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Vieillir, parlons-en

Conférence EPCO à Poitiers le 3 décembre 2022
Véronique Ballu Vernet


Je vais vous parler de la vieillesse, partager quelques réflexions avec vous qui ont été nourries par mon expérience de 22 ans en Ehpad en tant que psychologue clinicienne et psychanalyste et par l'expérience que j'ai de l'accompagnement de la fin de vie.
Je vais aborder différents points sur ce que peut signifier le fait d'être vieux, sur le vieillir, à partir de situations rencontrées dans les différents lieux où j'exerce (réseau de soins palliatifs, Siad..) qui ont nourries mes questions.

Introduction
Victor Hugo pensait que l'un « des privilèges de la vieillesse, c'est d'avoir, outre son âge, tous les âges ».
Parler du privilège d'être vieux pourrait avoir des résonnances un peu inattendues, en tous cas pas très à la mode.
Il faut partir voyager en Afrique subsaharienne (Amadou Hampaté Ba) pour entendre de douces choses telle que « un vieillard qui meurt c'est une bibliothèque qui brûle ».
Or en occident vieillir ne me semble absolument pas valorisé, cela fait peur, l'image que nous en avons est entachée par l'idée qu'il faut tout mettre en ouvre pour lutter contre cet inéluctable.
Nous sommes plutôt aujourd'hui dans la perspective de ne pas paraître vieux, surtout ne pas faire vieux, (donc rester jeune, dans le secret espoir d'une jeunesse éternelle ?).
Certains ont des parades et choisissent des partenaires amoureux beaucoup plus jeunes.
Cela n'est pas si simple que de vieillir à son rythme, tandis que tout doit aller vite, tout doit être rentable, tout doit être performant à commencer par soi-même. Réussir la vieillesse n'est pas exempte de cette idée.
Demande-t-on la même chose aux enfants (réussir leur enfance) à qui on accorde de plus en plus un temps pour grandir ? Pas certain.
Pourquoi peine-t-on à maintenir une valeur symbolique à cette dernière partie de la vie qui ne se réduit pas à une forme d'improductivité liée à la perte d'un rôle voire d'un statut social ?
Autrement dit comment préserver un espace aux âgés pour qu'ils puissent rester partie prenante, cheminer à leur cadence (nous avons certainement à en apprendre sur la lenteur dont certains ont fait l'éloge) et selon leurs désirs vers la dernière tranche de leur vie, sans les destituer de leur statut d'adultes ?
Essayons de lever le voile sur cette dernière partie de la vie qui n'est pas une maladie (il n'y a pas d'âge pour tomber malade).
Comment accepter de vieillir alors que nous en semblons aujourd'hui effrayés ?
On a beau vouloir attraper et retenir le temps qui passe, ce n'est pourtant qu'un leurre. Conter l'histoire pour suspendre le temps de la fin, Schéhérazade en savait quelque chose, elle s'y est repris mille et une fois.

Nous connaissons tous la façon dont l'histoire se termine, même si nous nous protégeons tant bien que mal en tentant de maintenir à distance l'évidence : nous sommes mortels.

Cette course sans fin, nous savons qu'elle est vaine, on ne peut retenir le défilement des années. Il nous faut composer avec, quoi qu'il nous en coûte et nous ne nous en débrouillons pas tous de la même manière, loin s'en faut.

Quand devient-on vieux, voire quand devient-on trop vieux ? (film Plan 75. Au Japon, dans un futur proche, le vieillissement de la population s'accélère. Le gouvernement estime qu'à partir d'un certain âge, les seniors deviennent une charge inutile pour la société et met en place le programme « Plan 75 », qui propose un accompagnement logistique et financier pour mettre fin à leurs jours).

Ou pour reprendre le titre d'un ouvrage de R. Gary, y a-t-il une limite au-delà de laquelle notre ticket ne serait plus valable ?

Il est somme toute assez étrange de se donner un âge, d'articuler cette notion de date de naissance avec une réalité interne, comme si les chiffres peinaient à rendre compte de qui nous étions vraiment.
D'années en années, un écart se creuse entre ce que l'on ressent lorsque l'on prend de l'âge et une date de naissance qui marque un point de départ. Comme s'il avait la température ressentie et celle qu'affiche le thermomètre.
Cette donnée objective qu'est l'âge construit tout autant qu'elle peut donner du flottement : que dit mon âge sur qui je suis ?
Est-ce que si je dis mon âge, je parle de ce qui m'anime ? Pas sûr, cela précise un point sur la frise du temps mais je ne dis rien de moi, de qui j'ai été, de ce que je voudrais encore être, et même devenir. Cela ne dit rien sur la vivacité de ce que je peux désirer ni même espérer.

Être désigné vieux est bien différent que de se sentir vieux.
Le social a sa part quant aux représentations véhiculées, on peut rencontrer un écueil qui serait de réduire le sujet à un état attendu (Voilà ce qu'on attend, ce que l'on suppose de moi puisque j'ai tel âge) qui ne va pas forcément de pair avec l'ampleur d'un désir intact.

