucoup aimées. Dans le bouddhisme, le désir est illusion. Car « s’il
y a objet de ton désir, ce n’est rien d’autre que toi-même. » Le «
c’est toi-même que tu reconnais dans l’autre » est déjà dans le
bouddhisme. Référence donc au miroir. D’où l’erreur facile de la
projection : les choses en dehors de nous se présentent comme nos
doubles. Or, dans ce rapport au désir, avec l’objet a, ce qui est
différent, ce que je cherche à l’extérieur, cette partie de moi-même,
c’est non pas une partie projetée, une doublure spéculaire, mais une
partie qui a été coupée, séparée. Digression ensuite sur l’œil où se
reflète le monde (peut-être en rapport avec l’œil mi-clos de Bouddha
?). Œil qui se perçoit ainsi dans le miroir, œil où se reflète l’image
du monde et dont le point d’origine ( le sujet percevant ?) aurait à
voir avec le fondement du 1 et du 0. (Ceci semblant pour lui s’associer
à ce qu’avant tout contenu spatial, multiplicité des objets, il faille
un Un, le Un a priori de l’espace en soi pouvant les contenir, ce
serait une catégorie kantienne alors ? Je flotte, ça ne m’est pas clair
!?). Il poursuit par ses statues de Bouddha. Il y a mille et une
statues toutes identiques. Il y a donc à la fois mille et un Uns
subjectifs identiques à un Un dernier, à Bouddha, à une statue plus
grande, première dans sa description. En fait ce n’est pas exactement
Bouddha, qui lui n’est plus incarné, mais un boddhisattva, et donc
encore incarné pour aider le monde. Ces statues, ces divinités, à
l’origine masculines, si au Japon elles semblent le rester elles sont
devenues en Chine féminines. Mais qu’elles soient masculines ou
féminines les Japonais, les orants, s’en fichent. Ce qui est peut-être
cohérent avec le fait que l’état de Bouddha c’est la réalisation du
caractère illusoire de tout désir. Or, il fait, lui, de la statue un
objet pour le désir, mais alors de quel désir s’agit-il ? Pour
lui-même, c’est un désir artistique, mais pour l’orant ? Il remarque
les yeux mi-clos de toutes les statues de Bouddha (mais n’est-ce pas un
regard tourné vers l’intérieur ?). Mais dans le cas précis de ces
statues, il évoque la possibilité de larmes, ce serait un bouddha
pleurant sur la souffrance des hommes.
Au total, conclut-il, au stade oral : un rapport de la demande au désir
voilé de la mère, au stade anal : l’entrée par le désir de la demande
de la mère, au stade de la castration phallique, le -Φ, l’entrée de la
négativité quant à l’instrument du désir au moment du surgissement du
désir sexuel comme tel, avec cette signification, dans le champ de
l’Autre. Mais en plus de ces 3 étapes, pour retrouver la structure de
petit a comme séparé il faut aussi penser le miroir comme champ de
l’Autre où apparait, sinon petit a, au moins sa place, autrement dit
passer de la castration au mirage de l’objet du désir, de la place vide
à l’objet a. Il note que son affaire de statues était pour montrer que
cet objet, à la fois notre image et Autre chose, pouvait être sans
rapport avec le sexe.
Leçon 18 Jean-Jacques Lepitre
a est le reste de la dialectique du sujet et de l’Autre, a oral, anal, génital, et un qui n’est pas homogène aux autres : le regard. Le champ de l’angoisse permet d’éclairer le rapport de l’objet au désir. Celui-ci est lié à la coupure, au reste : l’objet. Le manque de la satisfaction est autre chose. L’angoisse serait l’écart entre le manque de satisfaction et le désir. {nb : il y aurait plusieurs types d’angoisse ?]. La butée analytique freudienne sur le complexe de castration est à réexaminer. Faut-il le faire en revenant à l’origine, à la pulsion orale, à l’objet oral comme métaphore et prototype de tout objet, y compris l’objet phallique. a y fonctionnant comme -F, c’est le complexe de castration, et s’ y joint la dimension visuelle, spatiale, où se situerait le leurre du désir, cf le bouddhisme. Si on revient à la pulsion orale comme modèle, avec sa coupure de l’objet, le sujet en est coupé de ce qu’il vit comme interne, comme lui appartenant, le mamelon, le sein, comme ça a pu l’être des enveloppes à la naissance. Il digresse sur la bouche, avec les lèvres comme bords, comme lieu de la coupure, et la bouche comme lieu d’émergence des signifiants. Et, précise t-il, l’angoisse, née du manque de satisfaction, a pour lieu la mère, par exemple que le lait tarisse. Nouvelle digression sur les ornithorynques. Ceci pour distinguer le a, la mamme, comme élément intérieur, appartenant au sujet, du point d’angoisse situé dans l’Autre, de là où l’élément de la satisfaction viendrait à manquer. Ce a qui devient objet du fantasme par partition, à l’intérieur, au niveau donc de l’image réelle. Alors qu’en serait-il selon ce modèle pour le complexe de castration ? Il y aurait, dit Lacan, un renversement du lieu du désir et du lieu de l’angoisse ? [L’objet serait en dehors, du côté de l’Autre et l’angoisse au-dedans ? Est-ce cela ?] Par rapport à la castration, et sur le modèle oral, la relation à l’objet inclut la possibilité de la privation de l’organe. Il s’interroge, il continuera dans les leçons suivantes, sur les relations de l’orgasme, de la détumescence de l’organe masculin, et l’angoisse. En analogie avec l’oralité, où l’angoisse s’origine de la non satisfaction par l’Autre, que l’Autre ne la fournisse plus, il fait le rapprochement avec l’orgasme. S’il ne va pas jusqu’à équivaloir les deux, orgasme et angoisse, il note les passages de l’un à l’autre, angoisse orgasme, orgasme angoisse, et semble indiquer que c’est de leur proximité, que comme l’angoisse, l’orgasme a un effet de certitude. Mais rappelle-t-il, le point de désir et le point d’angoisse ne coïncident pas. Dans la relation phallique, l’objet du désir, F, fonctionne comme -F, manque, c’est pour cela qu’il est désiré, et a à voir avec la satisfaction, au sens précédent, oral. Mais qu’en est-il alors de la certitude ? Car il n’y a nul phallus total, tout puissant, phénomène de la détumescence, qui puisse achever la relation à l’Autre et au réel. Pour résoudre cette question Lacan fait retour au miroir, à y situer désir, objet, point d’angoisse, et en y ajoutant un nouvel objet partiel : l’œil. Il rappelle, dans le règne animal, il est toujours double et symétrique. Et pointe que dans l’esthétique transcendantale, si elle est juste, elle est oublieuse de la présence de l’œil lui-même. Cette fonction oubliée de l’œil est homologue à celle de a. A partir de cela, quelques digressions : - les mystiques veulent dépasser les apparences, or ce sont essentiellement des apparences visuelles dont il s’agit -les leurres que portent les animaux pour effrayer leurs adversaires sont des tâches imitant des paires d’yeux – le mythe du troisième œil. Digression encore : Dans ce mode d’abord de l’objet partiel qu’est l’œil, et dans son rapport au désir, corrélatif de a, objet lui-même aussi du fantasme, [qui a un support visuel], pourrait s’envisager un point zéro, un point d’apaisement, de contemplation, [on ne regarde plus, on contemple, on se laisse regarder par le monde]. Ce point zéro, c’est le point entre les sourcils, le 3ème œil des statues bouddhiques qu’il a évoquées. Ce point prend l’invisible et l’angoisse à sa charge, y compris celle de castration. Mais il n’est pas possible d’annuler le point central du désir, ni d’identifier a avec ce point zéro [un peu confus tout ça]. Car, il le rappelle, le point du désir et le point d’angoisse ne se confondent pas. Et même s’il y a tentative d’annuler l’objet du désir (référence au bouddhisme des statues), il n’y a pas annulation de l’objet d’angoisse.