Ce dont je suis sûre est que se sentir vivant n'a pas d'âge.
Si l'on peut dans un premier temps se réjouir de ces années supplémentaires dont on pourrait profiter, pour autant : Vivre très vieux rime-t-il avec vivre heureux ?
Nous y reviendrons.

Au 1er janvier 2020, les personnes âgées d'au moins 65 ans représentaient 20,5 % de la population.
L'espérance de vie pour les femmes est de 85,3 ans et de 79,5 ans pour les hommes mais le covid a fait baisser ces chiffres de 1 an pour chaque sexe.
La durée de la vie qui s'allonge et son éventuelle cohorte de complications somato-psychiques contraint, celui qui le vit et son entourage, à faire face à de nouvelles perspectives, à envisager ce temps spécifique sous de nouveaux angles, notamment parfois sous celui de la dépendance. Et ce vieillissement-là n'est pas sans aspérités pour le sujet, pour ses proches et pour les soignants.

Arrêter le temps, nous en serions parfois gourmands, retenir ces bons moments, lutter contre cette déferlante qui s'égrène malgré tout.
Nous voudrions certainement, tel que l'a dit Lamartine que le temps suspende son vol pour nous laisser savourer les rapides délices.
Mais c'est un impossible sur lequel nous pouvons buter, sauf à « faire avec » ce réel.


Vieillir, c'est-à-dire ?
J'ai cherché quelques définitions.
Le mot vieux est attesté dès le 11ème siècle dans la langue française, le mot vieillissement ne s'impose à l'usage qu'au 18ème.
Le vieillissement vient du latin senex et vetus :
Senex renvoie à la sénescence d'où sénile avec un aspect péjoratif, adouci de nos jours par l'usage de sénior.
Vétus renvoie à la vétusté, à l'usure, à la vieillerie des choses.

Les dictionnaires mentionnent :
Fait de vieillir, d'avancer en âge, de s'affaiblir en perdant progressivement ses forces physiques ou morales, ses capacités intellectuelles. (Trésor de la Langue française)
Dans le Larousse : Fait de devenir vieux, ensemble des phénomènes qui marquent l'évolution d'un organisme vivant vers la mort. Affaiblissement naturel des facultés physiques et psychiques dû à l'âge.

Rien de bien réjouissant convenons-en !
Le vieillissement correspondrait à un ensemble des processus physiologiques et psychologiques qui modifient la structure et les fonctions de l'organisme, mais nous ne sommes pas qu'un organisme ! Peut-on réduire un sujet à son corps et à ses défaillances ?!

Ou encore dans le dictionnaire (Littré) : Le dernier âge de la vie, ou période de la vie humaine, dont on fixe le commencement à la soixantième année.
Mais 60 ans. ce n'est même plus l'âge de la retraite ! La ponctuation des rythmes du social comme le travail, n'est plus si évidente pour se repérer. On devient sénior dès 45 ans en entreprise, alors que certaines personnes resteront plus de 40 ans à la retraite.
Parmi les autres définitions, on peut s'amuser de la répartition des vieux : les jeunes vieux (65-75 ans), les vieux (75-85 ans) et les vieux vieux (au-delà de 85 ans).

Vieillir renvoie donc à des représentations où l'avancée en âge, s'avère sombre et associée à une vulnérabilité croissante.
D'emblée rien sur la richesse de l'expérience accumulée, sur une sagesse possiblement rencontrée, voire une certaine liberté éprouvée « enfin vieux » !
Seuls le vin et le fromage sauraient s'en bonifier.

Perception du temps

La définition que je vous propose est :
Vieillir c'est continuer à se situer sur l'axe d'un temps linéaire, ordonné dans le champ du symbolique (différence des générations) et nourri de l'imaginaire singulier.
Revenir à un point d'ancrage inaugural sur cette frise temporelle, est peut-être une des raisons pour lesquelles les anciens aiment tant parler « d'avant » de leur enfance, de leur jeunesse et qu'ils donnent l'impression de s'y replier ou de s'y réfugier.
Comme ce fameux « de mon temps, à mon époque », qui renvoie la personne à une antériorité qui ne s'entame pas du présent. Comme s'ils ne participaient plus à ce qui est à l'ouvre aujourd'hui.
Les enfants construisent la conjugaison de leur vie, ils s'écartent au fur et à mesure du présent pour donner de la marge à ce qu'il y a avant, et après.
Cette conjugaison prend d'autres couleurs quand on vieillit.
Cela ne devient pas si facile de supporter que si le passé bien que du côté de ce qui fonde, il est plus conséquent que le présent et qu'il ouvre sur l'espace d'un futur sans réelle surprise.

Plus on avance en âge et plus la perception de la durée, l'irréversibilité du temps et la proximité de la mort sont aiguës, à chacun de s'en défendre, au risque sinon d'affects d'allure mélancolique.
Ceci ouvre la part belle à l'inévitable sentiment de perte, des proches, de certaines aptitudes, du domicile quand il y a recours à une institution dans le grand âge.
Rien de simple.
Certains passages d'âge sont d'ailleurs qualifiés de crise.
Si on parle de la crise dite du milieu de la vie, dont l'âge se déplace au fil des décennies (on parlerait aujourd'hui plus de la crise de la cinquantaine que de celle de la quarantaine), ces temps ne résonnent certainement pas de la même façon que l'on soit une femme ou un homme.
Je recevais une femme de 50 ans il y a quelques jours à mon cabinet, dont la demande s'énonçait autour d'un réel du corps, celui de la ménopause. Elle disait être très angoissée, de se trouver à la fin d'un cycle (ne plus avoir de cycles). Elle était inquiète de ce qui allait lui arriver maintenant qu'elle se sentait vieille.
Il n'est pas si facile pour une femme même dans cette actualité féministe bien intéressante, de se défaire de cette collusion entre ne plus pouvoir donner la vie et rester en vie.
Cette plainte du côté du féminin quant à une impossible nouvelle maternité, n'a pas d'âge. Il m'est arrivé de l'entendre chez des femmes pourtant très âgées, qui n'avaient jamais pu renoncer.
Pour d'autres, devenir grand-mère pourra peut-être rejouer et déjouer cette confrontation à ce qui a été et qui n'est plus. Et ce parfois avec une agressivité pouvant éclairer les enjeux de ce changement de place.

L'âge se rythme à l'année (sauf pour les enfants pour qui on compte en mois) tel un tracé sur la ligne du temps, il ne peut rester figé, ni immobile. Il est en mouvement.
Dans cette dynamique il y a le corps.
Le corps qui change, qui évolue, qui se transforme, qui se signe de traces diverses, qui se montre bruyant, qui se manifeste, le corps sur lequel on n'a plus la même maîtrise, qui répond différemment à nos attentes.
Ce corps qui pouvait sembler familier qui devient étranger, presque hors de nous bien que nous ressentions la douleur « à l'intérieur ». Il est une sorte de montage qui s'actualise régulièrement.

Commencerait-on à se sentir vieux lorsque le corps se manifeste à nos dépends, presque à notre insu ?
Symptômes, douleurs nous font éprouver le réel de notre corps qui, quand il fonctionne bien, nous permet d'oublier qu'il est aussi constitué de matière, d'organes.
Il faut composer avec le corps, qui continue à être porteur d'informations sensorielles multiples, dont on ne peut méconnaître qu'elles peuvent encore résonner du côté du registre du plaisir.

Mais tous les vieillissements ne se valent pas.
Certains pourront tenir la dragée haute au nombre des années, ne cédant pas sur leur désir, faisant la nique à la fin avec panache, d'autres se verront impactés plus douloureusement.
La question de ne pas céder sur son désir peut grandement nous intéresser.

22 ans en Ehpad

Être accueilli en Ehpad signe une perte d'autonomie qui entraîne une dépendance. Pas vraiment a priori de quoi se réjouir !
Si les Ehpad se targuent d'être des lieux de vie, il est donc primordial d'accueillir comme il se doit celui qui vient s'y installer, à savoir avec déférence.
Il me semblait essentiel de soutenir une proposition visant à permettre une parole sur les enjeux de cette nouvelle étape et sur tout ce qui pouvait être nécessaire d'énoncer, voire d'élaborer dans ce temps de vie aigu.
Si un certain vieillissement peut générer des impasses, il serait bien dommage pour autant de ne considérer les anciens qu'à l'aune de leurs déficiences et de leurs manques.
Rien n'exclue qu'il soit encore et toujours temps d'en dire sur soi.
J'ai été extrêmement sensible à cette clinique auprès de patients âgés, très âgés même, pour lesquels la question du temps qu'il reste se posait voire s'imposait et la manière dont ils en disposaient.
Ce furent des rencontres singulières, parfois surprenantes, qui ont pu s'avérer malgré tout très joyeuses, (l'humour n'a pas d'âge) et se révéler d'une extrême profondeur.
Le vieillissement du corps ainsi que le sentiment de proximité avec la fin sont souvent premiers dans les propos de ces anciens, qui pointent la rencontre d'un réel, réel du corps, de la mort qui ne serait plus vraiment loin.
Mais aussi ce qu'il en est de s'adapter à un nouvel environnement spatial et relationnel, où comme maintes fois je l'ai entendu « Il n'y a que des vieux ici, ce n'est pas la vie ! ».
(Lieu concentrationnaire, effet miroir, antichambre de la mort)
Être contraint de résider en institution n'empêche pas d'avoir son mot à dire. (nous sommes d'accord que quasiment personne ne choisit d'aller en Ehpad même si on peut y consentir, ce ne sont plus les maisons de retraite de jadis).