Leçon 19 Marielle Stines
Au début de la leçon 19, Lacan nous rappelle qu’à la gamme des relations d’objets déjà connus, l’objet oral, l’objet anal, l’objet phallique, le schéma qu’il développe dans le séminaire en cours autour de l’expérience de l’angoisse, impose d’en ajouter deux, celui du regard qui a occupé les deux dernières leçons et celui de de l’oreille qui va occuper la leçon d’aujourd’hui, dit il, bien qu’il revienne au regard dans la deuxième partie pour mieux dégager la spécificité de la voix comme objet a, avènement d’un reste, autour de quoi tourne tout le drame du désir et dont l’angoisse nous permet de révéler le sens . Pour aborder la question de la voix, Lacan va en passer par un autre objet, un objet rituel, qui est au coeur d’une étude de Théodore Reik du début du siècle, a fait l’objet d’un article dans la revue Imago et ensuite dans un ouvrage Le rituel, psychanalyse des rites religieux. Même s’il critique assez vertement ensuite la fin de cette étude de Reik, il en loue la brillance, la fécondité, qui le renvoie aux errements des générations de psychanalystes qui ont suivi celle de Reik, qui n’ont en rien poursuivi les travaux de Freud et notamment, sa dernière doctrine de l’exploration des ressorts et du statut du moi et se sont au contraire fourvoyés dans une déviation, une réduction, une véritable aberration du champ de l’expérience. Cet objet rituel qui est au centre de l’étude de Reik, c’est le shofar, dont il va être question pendant une bonne partie de la leçon, instrument des plus anciens puisqu’il en est question plusieurs fois dans les textes bibliques, le plus souvent fabriqué dans la corne d’un bélier, ou d’un bouc sauvage mais aussi bien d’antilope ou de gazelle.
La sonnerie du shofar est au centre des fêtes de Rosh Hashana, le nouvel an juif et signe la fin du jeune de Yom Kipour, littéralement « jour de l’expiation » qui rappelle le Pardon de Dieu accordé au peuple juif pour la faute du Veau d'Or, raconté dans le livre de l'Exode.
Ces fêtes sont très importantes dans la tradition juive et ont la particularité d’être centrée sur la relation du peuple juif à son Dieu. Chaque fidèle doit commencer un processus d’introspection et d’examen de lui-même devant D.ieu. Cette sonnerie retentit selon un rituel très précis : • Tekia : un son long continu, • Téroua : neuf sons courts, à succession rapide Shevarim : trois sons de durée moyenne, qui ressemblent à des gémissements, Tékia guédola : un son majeur, long et continu, qui ont tous une signification précise, ou plutôt qui renvoient chacun au souvenir d’un événement particuliers de la relation du peuple à dieu. La sonnerie du Shofar dans la synagogue d'Avignon 1 Le son du shofar est entendu dans la bible lors de la révélation du Sinaï qui par intertextualité renvoie au non sacrifice d’Isaac, mémoire à chaque fois réveillée du moment ou l’ange de dieu arrête la main d’Abraham qui va tuer son fils. Le bélier qui vient en place de l’enfant introduit une logique de substitution, une logique du symbole, dont la corne de bélier est aussi le souvenir.2 Lacan témoigne du caractère profondément émouvant, remuant du son du shofar, indépendamment de l’atmosphère de recueillement, de foi, voire de repentance dans laquelle il se manifeste, et du surgissement d’une émotion, dont on pourra se demander s’il se rapporte plus à l’émoi ou à l’émotion qu’il aborde à la fin du séminaire. Ce son se présente comme un affect proprement auriculaire, et ne peut pas manquer de toucher à un degré vraiment insolite, inhabituel, tous ceux qui sont amenés à l’entendre. L’intuition de Reik que loue et retient Lacan, c’est celle d’avoir repéré que le Shofar est présent dans les événements majeurs où il s’agit de refonder, de renouveler, l’Alliance avec Dieu, si bien que Reik en vient à poser que le son du Shofar est la voix même de Dieu. Et c’est ce qui intéresse Lacan, une voix séparée de la parole, séparée de la phonémisation, de la double articulation du langage, du signifiant d’une part, un rugissement, un mugissement, qui dans sa dimension émissive, nous met en présence de l’objet petit a mais dans le même temps d’une voix qui nous vient du lieu même de l’Autre puisque la sonnerie du Shofar intervient à chaque fois qu’il est question de renouveler le pacte de l’Alliance. Le Shofar n’articule pas les principes, les bases, les commandements de ce pacte, dit-il. Il est pourtant bien manifestement présenté comme ayant fonction de souvenance. Entre Rochachana et Yom Kipour, un moment central des fêtes est en effet liée à la souvenance du non sacrifice d’Isaac, celui précis où Dieu arrête la main déjà consentante d’Abraham, pour substituer le bélier à la victime, Isaac. Mais sont-ce vraiment les fidèles qui sont invités à se souvenir demande Lacan ? Et il fait ici un lien avec la fonction de répétition dégagée par Freud, en se demandant si est-elle seulement automatique, et liée en quelque sorte au retour nécessaire de la batterie du signifiant ? Ou si, comme on sent qu’il le suppose, elle a une autre dimension, dans l’interrogation portée par la définition du lieu de l’Autre dit-il et celui qui a à se souvenir n’est-il alors pas Dieu lui-même ? Je ne pourrais pas déplier théoriquement ce point mais il m’est venu cette métaphore qui l’a éclairé pour moi, que dans le sillon du Sur-moi creusé par la voix de l’Autre, le désir peut-être amené à sauter comme sur un disque rayé. J’ai trouvé cette proposition de Lacan, d’utiliser le shofar pour commencer à donner à voir ce qu’il peut en être de la voix comme objet petit a, vraiment efficace et elle a produit sur moi, un effet subjectif très similaire du moment où il fait de petit a, une forme algébrique, pour en faire vraiment le reste de la division du sujet, en le dégageant de l’analogie présente dans la notion de Petit autre, moment qui est pour Jean Allouche le moment précis d’invention de l’objet petit a, à la leçon 9 du séminaire.3 Il m’est venu aussi le souvenir et ça n’a pas de rapport direct avec la leçon mais c’est une chose que j’ai découverte récemment et que j’ignorais totalement, que Moïse était bègue et qu’il en fait état à Dieu lorsqu’il résiste à accepter sa mission et que Dieu lui dit, « va, moi-même je serai avec ta bouche, je t’enseignerai ce que tu auras à dire ». Donc d’un côté un porte-parole bègue et de l’autre un dieu qui mugit dans une corne de bélier. On aimerait qu’il en dise plus à ce moment là sur la voix que ce qu’on en connait déjà, dit il sous la forme des déchets, les feuilles mortes, sous la forme « des voix » égarées de la psychose et qu’il avance ce qu’il annonce à savoir où s’insère la voix, comme objet