On peut mentionner une certaine violence pour la vieille personne mais aussi pour sa famille (bcp de culpabilité), dans cette nouvelle étape. Pour les soignants également, en première ligne de cette prise en soin au plus près des troubles cognitifs et de corps dysfonctionnels.
Il y a bien sûr les pathologies neurodégénératives et leurs conséquences délétères.
Comme la maladie d'Alzheimer et autres pathologies apparentées, maladie du temps, de l'oubli qui nous invite à nous interroger sur la mémoire, sur les souvenirs, et sur la répétition. Dans une période où la réflexion peut sombrer sous le diktat d'un tout biologique, le neurologique ne peut pas rendre compte seul des avancées du temps pour un individu, et si la mémoire défaille, nous savons depuis Freud la richesse de l'attention à porter à ces dérobades en tant que manifestations possibles de l'inconscient.

Si certains vieux se répètent, pour autant, ils parlent encore.
Et j'ai été enseignée des méandres de la pensée de ces âgés avec lesquels j'ai travaillé.
J'en ai appris sur ce qui fait de nous des sujets, sur les turpitudes et aléas de trajets de vie chaotiques, sur les effets traumatiques de la guerre, sur une autre façon de vivre et de penser les choses, sur les avancées sociales, sur les rapports hommes femmes et les relations parents/enfants, sur l'imbrication entre des effets générationnels et la singularité des chemins empruntés.
J'ai accueilli les paroles parfois énoncées parfois de façon abrupte, désordonnée, déroutante, leur accordant toujours une valeur.
Il n'y a pas de petit ni de grand dire, seul l'agencement de ce qui se confie même avec ses ratés mérite la plus grande attention.
Parler, énoncer des mots qui s'organisent parfois en récit s'inscrit dans une transmission d'un savoir tout autant individuel que collectif.
J'ai voulu soutenir la possibilité que chacun soit écouté et entendu au-delà d'un langage bousculé et j'ai constaté qu'il n'était jamais trop tard.


Quand on est âgé, changer en restant soi-même peut buter sur l'écueil d'un clivage entre le dedans et le dehors, l'être et le paraître. Cette continuité subjective intérieure pourra être bousculée, laissant la place à un sentiment d'une discontinuité, doublé d'une fragilité identitaire et narcissique aux allures d'inquiétante étrangeté.
Une patiente évoquait souvent son image, elle disait « Vous voyez la vieille qui est en face de vous, et bien il paraît que c'est moi ».
Perception interne de soi qui s'écarte farouchement de ce qui est donné à voir.
Et c'est sans doute vrai pour elle comme pour tant d'autres. L'enveloppe raconte une somme d'années tandis que l'image interne reste vivace, agile, qui ne serait pas forcément raccord.
Ou bien cette autre femme :
Lucienne est une femme fine, élégante de 96 ans. Très en forme physiquement, grâce dit-elle à l'exercice physique qu'elle a toujours pratiqué tous les matins. Elle est encore autonome.
Ce qu'elle raconte des raisons de son arrivée à l'EHPAD est relativement banalisé : sa famille dit-elle, s'est inquiétée de certains troubles qu'elle présentait : elle avait des pertes de mémoire, elle perdait certaines choses, elle ne se sentait plus en sécurité. Elle reconnaît ses difficultés, mais pour elle, si parfois elle se met à vaciller de la sorte, c'est parce qu'on cherche à la déstabiliser, c'est parce qu'on veut lui faire croire, qu'elle est vieille.
Tout changement dans son corps, dans sa vie psychique ne peut venir que de la malveillance de quelqu'un. Elle ne trouve pas d'autre explication à ce qui peut constituer son vieillissement.
« On veut me déstabiliser », répète-t-elle souvent.
Alors, tout est interprété par elle à la lumière de cette malveillance haineuse et incessante à son égard : un problème intestinal est le signe d'un empoisonnement, un rayon lumineux dans sa chambre le matin (quasi présence divine) vient lui signifier qu'elle est surveillée. Si les mots viennent à manquer, c'est qu'on lui administre certainement une potion, si des poils au menton lui poussent c'est pour la perturber et lui donner à penser qu'elle serait vieille.