séparé, dans les stades de l’émergence progressive du sujet, mais pour savoir ce qu’il apporte de nouveau il a besoin d’en revenir à l’oeil. Le niveau de l’oeil qui est aussi celui de l’espace, mais pas au sens kantien, au sens de sa relation à la fonction du désir. Le caractère d’élusion de petit a, toujours ailleurs que là où le désir le supporte, et pourtant en relation profonde avec lui, n’est nulle part plus manifeste qu’un niveau de la fonction de l’oeil. C’est en quoi le fantasme qui est le support le plus satisfaisant de la fonction du désir est toujours marqué des supports visuels où il fonctionne communément. Dans l’espace pourtant rien n’est séparé tout est homogène. Pour localiser notre corps dans l’espace, nous devons le neutraliser en le pensant sous forme de point, d’unité insécable, qui ne peut être à deux endroits à la fois. Cette unité inaliénable dit Lacan, ne peut être petit a. Il reprend alors le schéma optique pour montrer que par la forme i(a), ma présence dans l’autre par l’image est sans reste. Je ne peux pas voir ce que j’y perd. Quand la relation spéculaire domine, c’est la façon dont fonctionne le rapport du sujet à l’Autre. Petit a y est masqué. Cette image spéculaire séduit par sa bonne forme, sa forme gestaltique mais elle est faite pour nous en indiquer les pièges. A ma précedente traversée de l’angoisse, le séminaire, il me semblait avoir compris qu’il suffisait cependant d’une tâche, d’un grain de beauté pour nous déciller les yeux de l’illusion du spéculaire dans le reflet même de la personne qui nous regarde dont la tâche nous détourne, mais Lacan a l’air de dire que le grain de beauté réduit aussi petit a à un point zéro (identique au regard absent-présent du boudha) que le grain de beauté, comme l’oeil inerte du poisson mort ou les tatouages sur la peau des femmes du Parana évoquées par Levy strauss nous regardent, créant un lien réciproque entre l’angoisse et le désir sous une forme masquée qui fait la fonction leurrante du désir. Toujours est-il que Petit(a) - ce qui manque - est non spéculaire : il n’est pas saisissable dans l’image et s’oppose de ce fait à l’objet voix tel qu’il a tenté de nous le faire saisir à travers l’instrument du shofar. Qui si j’ai bien compris ouvre une autre voie à l’origine, à la cause du désir, que celle communément admise dans l’interdit du meurtre du père. Une dernière association : Moïse était bègue, ce qui n’est pas inintéressant pour un porte-parole de Dieu qui lui se révèle à son peuple, sans parole dans le mugissement d’une corne de bélier
Leçon 20 Idelette Cretegny
Leçon 21 Marie Christine Salomon Clisson
Après de nombreux tours et détours jusqu’à tourner bourrique, je choisis de reprendre au plus près la parole résonante de Lacan dans cette leçon. 1 – Le phallus constitue le champ de l’A comme manque, l’objet petit a du désir n’est pas fait pour la conjonction sexuelle. Nous ne pouvons pas aborder de front l’angoisse de castration, nous dit Lacan, sans en provoquer quelque écho. Il choisit de partir de l’union de l’homme et de la femme pour parler de ce qui devrait encore nous préoccuper. Si Jones a tourné autour du lieu de leur conjonction, le vagin, Lacan va s’y prendre autrement, en s’appuyant d’une part sur le texte hébreu de la genèse, et d’autre part sur les cercles d’Euler. Il constate que la zone où leurs désirs les portent à s’atteindre est vide : il n’y a pas ce médium que l’on pourrait supposer, à savoir le phallus. Cette zone est une zone d’aliénation. La proposition de Lacan est la suivante : pour l’homme, la femme devient petit a, le symbole de sa toute puissance, quant à la femme, elle ne pourra jouir du phallus que s’il n’est pas à la place de sa propre jouissance et il donne cet exemple de la femme qui veut se faire psychanalyser par le même psychanalyste que son mari afin de pouvoir partager son désir supposé. C’est l’angoisse qui va devenir la vérité de la sexualité, en apparaissant quand le flux du phallus disparaît. La castration (Imaginaire) va se substituer à cette vérité, bien qu’elle soit de l’ordre de l’illusion puisqu’il n’y a pas d’objet à castrer. Le phallus, n’est là que pour qu’il n’y ait pas d’angoisse et là où il est attendu comme sexuel, il apparait comme manque. Voilà comment phallus et angoisse sont en lien. (La difficulté réside dans le fait que Lacan ne précise pas de quelle castration il s’agit et reste flou sur l’utilisation du terme phallus, objet ou signifiant). Le phallus fonctionne comme instrument de puissance et non de toute puissance celle-ci n’étant qu’une défaut de la puissance. En effet, il n’a pas à être partout mais seulement là où il n’est pas en situation (en devenant signifiant, symbolique). La castration est une illusion de revendication, elle couvre l’angoisse et confond la jouissance avec les instruments de puissance. L’impuissance humaine c’est ce qui voue l’homme à ne pouvoir jouir que de son rapport au support + phi qui est une puissance trompeuse. Le terme d’homosexualité est le privilège du mâle en tant que ciment libidinal du lien. Elle ne se produit que dans sa communauté et est liée à l’échec sexuel dû à la castration. Quant à l’homosexualité féminine, elle a une importance culturelle et non pas sociale et porte sur la concurrence sexuelle. La toute puissance serait dans le champ de ceux qui n’ont pas le phallus et la vivacité du désir se produirait au niveau de l’amour uranien, amour idéaliste où le phallus se présente comme –phi. Pour les deux sexes, le phallus c’est ce que je désire et que je ne peux avoir que comme –phi. C’est ce moins (ce vide) dans le champ de la conjonction sexuelle qui est le médium en tant qu’il constitue le champ de l’Autre comme manque. Je n’y accède qu’à la condition de me faire disparaître en tant que « je » et de devenir petit a généralisé. Ce qui veut dire que le support du désir, l’objet petit a n’est pas fait pour l’union sexuelle, car il ne me spécifie que comme l’un et l’autre et non comme homme ou femme. Le champ de l’union sexuelle pose cette alternative, aussi bien pour l’homme que pour la femme : l’autre est soit le gd A, soit le phallus en tant que –phi, c’est donc un champ vide. Mais si je le positive, cela devient l’un ou l’autre qui peuvent se substituer à tout instant. 2 – Passage du désir à la jouissance à partir de la genèse du petit a. Ce qui importe à Lacan, c’est de saisir comment cette alternative du désir à la jouissance peut trouver son passage. Il fait l’hypothèse qu’il se ferait avant la constitution de leur antinomie. L’objet petit a incarne l’impasse de l’accès du désir à la Chose, pour qu’il puisse livrer un passage, nous devons revenir à son commencement qui implique la capture du désir dans l’espace spéculaire. Il y a un moment qui anticipe et conditionne ce qui se marque par l’échec sexuel de l’homme, c’est celui de la mise en jeu de la tension spéculaire qui érotise le champ de l’insight. Chez le singe, la vision suffit pour qu’il atteigne l’objet repéré. Il ne parle pas mais surtout il n’y a pas d’injection libidinale dans le champ de sa connaissance puisqu’il n’en passe pas par le stade du miroir où l’œil est occulté. Mais si c’est bien l’œil qui institue notre rapport au désirable, il nous fait simultanément méconnaître que dans notre rapport à l’autre, il y a un désirant. Et c’est quand le désirable se montre désirant que le phénomène d’Unheimlich se produit. L’hypothèse structurante de Lacan quant à la genèse du petit a, c’est qu’il nait ailleurs et avant cette capture. Notre praxis se situe dans le champ du désir qui s’engendre du rapport du Sujet à l’Autre, mais elle introduit un reste dans l’acte de symbolisation (la division subjective) en trois temps : un sujet encore inconnu, qui doit se constituer dans l’Autre, avec un reste prévu qui indique bien qu’il n’y a pas d’alternative exclusive, le Sujet ou l’Autre, mais un sujet barré et le petit a. Et Il ne s’agit pas d’une mise en communication par les signifiants mais d’une opération plus complexe. A l’origine, le sujet n’a rien à communiquer car les instruments de la communication sont dans le champ de l’A. Il a, nous avait-t-il dit, à recevoir de l’A son propre message. Lacan apporte une nouveauté dans cette opération : la première émergence du Sujet se ferait avec une question inconsciente, donc informulable : « qui suis-je ? ». Question à laquelle l’Autre répond (avec le langage et sous une forme vocale) en anticipant et en inversant le message, avec cette injonction : « Tu es », sous une forme interrompue. Il n’y a pas d’attribut mais l’affirmation d’une existence. Ce message a une forme puisque le langage existe dans le réel et que beaucoup de choses sont déjà réglées dans le langage pour le Sujet. L’hypothèse ne suffit pas à fonder notre praxis, il y faut le jeu autonome de la parole, ce que Lacan relève, ce savoir des mères de très jeunes enfants : l’enfant monologue. Il prend appui sur les « monologues primordiaux » de Jakobson qui nous permettent de nous déplacer dans le champ de l’existence. Il commence par Piaget et son « langage égocentrique » dont la dénomination peut prêter aux malentendus. Ce langage est fait de monologues à haute voix, utilisés par de jeunes enfants (3/5 ans) en présence d’autres enfants, lors d’une activité commune, où ils s’adressent à eux-mêmes et où le sujet de l’énoncé est souvent élidé. Si Lacan fait ce rappel c’est pour parler de la spécification des monologues hypnopompiques de Jakobson, plus primitifs, qui apparaissent dès l’acquisition de quelques mots et ne se produisent jamais en présence d’un autre. Pour Lacan, ils révèlent la précocité des tensions premières de l’inconscient et fait une analogie avec les rêves où tout se passe sur une autre scène. Il nous ouvre une porte avec le petit a sous forme de reste, en tant que dépôt de la voix sur la bande du magnétophone et c’est bien avec la prise en compte de cet objet Voix, détachée de son support, que nous pourrons avancer dans l’élaboration de la constitution du Sujet de l’inconscient (du désir). En effet, le sujet reçoit de l’Autre le langage, le plus souvent sous forme vocale bien qu’il en existe d’autres formes. Nous pourrions dire que la forme vibratoire en serait la forme universelle. En effet, le langage, en soit, n’est pas vocalisation, mais il est lié à une sonorité de façon prépondérante, sonorité qu’il qualifie d’instrumentale puisque c’est l’appareil qui résonne. Il va donc nous parler de l’oreille, appareil récepteur, qui va produir un phénomène de résonance à sa fréquence propre. C’est un résonateur de type tuyau, comme la flute ou l’orgue, où la vibration du souffle sera liée à la longueur de l’espace parcouru dans un lieu clos. Il s’agit d’un tuyau à touche où l’air va venir buter sur la membrane tympanique produisant un mouvementent ondulatoire engendrant une vibration qui fera advenir une résonance, un son. (En ce qui concerne les sourds, la reconnaissance des sons se fera par la réception des vibrations à l’intérieur du corps devenant caisse de résonnance). 3 - L’objet voix fonctionne réellement comme médiation. Lacan nous propose un montage imaginaire, pour rendre compte de la constitution du sujet, à partir du vide de la structure de l’Autre pour créer son propre vide. Comme pour le pot, chacun est singulier, mais le vide est de même nature pour tous. Le vide commande à tout ce qui peut venir résonner dans un tuyau acoustique, à savoir un souffle. C’est l’instrument (Lacan prend l’exemple de la flûte), qui va imposer au souffle, en fonction de ses ouvertures, une même vibration. Et c’est là que s’indique pour Lacan quelque chose où le petit « a » (le souffle, la voix) fonctionne réellement comme médiation. Tout cela n’a d’intérêt que de métaphore : la voix a toute son importance non pas de résonner dans un vide spatial, mais de mettre en mouvement sa fonction phatique, d’aliénation, en résonnant dans le vide de l’A comme tel, l’ex nihilo à proprement parler, nous dit-il. Elle répond en tant qu’elle vibre à ce qui se dit, mais ne peut pas répondre. Pour qu’elle puisse répondre, elle doit incorporer la voix de l’Autre comme l’altérité de ce qui ce dit. La structure de ce grand A est constituée d’un certain vide qui rend compte de son manque de garantie.
La vérité entre dans le monde avec le signifiant qui représente le sujet pour un autre signifiant et n’a d’autre fondement que la parole qui exige le lieu de l’A. Elle ne peut advenir que de la division du sujet, celui de l’énoncé et celui de l’énonciation. Elle est la reconnaissance du réel, donc étrangère. Cette vérité s’éprouve et se renvoie par ses échos dans le réel grâce à la pulsion (ici invocante), que Lacan écrit S barré poinçon de Demande ( qui est une formule sans objet), et qui est un passage obligé pour la constitution de l’objet du désir (S barré poinçon de petit a). C’est dans le vide que la voix aphonique, donc non modulée mais articulée, résonne. Il s’agit de la voix impérative, la voix du Surmoi, qui se situe par rapport à la parole et non par rapport à la musique.
Pourrait-on distinguer une méconnaissance de la voix parlée d’une méconnaissance avec la voix chantée ? Question en suspens. (Cette dernière pourrait nous sembler plus familière car nous avons à la transformer pour donner forme aux sons. Mais elle peut nous étonner).