Ses relations aux soignants peuvent être complexes, elle est méfiante parfois agressive, elle ne comprend pas qu'on s'immisce dans son intimité, qu'on veuille s'occuper d'elle, qu'on touche son corps. Elle tente de donner du sens à ces interventions, mais ne peut que penser que l'on veut déstabiliser la femme qu'elle est.
Il lui est régulièrement fait des bilans sanguins. Bien que l'on puisse lui expliquer les raisons de ces prises de sang, elle ne veut rien entendre si ce n'est qu'on lui prend son sang, comme si elle était vampirisée.
Lors d'un de nos entretiens hebdomadaires, j'ouvrirai la question sur ce que le sang peut représenter pour une femme. Elle rira, émettant quasi un gloussement de coquetterie, et dira « oui c'était bon ».
Ecouter Lucienne, lui faire entendre l'équivoque de ces propos, l'amène à rire, transformant momentanément l'angoisse en souvenir de plaisirs.
Qu'en est-il d'être une femme ? Comment rester une femme toujours et encore, même à 96 ans ? Lucienne nous rappelle, si besoin en était, de ne pas évincer la dimension du désir dans le grand âge, comme à n'importe quel autre âge de la vie d'ailleurs.
Elle m'interroge souvent « que voyez-vous de moi ? », ou « est ce que vous voyez une vieille quand vous me regardez ? ».
Que demande-t-elle ?
Interrogation sur son image dans cette convocation du regard de l'autre, qui m'a invitée à déplier avec elle ce qui serait sous-jacent et tenter ainsi de parer l'effroi de se retrouver engloutie dans l'angoisse. « Ça me fait du bien de vous parler, ça me ramène à moi. Vous m'aidez à supporter ma douleur » pourra me dire Lucienne.
Une fois, bien qu'elle ne semblât pas confuse, elle me dit : « c'est bientôt mon anniversaire, je vais avoir 196 ans ». Je marque un peu d'étonnement et dit « 96 ? ». « Non, non me répond -elle, 196 ! c'est beaucoup n'est-ce pas et je vais bien ! ».
Dénier le temps amène sans doute à pouvoir dénier la mort. Lucienne a eu deux fils dont un est mort de maladie il y a 6 ans. Elle raconte que son fils est décédé dans ses bras, avec cette parole « Fais quelque chose Maman ! ».
Impuissance totale, dont la douleur reste intacte.
Le deuil d'un enfant est-il possible ?
Ce n'est pas dans l'ordre des choses comme on le dit souvent.

Etre regardé, se faire entendre, être nommé demeurent les socles identitaires qui font la part belle à la pulsion de vie.
A partir d'un mot, d'un geste, il y a de quoi ouvrir des espaces où le sujet parlera, manifestant ce qu'il vit et ce qu'il pense.
Ne serait-ce que l'espace d'un instant, cela en vaut toujours la peine.

Quitte à mourir, autant le faire en étant encore vivant.


Dérapages

Certains vieillissements seront chaotiques.
Quand la pathologie démentielle est présente, les lois du temps et du langage peuvent être bousculées, le sujet ne semblant plus pouvoir se soutenir des fondations temporo-spatiales ancrant le symbolique.
Ces collusions temporelles, possiblement angoissantes, figeraient la personne dans des séquences de semblant de présent.

Mme R s'agite, déambule d'un pas décidé dans les couloirs, elle interpelle d'un ton vif, presque agressif « il faut que j'aille chercher ma fille à l'école. C'est moi qui lui apporte le goûter. Elle m'attend. Je vais être en retard ! Je dois partir ».
Il est bien délicat d'apaiser Mme R. Elle est happée dans sa subjectivité de mère alors qu'elle est grand-mère et même arrière-grand-mère, 60 ans au moins sont abrasés.

Mme R est envahie par l'angoisse, comme emprisonnée dans un espace temporel désarrimé. Ces moments ne semblent pas - a priori - pouvoir être mis en lien avec un fil associatif. Sauf que cela se produit surtout l'après-midi, à l'heure d'une possible sortie de classe.
Un repère temporel est bien ancré mais il n'est plus d'actualité.
Mme R a perdu son père alors qu'elle était très jeune, elle mentionne souvent cette mort comme un véritable abandon, elle se qualifie d'ailleurs d'orpheline. Elle dit néanmoins avoir voué à sa mère une profonde reconnaissance pour avoir « été là ».
Mme R. s'est mariée, elle est mère de 5 enfants et sa maladie d'Alzheimer s'est déclarée au moment du décès de son mari, dont elle ne parle jamais. Il me semble pouvoir dire que la perte crée un manque, qu'elle couvrirait du voile de l'oubli de son homme, plutôt que de souffrir de son absence.
Cela nous renvoie au deuil, de ce qu'il nécessite un remaniement de sa propre place de vivant, l'acceptation de la réalité est une tâche sans fin (Winicott) et chacun s'en débrouille comme il le peut.
Mme R annule sa vie de femme, sa confusion la propulse vers la petite fille qui pourrait se retrouver seule.
Elle tenterait une réécriture de sa vie, en actant ce souvenir au présent. Mais sans pouvoir lui donner une dimension « historique » puisque le passé est évacué.
Elle n'est plus traversée de cette loi symbolique d'inscription temporelle qui ordonne les générations.

Mme R et tant d'autres rebroussent le chemin. Le curseur du temps ne se positionne plus, il est soumis à des variations. Il y a rupture de la continuité dans la discontinuité, la coupure ne se loge plus là où on l'attendait.
Le déroulement linéaire du temps chronologique deviendrait alors circulaire, cela se bouclerait à défaut de pouvoir se déplier, se poursuivre, s'historiciser.