3 - Identification par incorporation. Lacan va aborder cette forme d’identification relative à la voix, ce premier modèle apporté par Freud, différente des autres et appelée incorporation. Il cite Isakower pour nous permettre de saisir en quoi elle consiste, même si cela semble bien éloigné de la constitution du Surmoi. Il part de l’observation d’une crevette qui introduit dans son appareil stato-acoustique, des grains de sable qu’elle ne produit pas elle-même mais qui sont indispensables à son équilibration. Elle fait entrer à l’intérieur d’elle un matériau étranger. Vous remarquerez qu’il s’agit d’une union ou les deux éléments restent distincts, séparés, ce qui est bien différent dans l’assimilation où il s’agit de rendre l’autre élément semblable à soi et où il n’y a plus ni union ni séparation. Je reviens à la voix du gd A barré, qui doit être incorporée par le sujet, que Lacan qualifiera « d’extime », où ce qui vient de l’extérieur va devenir le plus intime par ce processus double d’aliénation/séparation, qu’il développera dans « les quatre concepts de la psychanalyse ». Ce qui permet d’articuler le signifiant au corps c’est l’objet Voix. Elle est permet le passage de la Jouissance au désir. 4 - Résolution de l’angoisse Lacan revient sur le shofar pour mettre en évidence sa fonction de pare angoisse. Il est à un instant tout musical et devient substitut de la parole nous faisant entendre autre chose. Le son du schofar est constitué d’un intervalle de quinte arrachant notre oreille aux harmonies coutumières. En effet, il nous fait entendre un intervalle, c’est à dire un son engendré à partir d’un espace vide où vient résonner un son issu de deux notes, celle qui donnera le ton, la tonique, et celle qui invitera à la modulation, la dominante. S’il peut donner une forme à l’angoisse c’est seulement après que le désir de l’A ait pris une forme de commandement. La fonction du Shofar est de permettre à L’angoisse de se résoudre en culpabilité ou en pardon, ce qui nous introduit à un autre ordre, celui du Surmoi. Si quelque chose fait défaut dans le désir, cela explique la naissance de la culpabilité et de son rapport à l’angoisse en retournant ce défaut, cette faute sur soi-même. Qu’est-ce donc qui, dans le shofar s’articule de l’Autre pour couvrir l’angoisse ? C’est le désir de l’Autre. Conclusion. Dans la leçon suivante, il nous parlera du sacrifice, essentiellement destiné à la capture de du désir de l’A. Notre expérience commune nous montre bien que nous ne cessons d’offrir à je ne sais quelle divinité, le sacrifice de petites mutilations que nous nous imposons au champ de nos désirs. Cela se rapporte à ce petit a, objet du désir mais il y a quelque chose de plus quand ce petit a reprend sa forme originelle, ce qui se passe dans le sacrifice. A l’origine, les hommes avaient affaire avec des personnes du réel, à des dieux puissants, et ils se posaient la question : « que désirent-ils ? ». Le sacrifice, c’est faire comme s’ils désiraient de la même façon que nous. Nous aurions à leur offrir qu’ils désirent pour qu’ils ne se mettent pas en colère, c’est à dire qu’ils ne soient pas angoissés. Nous pouvons faire un lien avec la clinique : ces Dieux réels représentés par les parents où l’enfant se pose la question de savoir ce qu’il pourrait leur offrir pour qu’ils ne soient pas angoissés. Que devrait-il sacrifier pour cela ? Lacan termine cette leçon sur la question : pourquoi les victimes (celles qu’on devraient sacrifier) doivent-elles être sans tache ? Il répond : pour que n’apparaisse pas l’œil, je dirais le mauvais œil, avec l’angoisse qui s’y rapporte. Nous sommes donc amenés à apprivoiser le grand A dans le piège du désir. Quelques réflexions en prime… Cette leçon ouvre la voie à l’élaboration du processus d’aliénation/séparation. Elle met en évidence la liaison du S barré du désir avec le S barré de la pulsion, en y faisant jouer le petit a, objet du désir et la Demande, là où commence le petit a en tant que Voix en tant qu’écho d’un dire dans le corps qui concerne le désir de l’A. Elle nous permet d’entendre la liaison de la jouissance avec le désir par le biais de la pulsion ainsi que la constitution du corps par incorporation de la voix. Elle ouvre sur les propositions ultérieures concernant l’interprétation, avec la prise en compte de la phonation dans le dire de l’énonciation. Extraits de l’article de M-C Laznik : « Pour une théorie lacanienne des pulsions » : « La pulsion est un concept qui articule le signifiant et le corps. La construction du corps implique une image totalisante i(a) où le regard de l’A joue une part importante ». « La psychanalyse ne touche à la sexualité que sous la forme de la pulsion, elle se manifeste dans le défilé du signifiant où se constitue la dialectique du sujet dans le double temps de l’aliénation/séparation. C’est le troisième temps, le bouclage, qui instaure l’aliénation dans sa dimension réelle. Ich se fait objet pour un nouveau sujet en s’y assujettissant, ce nouveau sujet n’étant pas Ich mais l’autre dans sa dimension réelle qui vient se nouer à la dimension symbolique du fait que quand je parle, c’est par les signifiants de l’A. L’assujettissement à cet autre, sujet de la pulsion tend à donner à Ich un corps avec un nouage possible par la dimension imaginaire de l’aliénation qui implique la constitution du moi dans l’image spéculaire ». « Le lien du gd A au petit a : Dans l’Angoisse, l’A réel (primordial) a un double rôle. Le sujet ne peut être sujet que d’être assujettissement au champ de l’A, ce qui fait que la pulsion est chargée d’aller quêter quelque chose qui à chaque fois répond dans l’A. Il y a un redoublement du surgissement du sujet de l’incs au champ de l’A, dans son lien au signifiant avec le surgissement dans son lien avec l’A réel qui apparaît à la fois en tant que petit a et gd A. C’est cela qui va permettre à Lacan de distinguer désir et jouissance. Ce qui apparaît dans le graphe : en bas à D il y a l’A, trésor des signifiants et en ht à G : le signifiant de la jouissance de l’A : S(A) barré. Extraits de l’article de Jean-Michel Vivès : « La voix de père en fils. Une lecture reikienne de l’articulation du Surmoi et de la culpabilité. » Ce n’est pas le son du Shofar qui réveille le sentiment de culpabilité mais c’est la culpabilité qui amène à jouer du Shofar. La loi portée par la voix est pacifiante et fait taire la voix du Surmoi. Elle rappelle à Dieu qu’il est le porteur du pacte S. Il y a deux dimensions dans ce son : le mugissement du père de la jouissance mourant et le don de la loi. Pour Reik, c’est la voix même qui transmet la loi. Le Shofar articule continu et discontinu qui est le moment où la voix intérieure devient extérieure. Avec le récit du fils de Reik : « la voix intérieure n’arrive pas à la voix extérieure, sauf quand on en parle.
La première page de cette leçon nous précise les coordonnées de l'angoisse , en rapport avec l'avènement de a. Il existe une béance entre le sujet et le grand Autre, le sujet est dépendant du désir de l'Autre,mais a est la cause du désir du sujet, reste de l'incomplétude de la fonction signifiante . Lacan nous rappelle que c'est le symtôme qui a permis la recherche analytique . Il lui semble que le symptôme obsessionel est priviligieé pour appréhender la fonction de petit a comme cause ; Car le symtôme pour l'obsessionnel ne devient symtôme seulement quand il peut penser qu'il doit y avoir une cause à toutes ses pratiques, vérifications, pensées, doutes, « il doit bien y avoir une cause à tout ça . « Le symptôme n'est constitué que quand le sujet s'en apperçoit » S'il ne va pas au bout de ses pensées, il angoisse. C'est ce que rate Piaget dans ces observations car il ne tient pas compte que pour les enfants, le robinet est apprehendé aussi comme cause . Pour les enfants, la fonction de cause est là. Cause comme antécédente au sujet, l'angoisse git dans la béance entre cette perte chue de la fonction signifiante qui cause le sujet, effet des signifiants ;
Meme un être libre comme Alcibiade peut meconnaitre l'objet de son amour , par le transfert qu'il fait sur Socrate à qui il prête le recel de l'agalma. Alcibiade veut le désir de l'Autre ? Lacan nous amène à nous interroger sur la névrose de transfert . Pourquoi dit il qu'on entre en analyse malgré la névrose de transfert ? Il me semblait au contraire que le transfert permettait l'analyse ? Est ce que le transfert et la névrose de transfert ce n'est pas la même chose ? Pour lacan, si l'on veut éviter de sortir de l'analyse par la névrose de transfert, il faut suivre la voie de petit a , et donc pas celle de l'idéal du moi, en tout cas pas celle de l'idéal du moi de l'analyste. Y aurait il un idéal du moi d'entréé en analyse différent de l'idéal du moi de sortie ? Deux identifications différentes ? Pour C fierens , l'idéal du moi de sortie d'analyse, est un ciel vide . Le sujet supposé savoir d'entrée d'analyse doit chuté pour laisser l'objet a cause du désir emmerger. Ainsi Lacan rappelle la nécessité de questionner le désir de l'analyste. L'analyste ne peut in fine remplir le ciel vide de l'identification à l'idéal du moi contrairement à ce qui était proposé à l'époque . Il s'agit de l'éthique transcendantale de Lacan ; Claude Landmann nous a donné à entendre cette ethique dans son commentaire de la leçon 23. Mr Landmann nous a rappelé le contexte de ce séminaire qui rendait particulierement sensible Lacan à la névrose obsséssionnelle et comment Lacan, sans haine ,malgré les évenements, dans son enseignement se saisit des dits evenements pour sa transmission.
En reprenant le travail de Piaget , Lacan distingue la comprehension de l'entendement, une parole qui serait faite pour communiquer et une parole qui serait faite pour être entendue. La névrose de transfert d'entrée en analyse serait un transfert avec comme support le moi idéal et celle de sortie avec celui de l'idéal du moi . Nous retrouvons la dynamique du schema L, celui ci serait -il l'écriture topologique de l'éthique transcendantale de Lacan ? Moi idéal sur l'axe aa' et idéal du moi sur axe AS. Piaget pense la parole comme permettant la communication et le mythe comme étant à expliquer faire comprendre . Il se retrouve avec des « reproducteurs » qui au lieu de reproduire les explications que Piaget leur a transmis , cherchent à se faire entendre . Il n'hesite pas à dire que nous retrouvons là une « méchanceté pédagogique » que j'entend comme une pédagogie visant à se passer du sujet entendant dans l'enfant ; Lacan au cours d'autres leçons précédentes avait ainsi distinguer je crois professeur et maitres . Malgré ce cadre imposé par Piaget à la parole, subsiste pour l'enfant la supposition de cause et le robinet comme devant se fermer. Page 332 »l'effet du robinet comme étant quelque chose qui se ferme, et le résultat à savoir que grâce à un robinet, on peut remplir une cuvette sans qu'elle déborde , le jaillissement comme tel de la dimension du robinet comme cause » Le robinet illustre aussi bien la cause que la dimension phallique . C'est à dire qu'il peut nous faire entendre la nécessité de contenir les pulsions, qu'elles ne débordent pas le sujet , qu'elles ne soient pas agissantes en continu ; le robinet comme possibilité de fermeture intervient à ces deux niveaux . L'enfant avec l'expérience de piaget à a faire avec ces dimensions que semble méconnaitre Piaget
Le robinet c'est le phallus qui est fait pour fermer l'ensemble côté homme . Ce qui n'est pas sans rappeler les nécéssités de hans, pour pallier à la carence de la fonction paternelle. Le shema L est ainsi ouverture ou fermeture . La bonne forme du moi idéal, ferme l'accés à l'ouverture permise par AS Le sujet au cours d'une analyse dans l'ethique de lacan me semble t-il pourait faire un parcours allant du moi idéal comme identification au phallus imaginaire de la mére ? Au moins phi phallus symbolique , signifiant du manque de signifiant , signifiant sans signifié. Je suis tentée ici de reprendre des notions étudiées avec l'identification qui ne sont pas encore claires pour moi . L'identification au phallus imaginaire est elle ce que Freud a nommer l'identification hystérique ? L'identification au phallus symbolique l'identification au trait unaire ? La premiére correspondant aux deux tores enlacés et à une pratique de l'interprétation par l'équivoque, la deuxiéme une pratique par la coupure et le hors sens, vidage de l'imaginaire. L'incorporation du père, première identification pour Freud, étant ce qui permet le sujet parlé parlêtre . Et petit a dans tout cela ? Qu'en serait il de l'angoisse ? C'est à suivre petit a par les manifestations d'angoisse que Lacan nous invite dans son éthique. Car en effet la pulsion scopique gràce au miroir est celle qui protège le mieux le sujet de l'angoisse , tant la bonne forme du moi idéal occulte petit a, cet objet qui en se détachant du sujet, objet oral, en se separant de A, objet anal, en se perdant archaiquement objet voix est cause du désir du sujet . Voir schemas euleriens Lacan détaillera tout cela dans les leçons suivantes . Ici il tient surtout à nous sensibiliser à la fonction de la cause pour la détacher de l'adequation une cause un effet .
Dans notre champ, le symptome est le résultat de la cause et l'effet le désir , dans le procéssus de la constitution du sujet au lieu de l'Autre. Le désir nous dit Lacan en tant qu'effet non effectué, manque d'effet ; Ce qui anime la cause du désir c'est sa béance effective page 333 »c'est justement, s'il ne sait pas ce qu'il dit , qu'il est très important de noter qu'il le dit tout de mê me, ce qu'il saura ou ne saura pas plus tard , à savoir les éléments du complexe d'oedipe »
que veut dire Lacan page 335 avec le rapport inverse ? Le sujet affronte plusieurs manques dans son « ontologie » que lacan appellera plus tard « hontologie » , lacan nous donne ici une autre façon d'entendre son tableau frustration privation castration ; Le manque en lui même, avec l'objet oral, nécéssité par le besoin dans l'Autre, sa dépendance à l'Autre . Le manque dans la demande dans l'Autre, avec l'objet anal comme reste de cette demande sur laquelle le sujet peut intervenir, d'ou le sujet divisé dans le schema page 334 Lacan ne semble vouloir considerer le manque qu'au niveau de la jouissance dans l'Autre , ce qui introduit l'angoisse de castration , la sexualité par le moins phi ; Pour le scopique il s'agit pour Lacan de la puissance dans l'Autre , mirage de puissance, support du fantasme Reprendre les deux citations du haut de page 335
ce qui expose le plus à l'angoisse c'est le désir dans l'Autre « pour couvrir le désir dans l'Autre l'obsséssionel à recours à sa demande. » Pour C Landmann et surement Lacan Piaget est un obsessionnel. Page 336 Lacan nous dit comment structurellement c'est dans la mesure ou l'obsessionnel a refoulé le désir dans l'Autre, qu'il a recours à sa demande , son autorisation , que l'excrément objet demandé est privilegié pour lui . La dernière phrase est plus enigmatique pour moi . Le trajet de cette leçon en passant par l'impasse de la comprehension ou communication , par le privilège de l'objet anal pour l'obséssionnel , par les impasses de sortie de l'analyse par la névrose de tranfert , nous conduisent à la fonction de petit a comme objet cause du désir . Pas sans interroger à nouveau l'ethique du désir de l'analyste . Cette leçon me semble faire nouage entre ethique identification et angoisse . Angoisse comme repere pour la conduite de l'analyste, dans la cure, en suivant les occurrences de petit a . L'identifiacation comme reperage de l'image spéculaire, des mouvements entre moi idéal et idéal du moi ; L'éthique comme s'attachant à suivre ces repères, pour permettre à un sujet de ne pas ceder sur son désir, de supporter le manque , et à l'analyste d'être en place de semblant d'objet a cause du désir , de pouvoir supporter comme le fait lacan dans ce contexte cette place .