L'Ehpad en tant qu'institution et les soignants engagés dans leur pratique, peut soutenir cette nécessité de continuité et de fiabilité.
Par les repères du quotidien, on assure une découpe du temps (en heures, en jours, en moments comme les repas, la nuit..), dans une masse qui peut sembler informe à certains patients qui peinent à s'y retrouver, qui ne semblent plus pouvoir être réceptifs à leurs besoins.
Anticiper même brièvement la suite, n'est plus toujours une évidence.

Si l'attente est une expérience commune à chacun, elle peut prendre une certaine ampleur dans l'univers de ce type d'établissement.
Une vieille personne a de l'avance sur beaucoup d'autres mais dans ce moment de sa vie, il va lui être intimer de patienter, de se soumettre à un temps collectif, de se caler sur un rythme qui n'est pas forcément le sien.
Attendre peut placer l'enfant dans la perspective de supporter un écart qui le familiarise avec le manque, avec l'élaboration de la réponse à ses besoins qui contribuera à le construire.
Pour autant dans le grand âge, l'attente n'est plus organisatrice, même si elle n'est pas forcément inutile. Elle renvoie à la perte, à l'absence de maîtrise de soi et de son environnement.
Notons qu'il ne faut pas forcément être très vieux pour ne pas supporter d'attendre.
Une perception subjective empreinte d'imaginaire peut nous donner l'impression que le temps s'accélère en vieillissant mais, pour certains âgés, les journées sont longues alors que les années passent vite. Alors quant à attendre.il n'y a parfois plus de temps à perdre.
Il y a l'art d'attendre et aussi celui de faire attendre.
Quand on la croise, quelle que soit l'heure de la journée, Mme G. demande à l'identique : « et maintenant qu'est-ce que je fais ? » sans que l'on ait pu avoir le temps de lui répondre, elle dit : « J'attends ? » Ce qu'on lui confirme fréquemment.
Mais il ne s'agit pas pour autant de la laisser perplexe dans le vide d'une attente abyssale, mais de lui faire savoir qu'elle en a encore à en attendre, que ce soit de la présence, des moments du quotidien qui viennent ponctués la journée, la scander pour barrer -même fugacement - un espace temporel sans fond.
Mais l'immobilité du corps rend la situation sensible. Dans la grande dépendance, l'attente peut prendre l'allure d'une demande à l'autre qui exclue de pouvoir supporter le temps en suspens avant la réponse, retour parfois violent vers un état de dépendance infantile. Sans l'autre je ne peux rien, ni bouger ni satisfaire mes besoins mêmes les plus intimes.
Mme T, une fois prête, se refuse à attendre dans sa chambre. Elle se laisse glisser de son fauteuil jusqu'à se retrouver par terre, ce qui peut se mettre en scène plusieurs fois de suite. Elle ne se soutient pas ou plus d'un processus de pensée qui lui permette d'anticiper la succession des moments à venir grâce à un repérage dans le temps et dans l'espace. Elle semble incapable d'attendre, oubliant la mention que quelqu'un va revenir. Elle ne peut plus se soutenir de la parole de l'autre. En difficulté pour en dire quelque chose, elle répète juste qu'elle ne veut pas être seule.
La demande de présence constante d'un Autre éviterait-elle de se confronter à un manque à être ?
On peut s'interroger sur la nature des expériences de séparation vécues par Mme T, sur ce lien à l'absent et la possibilité d'un deuil.
Si la séparation s'organise pour l'enfant sur une promesse d'indépendance pour l'âgé, cela peut résonner plutôt comme un abandon, un lâchage.

Se séparer est-ce prendre le risque de mourir ?

Peut-on apprendre quel que soit l'âge à tuer le temps ?