Leçon 23 Elisabeth de Franceschi
Leçon 24 Alain Harly
Leçon 25 Jean-Jacques Lepitre
Conclusion de l’année. C’est son annonce. Une remarque non développée sur l’importance de la fonction de l’angoisse et notre rôle d’analystes. Retour à ce que Freud la considérait comme un signal de danger vital. Ce danger, il l’a situé en ce qu’il est lié au moment où est produit a, où il va se constituer. Mais alors logiquement, si là est le danger, et l’angoisse signal de ce danger, elle doit être avant, avant la cession de a. Alors d’où vient-elle ? L’angoisse se rapporte au désir de l’Autre, de ne pas savoir quel objet a le sujet est pour cet Autre. Mais cela ne prend son plein sens qu’au 4ème niveau, stade scopique, où se constitue le sujet dans sa relation à l’Autre [ à accentuer, se constitue pleinement, y compris dans sa dimension imaginaire, car la relation à l’Autre et le sujet comme agent minimum existent dès avant, il y a dans son raisonnement une dimension logique, presque un biais ]. L’angoisse est donc liée à l’ignorance de ce que je suis pour le désir de l’Autre [ça marche à fond dans les séances, cf aussi les réactions à l’allongeade]. Mais ceci est une fable reposant sur l’hypothèse d’un Autre radicalement étranger [mante religieuse, mais aussi ce semblable hegelien]. Or l’autre humain est un semblable, ce qui reste dans l’ignorance c’est a. [Celui du sujet, de l’Autre, des deux ?] C’est pourquoi, dit-il, c’est à ce 4ème niveau que la structure du désir est la plus aliénée, l’objet a le plus masqué, le sujet le moins angoissé. Ce moins d’angoisse, ce masquage de a, demandent à ce qu’on cherche leurs traces, ainsi que de l’Autre, à d’autres niveaux où ils apparaitraient plus clairement. Au niveau oral, la réalité de l’Autre est présentifiée par la détresse originelle du nourrisson. Ce n’est qu’au second temps, anal, que la demande de l’Autre permet d’articuler la constitution de a en rapport avec la chaîne signifiante dont l’Autre est le lieu [à nouveau donc demande de l’Autre et pas désir de retenir]. Mais déjà au niveau oral, il veut pointer que l’angoisse apparaît avant même toute demande de l’Autre, comme effet d’une cession, et il prend l’exemple du cri, et comme rapport à l’Autre, qui, précise t-il s’achève dans le prochain, (c’est-à-dire le semblable). Ce cri premier, celui de la naissance, a donné lieu à nombre de spéculations psychanalytiques que bien sûr il critique dont celle de Ferenczi, « Thalassa », qu’il reprend pourtant mais à l’envers : ce n’est pas de quitter le liquide originaire qui est angoissant mais d’être intrusé par l’atmosphère, l’aérien, pour le nouveau-né comme pour les animaux qui sont passés d’un habitat liquide à un habitat aérien. C’est donc l’intrusion dans le corps de l’environnement, ce dont les poumons seraient le témoignage, donc de l’Autre selon une leçon précédente, en quoi consisterait le traumatisme de la naissance. Comment passer de ce moment au sevrage ? On peut se demander pourquoi, puisque cela semble hétérogène ? Ce n’est pas clair en effet dit-il. Pour s’en sortir, il inverse la proposition : le sevrage n’est pas l’angoisse de la séparation d’avec l’Autre, c’est l’enfant qui a un désir de sevrage. Il en donne pour preuves que l’enfant puisse jouer avec le sein ou l’existence de l’anorexie du nourrisson, et que le lien à l’Autre n’est pas un lien plein, l’objet appartenant au nourrisson. [on peut s’interroger, qu’il puisse avoir désir de sevrage, ok, mais il n’empêche qu’aussi l’Autre puisse arracher cet objet de la bouche, ou le rendre totalement angoissant, sein, tétine, objet transitionnel, la clinique le montre aussi.]. Avec l’objet anal l’articulation de la fonction de l’objet a est plus claire, il se trouve dans le rapport à l’Autre être le premier support de la subjectivation. Ce par quoi le sujet est requis par l’Autre à se manifester comme tel, comme sujet. [parce qu’il doit être agent, agent de son don, sa volonté d’agent est matérialisée dans ce reste, irréductible à la dimension symbolique, (avant toute symbolisation : la caca, la pas beau) et donc réel, et par là lui-même y est matérialisé, cf l’être pur, croisement du symbolique et du réel). C’est cet objet anal, qui est cause, qui va identifier le sujet au désir de retenir et qui apparente le désir à l’inhibition. Le désir apparait s’opposant à l’acte, déféquer, à la fonction qui introduit l’objet a, son existence. Cet objet était déjà là, par la fonction, dès l’origine, mais est introduit, [faut-il dire comme objet a, peut-être bien], par la demande, mais aussi comme déjà produit pas l’angoisse [faire dans son froque ! mais il le fait remonter à la naissance ou presque, cf ses considérations sur l’homme aux loups ?]. L’important dans l’affaire n’est pas la progressive autonomie acquise du sujet, ni que ce soit un objet en soi, mais que ce soit un objet cessible. Il en écrit une formule, dont l’explication n’est pas claire : a <> D, la demande, mais alors celle de l’Autre, égalée à l’angoisse, par transformation deviendrait S<>a, [qu’il y ait un lien entre angoisse, demande de l’Autre, objet et fantasme, sûrement, mais là l’explication est mystérieuse]. L’angoisse est cachée dans, sous l’ambivalence de l’obsessionnel qui ne se réduit pas à être mue par l’agressivité comme souvent on l’aborde [Freud ?]. Cette ambivalence, c’est celle de l’objet qui le fait valoir mais qui n’est aussi que déjection. Cette oscillation de l’un à l’autre peut comporter le passage possible entre ces extrêmes en un point zéro où le sujet est à la merci de l’autre. C’est là qu’on retrouverait la possibilité de rivalité hegelienne de pur prestige, cohérente avec le fantasme de « cause en soi », d’être sa propre cause, et le pur prestige, apparait comme un pour rien, une gratuité, une « vanité ». [Ce lien du point zéro avec la rivalité hégelienne me reste opaque]. Il ajoute, affirmatif, mais bien rapide, que faire tourner la cure de l’obsessionnel autour de l’agressivité c’est courber le désir du patient au désir de l’analyste, considérant que celui-ci serait l’idéal obtenu par rapport à la réalité sans tenir compte de a. [c’est dit mais pas expliqué]. Ce petit a, cause du désir, n’est pas vanité, ni déchet, même si c’est une crotte, il est défini comme a, reste d’être irréductible à la symbolisation au lieu de l’Autre. Passage un peu lyrique- Petit a est l’unique de l’existence car dans ce reste s’enracine le désir qui arrivera à culminer dans l’existence et son irréductabilité sera cela où chacun reconnaîtra le niveau où il s’est haussé au lieu de l’Autre dans un dialogue qui se joue sur une scène où le désir monte et y retombe sous forme de tragédie ou, le plus souvent, de comédie. Désir donc qui s’y joue comme un rôle mais dont l’important, au-delà du rôle, est le reste précaire, car ce reste, c’est moi, le sujet, comme objet, comme tel, cessible, et plus encore aujourd’hui, objet d’échange. [sujet identifié à l’objet a]. Cet objet est ce qui me fait désirant, d’un manque, non du sujet, mais de la jouissance au niveau de l’Autre. [Il semble que la jouissance, l’échange, ce qui précède donc renvoie à l’objet anal]. Après cela, il revient au niveau sexuel où petit a ne se réfère qu’à cette béance qui sépare le désir du lieu de la jouissance [cela m’est toujours opaque : je ne vois pas pourquoi le désir et le lieu de la jouissance, qui est forcément corporel, pourraient, devraient se confondre ?]. Le désir ne peut qu’aller à sa rencontre. [Ben oui ! Si je désire X, c’est que je n’en jouis pas et si j’en jouis, je le désire plus ? (pourquoi dire sur un ton de révélation prophétique des évidences ? « Pour attendre la pluie, il nous faut d’abord attendre les nuages »]. Le désir pour atteindre la jouissance doit d’abord franchir le fantasme qui le construit. La butée de l’angoisse de castration pourquoi ne pas l’appeler désir de castration ? [il adore les paradoxes] puisque ce manque central qui disjoint désir et jouissance, c’est l’angoisse de la non reconnaissance dans le désir de l’Autre. [ je pourrais désirer cette non reconnaissance ou au contraire désirer être reconnu ? Bizarre ?] L’Autre, quel qu’il soit, est le châtreur. [donc son paradoxe ne tient pas]. Pour l’homme et pour la femme les positions sont différentes. Pour elle, c’est plus confortable, c’est déjà fait. Et là, nouveau paradoxe, il cite Kirkegaard : « la femme est plus angoissée que l’homme », et dit qu’il a raison. Alors confortable ou angoissée ? Puisque l’angoisse s’origine de la relation à l’Autre, au désir de l’Autre, [cf les leçons précédentes]. L’angoisse au niveau de la castration représente l’Autre. Il trouve confirmation de cela dans Œdipe [et ce qui suit ne le confirme pas mais lui permet un développement suivant]. Œdipe illustrerait la castration assumée, désirée. Son problème ne serait pas le père [foin de la reconnaissance de l’Autre alors ?] Mais il est celui qui veut savoir, qui a la cupidité de savoir ce qu’il y a au-delà de la satisfaction de son désir, au-delà de l’interdit concernant la conjonction de a, ici -F, et de l’angoisse [donc du désir de l’Autre ? du père ?]. Il le paie de ses yeux, jetés au sol ! Est-ce là forcément le 4ème niveau, dramatique ! Non car le plus souvent c’est : « Ils ont des yeux pour ne pas voir ». Donc inutile de se les arracher. L’angoisse est méconnue dans la capture de l’image spéculaire i(a), on peut souhaiter qu’elle se reflète dans les yeux de l’autre, mais ce n’est même pas besoin puisqu’il y a le miroir [y compris le miroir des yeux de l’autre]. A propos de 4ème niveau il redessine sa matrice : {inhibition, désir de ne pas voir}, {émotion, méconnaissance}, {émoi, idéal du moi, ce qui est le plus facilement introjecté de l’Autre}, {empêchement, impuissance}, {symptôme, fantasme de toute puissance},{acting out, fonction du deuil dans son rapport par le manque à la structure du désir}, {passage à l’acte, fantasme de suicide}, {angoisse, l’angoisse masquée}, {l’embarras, le concept d’angoisse, la pensée de l’angoisse, Kirkegaard}. Rappel de la difficulté de Freud face à l’angoisse et au deuil comme deux manifestations de la perte de l’objet et pourtant tellement dissemblables. Il en profite pour faire un rappel d’Hamlet sur ce qu’une lecture d’emblée un peu attentive lui aurait montré quatre ans auparavant, mais peut-être mal éclairé par ses lectures, Reik et d’autres, que c’est l’effondrement de l’idéal résultant de la conduite de sa mère qui abrase tout désir chez Hamlet et que c’est le deuil du plus précieux de ses objets qui lui en redonne le chemin. Est-ce que ça éclaire la question du deuil qui embarrassait Freud ? Le problème du deuil est celui du maintien des liens où le désir est suspendu, non à l’objet a au 4ème niveau, mais à i(a) par quoi tout amour, dans sa dimension idéalisée, est narcissiquement structuré. C’est ce qui fait la différence avec la mélancolie et la manie. C’est pourquoi il faut distinguer ce qu’il en est de petit a et de i(a). dans le deuil, il y a un retour de la libido objectale sur le moi du sujet, cela échoue dans la mélancolie où c’est l’objet qui triomphe. Cet objet a est habituellement masqué derrière i(a), l’image narcissique. Le mélancolique doit donc passer à travers sa propre image, i(a), l’attaquant pour pouvoir atteindre cet objet a, qui le transcende et dont la chute le précipitera dans le vide, à travers la fenêtre bien souvent conformément à la structure du fantasme. Ce rapport à petit a, dans cette distinction de la mélancolie et de la manie, du cycle de l’idéal, tel que dans le deuil ou le désir, ne peut se saisir que dans la différence entre a et i(a). Petit a est une référence radicale, enracinante pour le sujet mais méconnue, aliénée dans le rapport narcissique. Pour conclure : Le désir à ce 4ème niveau est aliéné, fantasmatique, l’objet y est masqué. Au 5ème niveau, l’objet est aussi aliéné mais ouvertement comme support du désir de l’Autre. Ce qui se passe à ce 5ème niveau implique la dimension auditive bien sûr mais aussi la fonction paternelle. C’est autour des noms du père qu’il poursuivra l’année suivante. Le père intervient comme celui qui impose son désir à tous les autres dans le mythe, aussi bien freudien qu’autre : Jupiter, Dieu le père… Ce qui parait être une contradiction avec le fait qu’il permet la normalisation du désir dans les voies de la loi. Mais cela s’expliquerait de ce qu’il est celui qui sait à quel petit a se réfère son désir car ayant été assez loin dans la réalisation de son désir pour le réintégrer à sa cause, c’est-à-dire à l’irréductible de a. [le paternalisme de la sagesse des anciens, ils ont connu les chemins de la vie, etc… un autre mythe du père]. Tout humain est fini articulé à des désirs finis. L’objet a est notre existence la plus radicale, la seule voie où le désir puisse nous livrer ce en quoi nous avons à nous reconnaître. [des accents presque messianiques]. Cet objet est à situer au champ de l’Autre, pour tous, et c’est cela qui donne la possibilité du transfert. Il y aurait surmontement de l’angoisse quand l’Autre se nomme [c’est-à-dire ? se dévoile peut-être ? il n’en dit pas plus : ça ne doit pas se limiter à un « allo, c’est ta maman »]. Une psychanalyse est une aventure unique d’être la recherche de cette agalma au champ de l’Autre [Superbe définition ! voilà ce qui pourrait, en le formulant de façon moins spécialisée, faire un slogan publicitaire ! De plus on y entend bien que le transfert c’est A+a] Et le désir de l’analyste dans tout ça ? L’analyste serait, devrait être celui, celle, qui a pu, si peu que ce soit, assez faire rentrer son désir dans ce petit a irréductible, offrant à la question du concept de l’angoisse une garantie réelle. [la 2ème partie de la phrase : la garantie réelle du concept de l’angoisse me reste opaque ? A moins que de refaire le circuit désir, a, cession de a, Autre, angoisse.] Vidéo de l'après-midi