L'immortalité n'est pas le destin, le temps est infini mais singulièrement fini, ce que nous apprenons à partir d'un certain âge. Malgré tous les artefacts possibles, nous devons convenir que la mort est bien l'autre bord, cet autre point qui répond à celui de l'origine.
Le savoir, ne signifie pas pour autant l'admettre et parler de la mort est complexe.
Selon Freud la mort est irreprésentable, un impensable dans l'inconscient, néanmoins il précisera : « Si tu veux pouvoir supporter la vie, soit prêt à accepter la mort. » Freud, dans « Considérations actuelles sur la guerre et la mort » (1915),
« Je vis le temps qui est là » disait Mme F., 85 ans, en fin de vie. C'est la première fois qu'elle rencontre un « psy », elle questionne la nature du travail possible. Elle se prête au jeu, livre son récit pointant les évènements marquants, en interrogeant la place occupée dans le désir de l'autre, ses objets d'amour, les choix qui ont donné un sens au trajet parcouru.
Un jour, parlant de sa mort imminente, elle me dira « je vais bientôt mourir et ça vous n'y pouvez rien ». Ce avec raison, nous sommes en effet tous impuissants devant la mort.
Si de nombreuses vieilles personnes se disent prêtes à mourir, toutes quasiment font part de leur peur de mourir et de leur désir que cela advienne sans qu'elles aient à l'éprouver. Mourir dans son sommeil reste une mort enviée.
La confusion rencontrée dans la maladie d'Alzheimer se nourrirait-elle aussi de l'angoisse de mort ? Ne vouloir rien savoir, oublier que toutes les bonnes choses ont une fin.
Angoisse de mort, angoisse devant la mort. Certains n'attendent pas d'être vieux pour se débattre avec cela.
Monsieur C revient souvent sur sa relation au temps : « J'étais toujours pressé, je voulais que tout aille vite. Maintenant que j'ai 90 ans, je le regrette vraiment, j'aurais dû profiter, prendre plus mon temps. J'ai tellement de choses à dire ! ».
Le débit de parole de monsieur C est rapide, bien qu'il ne craigne pas le silence. Il s'accorde le temps pour parler dans un autre tempo que celui qui a rythmé sa vie.
Et de quoi parle le plus Monsieur C ? de son travail qu'il a quitté voilà plus de 30 ans, du poste très élevé qu'il occupait sous la houlette d'un patron qu'il estimait énormément. Son récit est empreint de cette relation et de cette reconnaissance perdue qu'il évoque les larmes aux yeux.
Perdre la brillance d'un statut est toujours coûteux.
Il parle aussi de son enfance pendant la guerre, de la peur ressentie. Monsieur C m'a confié compter régulièrement ses chemises dans son placard, en en dénombrant me semble-t-il bien plus qu'il n'y en avait.
Du plus pour ne pas se confronter au moins.
Pas facile d'admettre ni de supporter que le compte serait bon.
Monsieur L, homme de 92 ans à la crinière blanche et à la moustache bien taillée, présente à son arrivée des troubles cognitifs avec des pertes de mémoire dont il se plaint. Il parle avec humour de ses souvenirs.
Au cours de nos séances, Mr L s'est dit surpris d'évoquer des évènements qu'il pensait avoir oublié. Ils les racontent, comme un moment inaugural d'une douleur indicible, redoublée par celle ressentie au décès récent de sa femme, moment de majoration de ses troubles.
Au fil des mois et de l'avancée de sa démence qui l'a confronté au manque des mots, il s'est mis à compter, longue série de chiffres clamés à tue-tête, alternant parfois avec « j'ai mal ! ».
Son énumération est sans faille, il ne se trompe jamais, même s'il peut hésiter. Il garde la maîtrise de ce compte à rebours qui va croissant sans point de butée. Les chiffres s'agencent dans une suite logique, un ordre symbolique sans équivoque : derrière le 1, il y a le 2, puis le 3.
Quand j'ai fait l'hypothèse d'une polysémie de ce comptage, je me suis autorisée à dire à Monsieur L qu'il comptait ici, qu'il pouvait compter sur ses enfants (ce que je savais vrai) et aussi sur nous, que nous serions présents jusqu'au bout quelle que soit ce qui lui faisait mal. Son acquiescement tout en sourire m'a laissé penser qu'il m'avait entendue.


Avis de turbulences dans les relations familiales
Quand les parents vieillissent, il n'est pas rare que les enfants en pâtissent.
La violence n'attend pas le nombre des années pour exister dans les familles, mais elle peut se trouver amplifiée à l'orée de la fin de la vie.
Il y a des étapes exceptionnelles dans la vie, exceptionnelles car elles ne se produisent qu'une seule fois, ce qui est le cas de la naissance et de la mort. Ces moments de franchissement, où advient la vie ou bien celui où elle part, potentialisent dans les familles des affects puissants, associant intensément l'amour et la haine.
La formulation de vou de mort dans les paroles des familles est parfois parfaitement explicite : « Je préfèrerais qu'il soit mort ! », « je voudrais qu'elle meure vite » « pourvu que ça ne dure pas longtemps ! ».
On pourrait entendre une demande d'être libéré d'un lien à l'autre tant le parent aujourd'hui désacralisé par son vieillissement n'est plus ce qu'il était et qu'aucun réaménagement n'est possible pour l'enfant devenu adulte, face à cette nouvelle donne.
L'institution peut être en ligne de mire d'une certaine agressivité et c'est son rôle de la contenir.
Je pense que quand ne peut plus se confronter à son parent, si on ne peut plus « l'attaquer » comme c'est à l'ouvre à l'adolescence par exemple, alors que la question de la séparation est latente et que le lien est malmené par la pathologie ou tout simplement par la vieillesse, il faudra alors s'adresser ailleurs, aux soignants, à l'institution. parce que c'est difficile de voir son parent changer.
Et ce de surcroît quand un fils ou une fille est dans une sorte de fragilité vis-à-vis de la filiation (ne pas avoir d'enfant par exemple).
La perte du parent recouvrirait alors le risque d'une chute dans une sorte d'abîme générationnelle, car la transmission va se trouver suspendue, ou interrompue.

Il peut y avoir également une certaine impatience de pouvoir être, enfin, dans le chagrin de la perte réelle face à ce parent atteint de maladie, telle la maladie d'Alzheimer par exemple.
Les symptômes peuvent venir user la relation, et générer un lien bien trop tendu, quand il n'est pas complètement distendu, à ce parent devenu désormais un étranger.
Ce sur quoi s'est étayée la relation a disparu, l'attachement reste mais est adressé au parent « d'avant », celui qui occupait une place au-dessus.
Voir son parent vieillir, de surcroît si c'est jonché de difficultés, ébranle l'ordre des générations.

S'occuper de ses parents peut renvoyer à un maternage, à occuper une nouvelle place ce qui pour certains est totalement inconfortable, voire impossible. Pour d'autres la relation prend sens, parfois au prix d'un investissement sans distance, qui malmène.
Il n'est pas rare que l'enfant le plus présent auprès de son parent soit celui qui éprouve la nécessité de réparer une enfance complexe. Comme pour tenter de donner ce qui n'a pas été reçu.

Ce moment de vie qui ne se partage plus comme avant, dont les cartes sont redistribuées mobilisent des sentiments, des affects pluriels chez tous les protagonistes.

La personne âgée elle aussi peut être animée de mouvements véhéments, adressés à sa descendance, parfois à l'un de ses enfants en particulier ou aux plus jeunes en général. Certains personnages de film ont très bien illustré ceci, telle Tatie Danièle.
Rappelons-nous aussi Cronos, qui dévorait ses enfants au fur et à mesure qu'ils naissaient, afin de ne pas être détrôné. Ne pas avoir de descendance et pas de rival sexuel non plus puisqu'il trancha les testicules de son père.
Garder sa place, laisser la place sont sans nul doute des questions épineuses.

Conclusion

De quoi se souvient-on quand on est vieux ?
Le sujet âgé est confronté à sa mémoire, modelée de traces, de souvenirs mais aussi d'oublis. Certains réécrivent l'histoire dans laquelle ils ont pris place, sans qu'une dimension chronologique ordonne, laissant jaillir les affres du désir, et le retour du refoulé. L'inconscient ne connaît pas le temps.
Les enfants recherchent la répétition comme valeur d'un même qui revient à l'identique. Dans le grand âge, ce qui pourrait venir lasser celui qui écoute, est sans doute fort précieux pour celui qui le répète.
Les souvenirs récurrents ont-ils comme bénéfice de bercer le sujet dans un espace temporel maîtrisé, qui ravive l'histoire dont on connaît le début et la fin ?

Il était une fois,
ou plutôt il était une fois
et encore une fois
et encore une fois et encore une fois.
recommencer, pour s'affranchir du temps passé et rendre le présent moins cruel dans ce qu'il augure du futur.
Avoir besoin d' être écouté et entendu est notre lot à tous. Il est primordial pour soutenir la pulsion de vie de pouvoir continuer à s'adresser à quelqu'un.
Parce qu'il est fondamental depuis l'enfance d'être pris dans le langage, parce qu'il n'y a pas d'âge pour parler et que soit décrypter ce qui agite.
Et ce qui peut perturber les vieux n'est pas des moindres. Le sens de la vie, son début et sa fin, nous avons à en apprendre de ce qu'ils nous en disent.


Faire avec son temps, avoir fait son temps, faire avec les derniers jours du reste de sa vie.
La vieillesse n'est pas une maladie, c'est un moment de l'existence.
Veiller à soutenir la dimension du Sujet, quel que soit son âge et ce au-delà de la pathologie même bruyante, c'est continuer à créditer l'âgé d'un dire et soutenir la pulsion de vie.

Vieillir est-il l'affaire d'un renoncement ? Pas sûr !
Il est bien différent d'accepter cette indomptable métamorphose qui s'effectue par paliers que de lâcher ce qui nous anime à rester en phase avec le tourbillon du monde, ce qui nous émeut, ce qui nous porte, ce qui nous émerveille, ce qui nous donne du plaisir.
Nicolas Boileau disait que "Chaque âge a ses plaisirs, son esprit et ses mours".
SI chaque âge à ses plaisirs, certains ne disparaissent pas même s'ils se trouvent transformés tout au long de la vie.
Qu'est ce qui ne se ferait pas ou plus au prix d'interdictions imaginaires ?
Bouger, même si ce n'est que du bout des cils, parler même si les mots se dérobent, être en lien nourrissent Eros au détriment de Thanatos.

Pour faire mentir la chanson et extrapoler légèrement, plaisirs d'amour peuvent durer toute une vie, si les chagrins d'amour se trouvent consolés.
Enfin je citerai Pablo Neruda « Si rien ne peut nous sauver de la mort, qu'au moins l'amour nous sauve la vie ».